Test DVD : Viens je t’emmène

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Viens je t’emmène

France : 2022
Titre original : –
Réalisation : Alain Guiraudie
Scénario : Alain Guiraudie, Laurent Lunetta
Acteurs : Noémie Lvovsky, Jean-Charles Clichet, Iliès Kadri
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h36
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 2 mars 2022
Date de sortie DVD/BR : 5 juillet 2022

Clermont-Ferrand. Médéric tombe amoureux d’Isadora, une prostituée de 50 ans, mais elle est mariée. Alors que le centre-ville est le théâtre d’une attaque terroriste, Sélim, un jeune sans-abri, se réfugie dans l’immeuble de Médéric, provoquant une paranoïa collective. Tout se complique dans la vie de Médéric, tiraillé entre son empathie pour Sélim et son désir de vivre une liaison avec Isadora…

Le film

[3/5]

Alain Guiraudie s’était fait remarquer en 2013 avec L’inconnu du lac (lire notre critique), qui avait réussi à concilier les sentiments d’attirance et de rejet vis-à-vis du désir homosexuel avec habileté, tout en saupoudrant son film d’inspirations Hitchcockiennes. En 2016, Rester vertical (lire notre critique) s’imposait comme la continuité parfaite des fascinations particulières du cinéaste, tout en nous proposant une réflexion intéressante sur l’isolement.

Le dernier film d’Alain Guiraudie, Viens je t’emmène, marque une rupture dans le style et les thématiques du cinéaste : il s’agit en effet d’un marivaudage entre un homme et une prostituée, qui se double d’une curieuse tentative détournée d’état des lieux de la société française, qui s’effondre par moment parce qu’il s’appuie sur l’un de ses personnages les moins intéressants à ce jour, l’infortuné Médéric, joué par Jean-Charles Clichet, dont la bouffonnerie en mode sous-François Damiens tendra par moments franchement à ennuyer le spectateur.

Jouant clairement la carte de la comédie, Viens je t’emmène met donc en scène une poignée de personnages hauts en couleur aux prises avec les réalités les plus inconfortables de la France contemporaine. Utilisant la ville de Clermont-Ferrand comme un microcosme que l’on situerait à cheval entre les idéaux du vieux monde et le nouvel ordre mondial, Guiraudie se lance dans une farce embrassant la possibilité d’une camaraderie pleine d’espoir dans un monde où rien n’est plus certain, et où la paranoïa se mêle de façon souvent saugrenue avec le désir / la sexualité.

Si l’on considère le caractère « ésotérique » de l’homosexualité ayant défini l’œuvre d’Alain Guiraudie depuis ses débuts, Viens je t’emmène marque probablement une nouvelle frontière pour le cinéaste : celui qui a passé la dernière décennie à être acclamé pour son audace fait ici le défi d’un radical changement de style. Cependant, bien que divertissant, son film semble ici moins assuré que ses œuvres précédentes. Pour autant, le portrait au vitriol que le cinéaste dresse de la France contemporaine est souvent très drôle et intéressant, même s’il n’est pas aussi transgressif qu’à l’accoutumée.

On notera par ailleurs que Viens je t’emmène est largement porté par la fantaisie de l’excellente Noémie Lvovsky, qui s’impose comme le véritable catalyseur comique du film, qui a tendance à s’essouffler dès qu’elle n’est pas à l’écran. De manière surprenante, Alain Guiraudie a tendance à se montrer un peu timide – et ouvertement ambigu – dans la façon dont il traite à l’écran le désir sourd entre Médéric et Selim, le sans-papier qu’il héberge, incarné à l’écran par Iliès Kadri. En revanche, si le film joue beaucoup sur les peurs sous-jacentes et l’islamophobie, Viens je t’emmène débouche au final sur un climax chaleureux et plein de camaraderie, tout en évitant l’angélisme – Alain Guiraudie se concentre en effet d’avantage sur notre propension à nous laisser infecter par les fake news et les stéréotypes, surtout lorsque nous sommes distraits par la poursuite obstinée de la satisfaction de nos désirs primaires.

Le DVD

[4/5]

Si L’inconnu du lac avait attiré 118.000 curieux dans les salles en 2013, Rester vertical n’avait déjà plus enregistré que 73.000 entrées en 2016. Six ans plus tard, la dégringolade continue encore pour Alain Guiraudie : Viens je t’emmène n’a réuni que 55.000 français dans les salles – une carrière relativement décevante, à relativiser cependant en raison d’une période post-Covid 19 toujours un peu compliquée. Cela dit, Viens je t’emmène ne verra logiquement le jour que sur support DVD, sous les couleurs de Blaq Out. Comme à son habitude, l’éditeur nous permettra de découvrir la comédie d’Alain Guiraudie dans des conditions absolument satisfaisantes : Blaq Out est rodé au format DVD, et nous propose une nouvelle fois un master sans faille. Définition, piqué et couleurs composent plutôt bien avec les limites d’un encodage en définition standard. Côté son, le film est proposée en Dolby Digital 5.1, dans un mixage dynamique et bien enveloppant, même si, bien sûr, le film en lui-même n’incite pas à la démonstration technique. On notera cela dit que Blaq Out n’oublie pas les cinéphiles qui visionnent leurs films à domicile sans utiliser de Home Cinema, puisque l’éditeur nous propose également un mixage Dolby Digital 2.0 plus cohérent si vous visionnez Viens je t’emmène sur un « simple » téléviseur.

Dans la section bonus, l’éditeur nous propose de découvrir un entretien avec le réalisateur Alain Guiraudie (24 minutes), dans lequel il abordera la genèse de son film, le tournage ainsi que les acteurs. Très intéressant !

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