Test Blu-ray : Les nouvelles aventures d’Aladin

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Les nouvelles aventures d’Aladin

France : 2015
Titre original : –
Réalisateur : Arthur Benzaquen
Scénario : Daive Cohen
Acteurs : Kev Adams, Jean-Paul Rouve, Vanessa Guide
Éditeur : Pathé
Durée : 1h46
Genre : Comédie, Fantastique
Date de sortie cinéma : 14 octobre 2015
Date de sortie DVD/BR : 17 février 2016

 

À la veille de Noël, Sam et son meilleur pote Khalid se déguisent en Père-Noël afin de dérober tout ce qu’ils peuvent aux Galeries Lafayette. Mais Sam est rapidement coincé par des enfants et doit leur raconter une histoire… l’histoire d’Aladin… enfin Sa version. Dans la peau d’Aladin, Sam commence alors un voyage au cœur de Bagdad, ville aux mille et une richesses… Hélas derrière le folklore, le peuple subit la tyrannie du terrible Vizir connu pour sa férocité et son haleine douteuse. Aladin le jeune voleur, aidé de son Génie, pourra-t il déjouer les plans diaboliques du Vizir, sauver Khalid et conquérir le cœur de la Princesse Shallia ? En fait oui, mais on ne va pas vous mentir, ça ne va pas être facile…

 

 

Le film

[3/5]

Il existe dans la critique française, qu’elle soit professionnelle ou simplement pratiquée en « amateur » sur des blogs ou autres bouteilles à la mer du Net, un courant bien connu d’animosité envers tout ce qui ressemble de près ou de loin à une comédie populaire dont la tête d’affiche est un humoriste. Plus ces « comiques » reconvertis dans le cinéma sont jeunes, plus les critiques sont véhémentes, avec une mention particulière et un petit surplus de hargne et de gratuité s’ils viennent de la télévision (écurie Canal +, émissions ou séries TV…). Plus les humoristes prennent de la bouteille, plus les critiques se tarissent, au point que dix, quinze, vingt ans après leurs débuts au cinéma, on trouve aujourd’hui tout à fait normale leur présence à l’affiche de tel ou tel film. Pire, on en viendrait même à les apprécier : les films des Charlots, de Coluche, du Splendid ou des Inconnus ont clairement été réévalués avec le temps, et font maintenant pour de nombreux d’entre eux carrément figure de classiques ; de même, la présence de comédiens issus de la scène ou de la télévision à l’affiche de n’importe quelle comédie de « qualité française » (Francis Veber, Jean Becker…) n’étonne aujourd’hui plus personne. Il existe bien sûr des exceptions à la règle : des humoristes tels qu’Albert Dupontel (pourtant révélé par Patrick Sébastien) ou François Damiens (Canal +) n’ont jamais eu trop à subir les foudres aveugles de la critique – le privilège de l’âge peut-être.

Le plus difficile pour le jeune humoriste d’aujourd’hui, s’il est désireux de se lancer dans la grande aventure cinématographique, sera donc clairement indépendant de son talent comique : il s’agira surtout d’avoir les « épaules » pour tenir le choc et encaisser les critiques, décuplées et beaucoup plus cruelles à l’ère des réseaux sociaux. Il lui faudra les épaules pour supporter le venin de la « profession », les tweets assassins et autres injures gratuites remontant sur les divers fils d’actualité sur Facebook, ne pas céder au découragement, réunir les fonds pour enchainer les projets, vaille que vaille, aller de l’avant pour ne pas finir dans les oubliettes du public, méritées ou pas, aux côtés d’Elie Semoun, Jamel Debbouze ou Michaël Youn.

Au final, plus que les entrées en salles et le ressenti immédiat, c’est le temps qui fait que telle ou telle comédie touche son public. Avec sa note de 3,7/10 sur le site de référence IMDb et la cabale généralisée autour du film sur le Net en 2015 (il n’y a sans doute pas un seul site de cinéma en France qui ne le référençait pas dans son « Flop » de fin d’année), Les nouvelles aventures d’Aladin aura beaucoup fait parler de lui sur les réseaux sociaux en fin d’année dernière. Malgré cela, le film a quand même attiré 4,4 millions de personnes dans les salles obscures en octobre : s’agirait-il de quatre millions d’abrutis congénitaux ? Certes non, car le film mettant en scène Kev Adams, coqueluche des ados et héros de la série Soda, s’avère en réalité bien plus fréquentable que ne le suggère sa désastreuse réputation. Cet Aladin est une comédie orientée ados, s’adressant également aux « ieuvs » de 35-40 ans amateurs de l’humour d’Eric et Ramzy et des Robins des bois. D’un point de vue purement et méchamment analytique, Les nouvelles aventures d’Aladin nous propose une narration et des dialogues pensés / travaillés dans le but de produire des effets comiques immédiats, mitraillant des gags et des enjeux directement hérités des Monty Python ou des ZAZ (saupoudrés de frontalité stupide avec des gags pipi/caca très franchouillards), et tenant surtout de la modernité des séries et films développés par Seth MacFarlane. Bien sûr, comme les films de MacFarlane, le film en agacera plus d’un dans sa propension à faire de chaque vanne ou rebondissement une espèce de « pièce ajoutée » sur l’intrigue : en gros, si vous virez un gag ou les intervertissez entre eux, ça ne change absolument rien. Au final, le film réalisé par Arthur Benzaquen donnera certes l’impression d’enchainer les sketches ou les saynètes au détriment d’une logique narrative complexe, mais la comédie populaire a toujours su se contenter d’un impact franc et direct, quitte à paraitre simple, voire simplette (comme dans le cas des films des Charlots évoqués un peu plus haut). De toutes façons, l’humour en général finit toujours par trouver son chemin vers nos zygomatiques, qu’il soit sophistiqué ou pas.

