Test Blu-ray : Nope

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Nope

États-Unis, Japon, Canada : 2022
Titre original : –
Réalisation : Jordan Peele
Scénario : Jordan Peele
Acteurs : Daniel Kaluuya, Keke Palmer, Brandon Perea
Éditeur : Universal Pictures
Durée : 2h10
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 10 août 2022
Date de sortie DVD/BR : 10 décembre 2022

Les habitants d’une vallée perdue du fin fond de la Californie sont témoins d’une découverte terrifiante à caractère surnaturel…

Le film

[3,5/5]

Après Get Out et Us, Jordan Peele décide de surprendre son monde en dynamitant le petit monde de la science-fiction et plus particulièrement de l’invasion extraterrestre avec Nope, un nouvel opus estampillé Elevated Horror s’attardant sur la psychologie humaine tout en empruntant quelques codes au western et en explorant bien sûr certaines de ses thématiques régulières, notamment sur les tensions raciales au cœur des États-Unis.

Comme les films précédents de Jordan Peele, Nope comporte bien sûr quelques défauts, mais il n’en reste pas moins une expérience rafraîchissante, nous proposant une vision unique de cinéaste, un montage soigné et des personnages originaux. Mélangeant le meilleur du cinéma de M. Night Shyamalan et de Steven Spielberg, Jordan Peele est parvenu une nouvelle fois à créer une œuvre passionnante sur le plan narratif, tout en restant profondément axée sur ses personnages. Une belle réussite qui avait été évoquée dans les colonnes de critique-film.fr par notre chroniqueur Tobias Dunschen :

« En désormais trois films en tant que réalisateur, Jordan Peele a réussi à se forger une réputation à l’écart de ses origines artistiques de comique potache. L’humour n’est certes pas complètement absent de Get Out, Us et Nope. Mais dans le meilleur des cas, on pourrait interpréter ces histoires effrayantes comme des commentaires satiriques sur la conscience collective des Américains à un moment donné. Au fond, elles exploitent des peurs ancestrales, mises au goût du jour par l’intermédiaire d’une représentation savamment ciblée de minorités le plus souvent laissées de côté par le cinéma hollywoodien. Attention, on n’ira pas jusqu’à affirmer que Peele soit le digne héritier de Spike Lee, un cinéaste qui n’a au demeurant jamais flirté avec le genre fantastique. Toutefois, par son propos pas dépourvu d’arrière-pensées lucides et son style globalement peu pompeux, il ne nous paraît pas complètement exagéré de rapprocher son univers de celui de M. Night Shyamalan. La quête pathologique de la chute en moins, un langage cinématographique assez sophistiqué en plus.

Ainsi, dans Nope, il est au moins autant question d’une exclusion qui ne dit pas son nom que d’une aventure d’extra-terrestre rocambolesque et en fin de compte pas totalement engageante. Tandis que cette dernière suit avec une certaine prévisibilité la recette des films de monstres, au moins aussi ancienne que Les Dents de la mer de Steven Spielberg, le portrait dressé au fur et à mesure des personnages se distingue par sa prise de distance par rapport aux stéréotypes de représentation qu’on croyait enracinés de façon indécrottable dans le cinéma américain grand public. (…)

Le personnage principal que Daniel Kaluuya interprète avec un flegme rafraîchissant rompt avec ces protagonistes appelés à devenir vigoureux et valeureux, une fois que le mauvais sort s’est abattu sur eux. A leur opposée, son OJ est la passivité même. Ce n’est pas un lâche à proprement parler, ni un grand paresseux pour qui ses responsabilités de jeune entrepreneur ne signifient plus rien, face à son impossibilité de faire le deuil de son père. Il se définit davantage par le titre du film. Non, ce n’est pas le bon moment pour jouer au héros. Et non, il n’est pas prêt à se dépasser, tant que la survie de son cercle intime n’est pas en jeu. (…)

