Critique : L’Antre de la folie

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L'Antre de la folie afficheL’Antre de la folie

Etats-Unis, 1994
Titre original : In the Mouth of Madness
Réalisateur : John Carpenter
Scénario : Michael De Luca
Acteurs : Sam Neill, Jürgen Prochnow, David Warner
Distribution : Metropolitan Filmexport
Durée : 1h35
Genre : Epouvante
Date de sortie : 8 février 1995

Note : 4,5/5

À l’évocation du nom de John Carpenter, plusieurs films nous viennent à l’esprit, Halloween, The Thing ou encore Christine mais l’on a souvent tendance à oublier L’Antre de la folie. Pourtant ce film faisant partie de la trilogie de l’apocalypse (comprenant aussi The Thing et Le Prince des ténèbres) est une véritable perle horrifique. La première chose qui frappe à la vision de ce film, c’est qu’après 20 ans, il a plutôt bien vieilli. Les rares recours aux effets numériques permettent à plusieurs scènes de faire mouche. Certaines créatures dégoulinantes mettent mal à l’aise, ce qui montre l’aspect réel que peut apporter le latex s’il est bien utilisé. Le bestiaire de ce film est fourni et ne laisse pas de marbre. Si l’on peut penser que certaines créatures font doublon avec celles de The Thing, d’autres sont dans un registre radicalement différent.

Synopsis : John Trent, enquêteur pour les assurances très doué, est chargé par une maison d’édition de retrouver un écrivain à succès nommé Sutter Cane qui crée des histoires horrifiques apparemment réelles…

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Une mise en abîme qui met en abîme dans une abîme…

S’il y a une chose qui résume le mieux cette œuvre, c’est la figure de style de la mise en abîme. Le film joue en permanence sur cette figure. Il commence d’ailleurs avec l’impression du nouveau livre de Sutter Cane (clairement un sosie de Stephen King) dont le titre est… L’Antre de la folie. De plus, l’histoire nous est racontée par un narrateur intradiégétique (personnage faisant partie du récit) car c’est John Trent devenu fou qui explique comment il en est arrivé là. L’enjeu de l’histoire crée aussi chez nous un sentiment de vertige parce que John aidé par Linda Stiles (employée dans la maison d’édition de Sutter Cane) va se retrouver dans une ville (Hobb’s end) qui est décrite dans les livres de Cane. Mais cette ville n’existe pas en vrai, elle n’est sur aucune carte. John et Linda sont-ils dans une histoire de Cane ou juste en train d’halluciner ? Où se trouve le réel et où se trouve la fiction ?

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La mise en scène va appuyer ces points. Par exemple, arrivée dans une auberge de Hobb’s end, Linda va citer des passages des livres de Cane pour prouver à John, sceptique de nature, que tout ce qui les entoure est tiré de la fiction. À ce moment, Carpenter nous montre comment traduire l’écriture par le cinéma, comment transposer un scénario sur de la pellicule. Ainsi, les quelques lignes décrivant l’auberge : une latte de plancher qui bouge, le tableau au réfectoire représentant deux amants qui semblent nous fixer, tout cela se transforme en inserts, en gros plans. À travers les ressemblances entre les livres de Cane et ce que vivent les protagonistes, Carpenter nous donne à voir une métaphore du cinéma, de sa transposition à partir d’un simple texte. Avec L’Antre de la folie, il nous parle en plus de la création, d’œuvres qui viennent directement des tripes de leurs créateurs et nous apparaissent réelles car magnifiquement écrites ou racontées avec talent. On comprend donc mieux le nombre de références à Lovecraft, étant donné que cet écrivain a su rendre presque tangible toute une mythologie sur des divinités (les grands anciens) et des cultes païens.

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Références à l’horreur

Cela nous amène à d’autres références. Sutter Cane sonne un peu comme Stephen King, ils possèdent tous deux les phonèmes /s/ et /k/. C’est un écrivain mondialement connu et à en croire Linda il aurait plus de succès que King lui-même. Hobb’s end est de plus censée se trouver près du Maine, région favorite de cet auteur. La descente aux enfers que vont vivre John et Linda rappellera à certains spectateurs des histoires de Lovecraft, que ce soit Le Cauchemar d’Innsmouth ou Dagon. Et dans L’Antre de la folie, les citoyens de Hobb’s end se transforment aussi au fil de l’histoire.

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Alan Grant au pays de Cane

Pour ce qui est des acteurs, retrouver Sam Neill en personnage principal fait plaisir. Son interprétation est intéressante et permet quelques pointes d’humour. On s’attache à cet enquêteur cartésien. Il représente le spectateur lambda qui ne croit pas aux monstres. Le faire atterrir dans une histoire d’horreur concrète nous fait comprendre qu’on ne va pas au cinéma pour du réel étant donné que c’est l’art du faux. Je dois avouer que j’ai toujours eu du mal avec les films commençant par «basé sur une histoire vraie». Julie Carmen assure son rôle secondaire avec brio et son personnage fait contraste avec Sam Neil, ce qui apporte du dynamisme à leurs dialogues. Jürgen Prochnow qui joue Sutter Cane ressemble étrangement à Franck Dubosc et ça c’est…bizarre. Charlton Heston est plutôt convaincant en patron de la maison d’édition «Arcane».

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Conclusion

L’Antre de la folie reste l’un des meilleurs Carpenter. Si vous n’aimez pas son cinéma, passez votre chemin. Cependant, si vous aimez Stephen King, Lovecraft et que Carpenter reste pour vous l’un des meilleurs réalisateurs de films d’horreur des années 80 et 90… foncez ! Entrez à Hobb’s end mais faites attention à la fiction, elle pourrait prendre vie lorsque vous entendrez un bruit suspect dans votre chambre à trois heure du matin. Quant à moi, je vais prendre un Dafalgan, la mise en abîme m’a abîmée le crâne…

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