Il conviendra donc au visionnage de ces Nouvelles aventures d’Aladin de ne pas se montrer trop « snob » ou exigeant : gardons également à l’esprit que par sa nature même, le film s’adresse plutôt à un public âgé de 12 à 18 ans. Les « séniors » de 35/40 ans (auxquels Kev Adams fait référence dans le making of du film) ne seront cependant pas complètement mis de côté car à notre grande surprise, Aladin n’est pas forcément le personnage central du film, se permettant des clins d’yeux appuyés à ses ainés (la référence explicite à RRRrrrr!!!) et s’offrant une réelle dimension de film « choral » avec une belle galerie de personnages traités sur un pied d’égalité. Très premier degré, Kev Adams est en effet très loin d’avoir le rôle le plus drôle du film, et ne s’offre pas, loin de là, les meilleures répliques ou séquences. Jean-Paul Rouve est toujours immense dans sa composition habituelle de fourbe (avec une forte tendance à la soliloquie), le jeune William Lebghil (héros de Soda aux côtés de Kev Adams) confirme après Jacky au royaume des filles son immense potentiel comique, et les amateurs de l’humour d’Eric et Ramzy se régaleront également d’une prestation haute en couleurs d’Eric Judor, littéralement énorme dans le rôle du génie, et de ses retrouvailles inattendues à l’écran avec Ramzy, quelques mois avant la sortie de La tour 2 contrôle infernale.

Bien sûr, le film met un petit quart d’heure –un peu laborieux pour le coup– à trouver son rythme de croisière, mais une fois son intrigue lancée, une bonne quantité de gags fonctionnent. Il y a naturellement beaucoup de « déchet », seuls un gag sur quatre ou cinq parviendra à faire rire, d’autres tombent complètement à plat, mais le tout est suffisamment équilibré pour que tel ou tel gag fonctionne plutôt sur les jeunes, et tel ou tel autre atteigne plutôt le cœur des plus âgés. Tout est une question de cible au final, et si incongru puisse-t-il paraitre à priori, Les nouvelles aventures d’Aladin parvient tout de même à cultiver un humour décalé, multiplie les inepties réjouissantes en se foutant éperdument du qu’en-dira-t-on et s’attirera une certaine sympathie de la part des spectateurs se lançant sans à priori dans l’aventure.

Alors, au vu du produit fini, Les nouvelles aventures d’Aladin méritait-il tant de cynisme et de mépris ? Dans quelle mesure ce pur produit de cinéma populaire à destination des ados et ne visant qu’à divertir serait-il plus infâme que n’importe quel produit parfois à moitié fini du genre de ceux que nous refourguent régulièrement les américains à destination de ce même public ? On pense à des films tels que Clochette et la créature légendaire (DTV aux Etats-Unis, sorti en salles chez nous) ou encore aux « films » adaptés de séries ou lignes de jouets tels que les Ninja turtles de Paramount ou les Monster High qui font les beaux jours d’Universal ? D’un point de vue formel, la réalisation de Arthur Benzaquen ne révolutionne certes rien, mais s’avère fonctionnelle et tente quelques effets stylistiques parfois réussis (le passage du 1.85 au format Scope 2.35 quand le personnage de Kev Adams commence à raconter son histoire, à la façon d’un Peter Falk dans Princess Bride). Les décors, recyclés du Kingdom of Heaven de Ridley Scott, ont méchamment de la gueule et la photo de Pierre Aïm (La haine) nous propose quelques jolis plans, admirablement composés. En deux mots comme en cent, Les nouvelles aventures d’Aladin est donc un produit soigné, et le genre de plaisir coupable que l’on se surprendra peut-être à revoir dans quelques décennies en louant le charme de ces comédies « comme on n’en fait plus… », comme on le fait aujourd’hui devant Banzaï ou Fantomas, largement considérés comme des nazeries sans nom à l’époque de leur sortie.

 

 

Le Blu-ray

[5/5]

Le Blu-ray édité par Pathé nous propose un transfert proche de la perfection. Chaque plan affiche une beauté exemplaire, rendant clairement hommage à la photo du film signée Pierre Haïm, les couleurs sont chaudes, profondeur de champ et piqué sont au meilleur de leur forme et offrent une quantité incroyable de détails : une belle galette. Les contrastes et les noirs sont également de la partie avec une superbe densité. Côté son, Les nouvelles aventures d’Aladin s’offre également une belle réussite acoustique : chaque canal dépote sévère, générant mille et un effets aux couleurs des mille et une nuits (mon dieu que c’est beau ce que j’écris là). Les dialogues sont clairs, les surrounds proposent une immersion totale, et les passages les plus musicaux sont précis et toujours plaisants.

Du côté des suppléments, Pathé fait également le taf en nous proposant une demi-heure de scènes coupées ou étendues, qui nous réservent quelques éclats de rire supplémentaires : on retiendra tout particulièrement les monologues improvisés et bien barrés d’Eric Judor, une référence à E.T. par Audrey Lamy et un gag anachronique autant que stupide (mais efficace) sur Midas délivré par Vanessa Guide. Toutes ces scènes peuvent être visionnées telles quelles ou avec le commentaire explicatif du réalisateur Arthur Benzaquen. On poursuivra avec un making of d’une vingtaine de minutes nous donnant un aperçu d’un tournage visiblement détendu, mais qui choisit également de s’attarder par moments sur quelques aspects plus techniques du film : très intéressant et développant une très bonne ambiance. On terminera avec un bêtisier faisant la part belle à William Lebghil et Eric Judor.

On notera enfin que malgré le succès du film en salles, Pathé innove en proposant cette nouveauté en DVD et Blu-ray au prix unique et très abordable de 9,99€.

 

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