Critique : Abracadabra

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Abracadabra

Espagne, France : 2017
Titre original : –
Réalisation : Pablo Berger
Scénario : Pablo Berger
Interprètes : Maribel Verdú, Antonio de la Torre, José Mota
Distribution : Condor Distribution
Durée : 1h36
Genre : Comédie dramatique, fantastique
Date de sortie : 4 avril 2018


Note : 3/5

Il y a 5 ans, un film étonnant avait réalisé un véritable carton aux Goya espagnols en engrangeant la bagatelle de 7 prix dont ceux du meilleur film, du meilleur scénario original et de la meilleure actrice. Son titre : Blancanieves. Son réalisateur : Pablo Berger, à qui on ne connaissait jusque là que la réalisation d’un seul long métrage, Torremolinos 1973. Un film étonnant, pourquoi ? Parce que muet, en noir et blanc et mettant en scène une troupe de toreros nains ! Pour son nouveau film, Pablo Berger a choisi le parti pris totalement opposé : une comédie dramatique bavarde et très, très colorée.

Synopsis : Carmen est résignée: son mari Carlos cumule tous les travers du parfait macho madrilène, et il l’assume. Mais tout change le jour où, après une séance d’hypnose qui tourne mal, il se métamorphose en mari idéal, tendre et attentionné… Carmen est conquise, mais très vite, un doute l’assaille: est-elle en droit de profiter de cette parenthèse inattendue, aux côtés d’un mari qui n’est plus vraiment lui-même ?


Vous, qu’auriez vous fait ?

Adressons nous aux femmes ! Supposons que vous êtes en couple avec un homme machiste jusqu’au bout des ongles, qui, lorsqu’il est à la maison,  passe son temps à soutenir son équipe de football préférée depuis son canapé, qui, bien sûr, ne s’occupe ni du ménage, ni de la cuisine, ni du repassage, et, en plus jaloux comme un tigre. Supposons que, suite à un concours de circonstance abracadabrantesque, un homme différent ait pris possession de son corps : physiquement, c’est toujours le même, mais il est devenu prévenant, attentionné, il passe l’aspirateur sans même qu’on ait besoin de le lui demander. Franchement, vous, que faites vous ?

En tout cas, cet événement peu ordinaire, c’est exactement ce qui est arrivé à Carmen et Carlos suite à une séance d’hypnose effectuée par Pepe, un cousin de Carmen, au cours d’un repas de mariage. Un événement qui, si le scénario ne lui donne pas un coup de pouce, n’est finalement pas susceptible de générer à lui seul une histoire intéressante d’un point de vue cinématographique. Le coup de pouce, c’est de faire de Carmen une épouse qui, avec l’aide de Pepe, va s’efforcer de chasser l’intrus du corps de Carlos. A partir de là, tout peut arriver, avec la visite de Carmen et Pepe chez le professeur d’hypnose de ce dernier, la recherche d’un objet intime ayant appartenu à l’intrus, la visite d’un appartement dans lequel un crime a été commis, Carlos qui part sur la flèche d’une grue à la poursuite d’un singe qui lui a volé son sandwich, etc., etc..

 

Plaisant mais pas totalement maîtrisé

Reconnaissons le : avec Abracadabra, Pablo Berger s’est engagé dans un exercice assez périlleux ! Son film, il l’a voulu à la fois comédie déjantée, film fantastique, thriller et même, d’une certaine façon, comédie romantique. Dire qu’il a complètement réussi dans tous les domaines serait mentir. En effet, si les 10 premières minutes sont irrésistibles de drôlerie, le rire n’intervient plus ensuite que par intermittence, laissant le rôle principal à un mélange pas toujours très clair, pas toujours totalement maîtrisé, d’enquête et de fantastique. Si, in fine, le côté frappadingue de la réalisation arrive à rendre le résultat globalement plaisant, avec des clins d’œil appuyés à L’exorciste, à Taxi driver et à La fièvre du samedi soir,  on est quand même assez loin de la jubilation ressentie à la vision de Blancanieves.

Une interprétation à la hauteur

Déjà présente dans Blancanieves, Maribel Verdú incarne de façon savoureuse une Carmen tout d’abord totalement désarçonnée par la métamorphose subie par Carlos, son mari, mais qui va profiter de l’aventure pour se métamorphoser également, en abandonnant petit à petit sa position initiale d’épouse trop souvent soumise. Le rôle de Carlos est interprété par Antonio de la Torre, un comédien que l’on a beaucoup vu ces derniers temps (Les amants passagers, Amours cannibales, La isla minima, La colère d’un homme patient, Que Dios Nos Perdone) et qui passe avec bonheur de l’interprétation d’un mari totalement macho, vindicatif et colérique à celle d’une bonne pâte pleine d’attention pour son épouse. José Mota, l’interprète de Pepe, le cousin de Carmen, nous est beaucoup moins familier. Par contre, le public espagnol le connait bien, plus comme humoriste que comme acteur.
On notera que le titre du film a une double origine : Abracadabra, c’est bien sûr la formule magique bien connue mais c’est aussi le titre d’une chanson du Steve Miller Band, chanson de 1982 qu’on entend dans le film.

 


Conclusion

Il y a des réalisateurs qui donnent l’impression de faire toujours plus ou moins le même film. C’est un reproche qu’on ne pourra pas faire à Pablo Berger ! Face à la difficulté que représente la réalisation d’un film venant prendre la suite chronologique d’une œuvre totalement atypique, le réalisateur espagnol a choisi de se lancer dans le contraire absolu. Dire qu’il a parfaitement réussi cette volte-face serait mentir. Il n’en reste pas moins que Abracadabra n’engendre pas la mélancolie et s’avère plaisant à regarder.

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