Critique : Dunkerque

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Dunkerque

États-Unis, Grande-Bretagne, France, 2017
Titre original : Dunkirk
Réalisateur : Christopher Nolan
Scénario : Christopher Nolan
Acteurs :  Fionn Whitehead, Tom Glynn-Carney, Tom Hardy …
Distribution : Warner Bros. France
Durée : 1h47
Genre : Guerre
Date de sortie : 19 juillet 2017

5/5

On a beaucoup parlé des formats de Dunkerque. Vu en IMAX 1.43, le résultat n’en est que plus impressionnant (malgré un changement de ratio au départ déstabilisant, vu que 25% du film a été tourné en cinémascope « classique »). Mais quittons tout détail technique pour se pencher sur le film en lui-même : immersif, viscéral, épatant, autant d’adjectifs qui ne sont pas usurpés. 

Synopsis : Le récit de l’opération Dynamo, qui permis l’évacuation de troupes alliées de Dunkerque en mai 1940.

Time

Christopher Nolan est depuis ses débuts, un cinéaste passionné par la mise en scène du temps : Memento et ses scènes à rebours, Insomnia et son flic qui ne peut plus dormir depuis une bavure, ou encore Interstellar avec ses astronautes dont la perception du temps évolue selon la planète qu’ils explorent. Le dernier long-métrage de la poule aux œufs d’or de Warner Bros. ne fait pas exception à la règle, puisque nous y suivons une course contre la montre : l’évacuation des forces anglaises, en mai 1940, de Dunkerque, où les alliés sont encerclés par les soldats allemands. Cette évacuation est narrée à travers trois points de vue différents : celui d’un soldat qui tente d’échapper à cet enfer sur terre qu’est alors le littoral du nord de la France, celui d’un civil anglais qui compte secourir les anglais qui sont piégés là-bas en les faisant embarquer sur son bateau de plaisance, et enfin celui d’un pilote qui affronte les bombardiers allemands qui se mêlent de tout ça. Le tout monté en parallèle, mais avec des temporalités différentes : comme dans Inception, le temps passe plus ou moins rapidement selon qui on suit. Si l’exercice paraît maladroit au début, il finit par ne plus être un obstacle à la compréhension du déroulé des évènements par la grâce du montage, sans aucun carton explicatif. Mais si l’on parvient à se repérer, on est au même niveau que les troupes sur place : dépassés par les évènements.

Héros quotidiens et ennemis invisibles

En effet, caché au fond d’une cale ou dans un avion en piètre état, une seule chose compte : survivre. Nolan nous plonge ainsi dans une heure quarante pendant laquelle l’urgence se fait palpable. L’estomac se noue dès les premières secondes, le cœur se serre dès les premières images ; c’est  une expérience viscérale, sans aucun temps mort qu’offre Christopher Nolan au spectateur. Et si on est plongé à hauteur d’homme dans ce bourbier, ce n’est que pour mieux ressentir l’immense masse de vies humaines qui est en jeu. On ne connaît pas le passé des personnes que nous suivons, parfois même nous ignorons jusqu’à leur identité, et l’identification n’en est paradoxalement que plus forte. Nous n’avons d’ailleurs pas le temps de s’y intéresser : dans cet enfer dans lesquels les bombes peuvent pleuvoir à n’importe quel moment, il faut simplement essayer de garder la tête hors de l’eau. Contrairement à l’immense majorité des « films de guerre », l’ennemi n’est lui non plus pas personnifié. Nul nazi qui hurle, seuls des avions lointains aux obus dévastateurs, une mer déchaînée, et l’Autre qui tente lui aussi de survivre. Ce n’est pas pour autant que ce ne sont pas, chacun à leur manière des héros. Les héros sont bels et bien là, mais n’ont rien du sur-homme : au contraire, ils sont aussi humains que nous. Si dans la trilogie The Dark Knight, Bruce Wayne se transforme progressivement en légende, les actions héroïques proviennent de l’homme du quotidien dans Dunkerque, et relèvent presque du miracle.

Opéra(tion Dynamo)

Hans Zimmer, qui compose à la chaîne les musiques des blockbusters avec plus ou moins d’entrain (et souvent moins que plus …) se réveille de sa torpeur quand il travaille avec Nolan, et la musique de Dunkerque est dans la droite lignée de leur collaboration. On y retrouve les violons planants et les sonorités synthétiques de The Dark Knight, les cuivres d’Inception et un tic-tac entêtant et constant, déjà présent dans un morceau d’Interstellar, pour une bande-son qui renforce le sentiment d’urgence palpable. Il faut dire que le long-métrage ne s’encombre pas de paroles inutiles ; pratiquement muet, il n’en est que plus opératique.

Conclusion

Avec Dunkerque, Christopher Nolan confirme ainsi son statut d’immense réalisateur contemporain, passé maître dans l’art des blockbusters, à l’heure où il s’agit presque exclusivement de films de super-héros – genre paradoxalement redéfinit par Nolan lui-même il y a près de dix ans. Véritable expérience cinématographique, film-opéra esthétiquement impressionnant  devant lequel on retient son souffle, et ce même lorsque le spectacle est fini. Le cinéaste est arrivé à un exploit :  celui d’accoucher de près de deux heures d’action ininterrompues sans pourtant jamais être lassantes.

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