Ce flegme manifeste constitue un contrepoids des plus saisissants envers la volonté de se mettre en scène à tout prix de la plupart des autres personnages. Les deux plus grands coupables de cette façade étincelante derrière laquelle se cachent de lourds traumatismes sont la sœur de OJ et le gérant du parc d’attractions à qui le jeune dresseur se voit obligé de céder plusieurs de ses chevaux. Keke Palmer dans le rôle de l’artiste un brin bordélique, une grande débrouillarde qui est pourtant incapable de mener seule à bien ses nombreux projets, est par défaut le moteur de l’action. Un moteur qui ne tourne pas sans accroc, en dépit de la volonté du scénario de boucler in extremis la plupart des fils tendus au cours du récit. De même, l’homme de spectacle que Steven Yeun campe avec une foi inébranlable est vite dépassé par l’écart de plus en plus profond entre ses velléités d’ancien enfant-vedette et la réalité macabre de l’attraction qu’il comptait dompter. (…)

Est-ce que Nope fera date dans la filmographie de Jordan Peele, voire dans l’Histoire du cinéma fantastique ? Quelques semaines après sa sortie au cinéma, il est évidemment encore beaucoup trop tôt pour pouvoir le déterminer. Il n’empêche que le troisième film du réalisateur s’inscrit dans une réappropriation fort appréciable du genre par des conteurs et leurs personnages, trop longtemps considérés comme les premiers à sacrifier sur l’autel d’un compte à rebours meurtrier. En somme, il s’agit d’un film d’épouvante se situant légèrement en décalage par rapport à la norme hollywoodienne. Pas assez pour démarrer tout un nouveau mouvement de contre-courant afro-américain, mais suffisamment intelligent pour ouvrir le champ de réflexion des possibles hypothétiques à explorer dorénavant. »

Extrait de la critique de notre rédacteur Tobias Dunschen. Découvrez-en l’intégralité en cliquant sur ce lien !

Le Blu-ray

[4/5]

Côté galette Haute-Définition, le Blu-ray de Nope édité par Universal Pictures s’avère, comme toujours, d’excellente qualité. L’image envoie le bois, avec des contrastes au taquet et des couleurs remarquables ; les nombreuses séquences de jour – une nouveauté dans la saga – respectent pleinement la superbe photo de Hoyte Van Hoytema, les contrastes sont poussés dans leurs derniers retranchements, et le film affiche un niveau de détail assez époustouflant. Les passages nocturnes sont tout aussi sublimes, aucune baisse de définition n’est à déplorer. Comme d’habitude avec les films partiellement tournés en IMAX, les séquences profitant de ce format sont présentées au format 1.78, et s’avèrent absolument resplendissantes, qu’il s’agisse des scènes de jour ou de nuit. Niveau son, la VO s’offre un mixage en Dolby Atmos, qui sera, faute de matériel adéquat, décodé en Dolby TrueHD 7.1. La VF est quant à elle proposée dans un puissant mixage Dolby Digital + 7.1. Dans les deux cas, il s’agit là de mixages aux dimensions purement épiques : l’immersion est optimale pour le spectateur, la spatialisation joue la carte de l’ambiance, de l’efficacité et de la finesse : une pure démo acoustique.

Dans la section suppléments, les cinéphiles tombés sous le charme du film pourront tout d’abord se régaler d’une poignée de scènes coupées (9 minutes) et d’un court bêtisier (5 minutes). On enchaînera ensuite avec un passionnant making of (56 minutes), extrêmement complet dans son genre, tourné comme un vrai documentaire, qui explorera de façon fine le travail et le processus de création de Jordan Peele, l’histoire du film, ses thématiques, les lieux de tournage, les acteurs, etc, etc. Formidable. On continuera ensuite avec une featurette qui reviendra entre autres sur le rôle du ciel – et de l’OVNI – dans le film, le côté subversif du sous-texte du film, ainsi que le travail sur le son et l’image (14 minutes). On terminera enfin avec une autre featurette dédiée à l’extrait du film d’Eadweard Muybridge décomposant les mouvements du cheval au galop, qui est une des clés de compréhension de Nope (6 minutes).

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