Critique : Top Gun 3D

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Top Gun 3D

Etats-Unis, 1986
Titre original : Top Gun
Réalisateur : Tony Scott
Scénario : Jim Cash et Jack Epps Jr.
Acteurs : Tom Cruise, Kelly McGillis, Val Kilmer, Anthony Edwards
Distribution : Splendor Films
Durée : 1h51
Genre : Action
Date de sortie : 30 septembre 2015 (Reprise)

Note : 2/5

Peu de films définissent autant l’état d’esprit et l’esthétique cinématographique des années 1980 que Top Gun. Sorti en plein milieu d’une décennie perçue depuis un point de vue rétrospectif comme creuse et ringarde, cette propagande nullement voilée pour l’armée américaine cumule les aspects excessifs de l’époque sans jamais les maîtriser. Au contraire, la mise en scène de Tony Scott, en proie ici à ses pires défauts, sape les bases minimales du scénario au profit d’une alternance fâcheusement bancale entre séquences d’affrontements approximatifs dans les airs et ébats romantiques qui ont du plomb dans l’aile au sol. Imputer l’échec artistique et narratif du film au seul style clinquant du réalisateur reviendrait cependant à être trop clément à l’égard des comédiens transparents. Car ce film a beau avoir lancé pour de vrai la carrière de Tom Cruise, celui-ci y fait plutôt étalage des faiblesses de son talent dramatique, en tentant en vain de rendre séduisant son personnage de petit parvenu arrogant.

Synopsis : Le pilote de chasse Maverick est admis avec son coéquipier Goose à l’école de l’élite de l’aéronavale Top Gun. Ses supérieurs l’y ont envoyé à contre-cœur après que les nerfs de Cougar, un pilote plus prudent que lui, ont lâché au cours d’un accrochage spectaculaire avec un avion ennemi. Dès le début des cours, Maverick affiche clairement ses ambitions de finir le premier de sa promotion. Pour y arriver, il devra apprendre à maîtriser son tempérament de casse-cou et de séducteur invétéré. Sa plus grande alliée dans ces deux tâches difficiles est Charlie, une conseillère civile de l’armée, qui enseigne à Top Gun et qui ne résistera pas longtemps aux avances de Maverick.

Overdose des années ‘80

Même chez les personnes bénies d’une forte disposition nostalgique, les années 1980 n’ont généralement pas bonne réputation. Au cinéma, elles sont marquées par une reddition sans conditions à l’esthétique du clip musical ou de la publicité, sans que cette suprématie douteuse de la forme sur le fond ne cherche à insuffler un nouveau sens à ce dernier. Pire encore, dans les cercles élitistes des théoriciens du cinéma, il était sérieusement question à ce moment-là de la mort pure et simple du cinéma. Vu dans un tel contexte, Top Gun paraît plus comme un témoin à charge qu’en tant que principal coupable du déclin du cinéma dans sa totalité. L’aspect visuel y prend indubitablement le dessus sur une intrigue horriblement simpliste et mollement manichéenne. Et ces images élevées au rang d’icônes d’un style de vie typiquement associé aux années ’80 se sont frayées depuis leur chemin dans la conscience collective, grâce au soutien sonore indéniable de la musique synthétique de Harold Faltermeyer et des chansons de Giorgio Moroder. Le problème, c’est que cette esthétique si précisément datée tourne dangereusement à la caricature dans ce film dépourvu d’une raison d’être de substitution. Car au fond, rien ne justifie qu’il soit devenu une œuvre phare du cinéma hollywoodien commercial de l’époque, en dehors de ce style exacerbé, dont les bienfaits distinctifs se retournent d’une façon rédhibitoire contre des qualités plus essentielles.

Image en relief, action à plat

L’enchantement procuré au début par un transfert en 3D de toute beauté se mue en effet rapidement en une horreur sans nom, face aux nombreuses inepties qui ponctuent le récit. En somme, l’intrigue de Top Gun se compose de deux types d’événements, plus ennuyeux les uns que les autres. Aux séquences de simulations d’affrontements aériens répondent ainsi des roucoulements amoureux particulièrement frustrants. Le champ de bataille au dessus de nos têtes n’est certes pas le plus facile à filmer. Des exemples encore plus anciens que ce film-ci et par conséquent tributaires des mêmes restrictions techniques, comme Le Crépuscule des aigles de John Guillermin, ont toutefois réussi à leur conférer une dynamique époustouflante, là où Tony Scott demeure prisonnier d’un propos tendancieux et d’un montage trop nerveux. Tandis que les nombreuses séquences à bord des avions de chasse ne procurent donc pas le moindre frisson, l’activité extraprofessionnelle des personnages paraît tout droit sortie d’un manuel de clichés momifiés. Aucun des héros, ni leurs adversaires caricaturaux, ne ressemblent à des hommes en chair et en os. Ils s’apparentent davantage à des concepts robotiques dont l’interaction et les échanges verbaux restent forcément empreints d’un arrière-goût artificiel très désagréable. Rien d’étonnant alors que les rares sous-entendus homo-érotiques dans cet univers presque exclusivement masculin restent sans suite dans le vocabulaire filmique de Tony Scott, d’une froideur et d’une superficialité suprêmes.

Conclusion

Top Gun est la confirmation haineuse de tous les préjugés que l’on peut avoir envers le cinéma des années ’80. Il englobe d’une manière impressionnante les pires défauts du style de Tony Scott que le réalisateur allait recycler ad nauseam dans pratiquement tous ses films suivants, à l’exception sans doute accidentelle de USS Alabama et de Ennemi d’état. Quant à Tom Cruise, il a curieusement pu maintenir son statut de vedette même trente ans plus tard, en ayant la sagesse de s’appuyer alors plus sur l’action musclée que sur ses talents limités d’acteur ou sur son charme discutable.

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