Test Blu-ray : Yves

0
882

Yves

France : 2019
Titre original : –
Réalisation : Benoît Forgeard
Scénario : Benoît Forgeard, Alain Layrac
Acteurs : William Lebghil, Doria Tillier, Philippe Katerine
Éditeur : Le Pacte
Durée : 1h47
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 26 juin 2019
Date de sortie DVD/BR : 6 novembre 2019

Jérem s’installe dans la maison de sa mémé pour y composer son premier disque. Il y fait la rencontre de So, mystérieuse enquêtrice pour le compte de la start-up Digital Cool. Elle le persuade de prendre à l’essai Yves, un réfrigérateur intelligent, censé lui simplifier la vie…

Le film

[3,5/5]

Benoît Forgeard développe depuis quelques années un univers de cinéma assez unique. Après Réussir sa vie (une réunion de ses courts-métrages) et Gaz de France (lire notre article), l’iconoclaste cinéaste nous a donc proposé Yves, un film au concept pour le moins étrange et décalé, puisque le personnage-titre est en fait… un frigo. Yves est donc un frigo doté d’une intelligence artificielle très sophistiquée – mais d’une âme bien réelle – qui va se lier d’amitié avec son propriétaire (William Lebghil), rappeur ne parvenant pas à percer. Une belle complicité algoryhtmique se crée rapidement entre l’homme et son réfrigérateur, jusqu’à ce que ce dernier ne commence à s’immiscer un peu trop dans sa vie privée et professionnelle…

Le cinéma et l’humour de Benoît Forgeard ne plairont certainement pas à tout le monde : si certains spectateurs éclateront régulièrement de rire devant les imbroglios sentimentaux absurdissimes qu’il nous propose avec Yves, d’autres en revanche, s’ils ne sont pas sensibles à son humour, risquent bien de trouver le temps long. D’autant plus sans doute qu’à partir d’un sujet aussi non-sensique (un frigo finissant par devenir une star du rap), n’importe quel réalisateur aurait opté pour le format du court-métrage plutôt que de faire durer l’intrigue sur presque deux heures. Mais cette propension à tirer sur la corde et à faire durer, à étirer en longueur ses gags et ses idées est aussi une des caractéristiques de Forgeard, qui nous proposera souvent la répétition des mêmes gags au cours du film : les chansons sont par exemple toutes répétées deux à trois fois, et en perdent logiquement en fraîcheur. De la même façon, certaines idées, pourtant excellentes, voient leur impact sur nos zygomatiques un peu amoindri à force de durer, à l’image de la séquence à l’Eurovision par exemple, étirée au-delà de toute limite raisonnable.

Qu’à cela ne tienne cependant : l’originalité et la drôlerie de l’ensemble font d’Yves une œuvre vraiment unique, que l’on a envie d’aimer et d’encourager malgré ses défauts. Sous réserve bien sûr d’être réceptif à l’humour post-moderne de Benoît Forgeard, ce qui, visiblement, n’était pas le cas de notre chroniqueur Lucas Créac’h qui l’a découvert lors de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes :

« Prenez le Her de Spike Jonze. Ajoutez-y une touche de 2001, l’Odysée de l’espace ainsi qu’un zeste d’épisode de la série britannique Black Mirror. Puis, mélangez le tout avec une forte dose d’humour et vos obtiendrez Yves. La recette fait rêver. Pourtant le résultat manque de quelque chose. En fait, ce qui ne va pas, c’est l’humour. (…)

On pouvait s’attendre, avec Yves, à une comédie rafraîchissante qui allait casser les codes. Le pitch et le casting promettaient de belles choses. Seulement voilà : les blagues sont souvent très prévisibles et lourdes et ne prennent pas. Les acteurs, bons dans l’ensemble, ne rayonnent pas et le talent de Philippe Katerine se voit restreint dans un rôle qui se révèle finalement très minime. Le sous-propos de l’œuvre visant à montrer les dangers et les possibles excès de l’intelligence artificielle n’est pas impactant car il découle d’un humour grotesque et absurde alors que celui-ci aurait dû être satirique pour toucher son public. De fait, malgré un sujet insolite, Yves se révèle être une comédie qui s’appuie trop sur les codes du genre. Quelques séquences viennent cependant contredire notre propos à l’image d’un loufoque Eurovision dont on ne divulguera pas le contenu ou d’une scène de procès très réjouissante. »

Le Blu-ray

[4,5/5]

Malgré un score plutôt faiblard au box-office (60.000 entrées), Yves débarque aujourd’hui dans une superbe édition Blu-ray sous les couleurs du Pacte : on se félicite que certains éditeurs croient encore suffisamment dans les qualités formelles de leurs films pour leur offrir de belles éditions en réfléchissant au-delà d’un flop dans les salles obscures. Bravo Le Pacte donc !

C’est d’autant plus remarquable que techniquement parlant, le Blu-ray édité par Le Pacte a tout de la merveille, rendant clairement hommage au travail sur le cadre et la photo développés par Forgeard et son directeur photo Thomas Favel. L’image encodée en 1080p est à la hauteur de nos attentes et autres exigences, et on découvrira toutes les trouvailles visuelles d’Yves avec une précision absolue : les couleurs sont superbes, la définition sans faille, le piqué est redoutable… En deux mots, c’est absolument magnifique. Côté audio, l’éditeur nous propose donc de (re)découvrir le film en DTS-HD Master Audio 5.1. L’ampleur du mixage sonore est remarquable, avec une mention particulière pour les séquences musicales. On notera également que Le Pacte n’oublie pas les cinéphiles qui visionnent leurs films à domicile sans utiliser de Home Cinema, puisque l’éditeur nous propose également un mixage DTS-HD Master Audio 2.0 plus cohérent si vous visionnez Yves sur un « simple » téléviseur.

Côté suppléments, Le Pacte nous propose tout d’abord de nous plonger dans un entretien avec l’équipe du film (34 minutes), qui mélangera les interventions de Benoît Forgeard, William Lebghil, Philippe Katerine et Antoine Gouy d’un côté, mais également de Doria Tillier, Alka Balbir et Bertrand Burgalat de l’autre. Plusieurs sujets seront abordés dans la bonne humeur, du discours du film concernant l’intelligence artificielle aux possibilités des acteurs d’improviser (ou pas) sur un scénario et des dialogues extrêmement précis, en passant par le fait de donner la réplique à un frigo. On continuera ensuite un intéressant making of (« pourquoi un making of ? Plus personne regarde les making of ») assez amusant malgré les redondances qu’il peut entretenir avec les interviews de l’équipe (notamment sur les improvisations). Plusieurs étapes de la fabrication du film y sont abordées de façon didactique et vivante, notamment la conception et l’enregistrement des chansons. Et puisqu’on parle des chansons, on terminera par le clip de « C.R.A.B » (pour Carrément rien à branler) interprété par William Lebghil et Philippe Katerine, ainsi qu’avec la traditionnelle bande-annonce.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici