Test Blu-ray : Wild Bill

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1862

Wild Bill

 
États-Unis : 1995
Titre original : –
Réalisation : Walter Hill
Scénario : Walter Hill
Acteurs : Jeff Bridges, Ellen Barkin, John Hurt
Éditeur : Sidonis Calysta
Durée : 1h38
Genre : Western
Date de sortie DVD/BR : 28 mars 2019

 

Calamity Jane et Charley Prince assistent à l’enterrement de Wild Bill. 1867 : Wild Bill tue quatre hommes dans un salon. 1870 : Il est shérif de Hays City. Il se bat avec des soldats et ouvre le feu sur eux. 1871 : A Abilène, il tue un provocateur et un des adjoints pris pour un ennemi. Il se produit dans Show de Buffalo Bill. 1875 : Il est à Kansas City. 1876 : A Cheyenne, il abat Will Plummer. 1876. Deadwood Gulch. Un jeune homme, Jack McCall, veut le provoquer. Il est engagé par Lonigan pour tuer Wild Bill…

 


 

Le film

[4/5]

Parmi la profusion de cinéastes américains ayant fait leurs armes ou officiant déjà derrière la caméra durant les années 70, seulement une poignée a réussi à aborder le grand tournant des années 80 (l’après-Star Wars) sans y laisser des plumes ou carrément leur âme. Quelques maestros ont certes su confirmer tout le bien que l’on pouvait penser d’eux, mais dans de nombreux cas (De Palma, Coppola…), le meilleur n’était déjà plus « à venir » mais se situait avant la décennie 80. Certains cinéastes cependant sont parvenus à évoluer, à avancer avec leur temps, et même à bonifier leur cinéma, nous livrant avec une étonnante régularité une série de chefs d’œuvres étalés sur les deux décennies. On pense à Steven Spielberg, qui a toujours bénéficié de l’œil bienveillant de la critique et du public depuis ses débuts, à John Carpenter, dont le cinéma a été réhabilité assez tardivement par le Saint des Saints de la critique française Les Cahiers du Cinéma, et enfin à Walter Hill, toujours largement méprisé de l’intelligentsia cinéphile, mais dont le « gros œuvre » contient une série de films absolument formidables, qui obtiendront probablement un jour fort logiquement leur place au panthéon du septième Art comme autant de perles intemporelles. Le bagarreur (1975), Les guerriers de la nuit (1979), Sans retour (1981), Les rues de feu (1984) et enfin Extreme prejudice (1987) – Cela fait déjà cinq chefs d’œuvres sur une période de douze ans. Plutôt pas mal pour cet élève et admirateur de Sam Peckinpah, surtout quand on considère en comparaison que le cinéma de « Savage » Sam s’est quant à lui effondré au tournant de la décennie 80.

Et s’il a moins tourné durant la décennie suivante, les années 90 ont également permis à Walter Hill de tourner son lot de petits chefs d’œuvres du cinéma d’action burné, avec notamment le trop méconnu Les pilleurs (1992) et l’époustouflant Dernier recours (1996). Et entre ces deux monuments, le cinéaste a mis en boite deux excellents westerns, très différents l’un de l’autre : le très réussi Geronimo (1993), dont nous avions évoqué les qualités quand il est sorti, il y a deux ans, dans la collection « Western de légende » de Sidonis Calysta (lire notre article) et l’excellent Wild Bill, tourné en 1995 et n’ayant pas, à notre connaissance, bénéficié à l’époque d’une sortie dans les salles françaises.

Et pourtant, Wild Bill aurait amplement mérité une sortie en salles. Cette évocation des dernières années de la vie de « Wild Bill » Hickok débarquait donc deux ans après Impitoyable, le chef d’œuvre de Clint Eastwood, qui s’imposait comme le « chant du cygne » du western classique et avait raflé une belle poignée d’Oscars mérités lors de la cérémonie de 1993. Après le film d’Eastwood, on a pu constater une espèce de « flottement » dans le western américain, comme si les artisans du genre se disaient qu’il était impossible de passer derrière une telle perfection, un tel état de grâce. Durant les années qui ont suivi, les quelques cinéastes ayant osé se lancer dans l’aventure du western ont donc opté pour une remise en question des codes classiques du genre, avec notamment tout un tas d’expérimentations formelles destinées, peut-être, à éviter la comparaison avec le film d’Eastwood.

A sa façon, Wild Bill fait partie de ces films. Walter Hill y abandonne en effet toute espèce de classicisme formel : il repousse d’un revers de la main l’apport « majestueux » d’un tournage en Scope, se concentrant sur un format 1.85 plus frontal et direct. Certaines séquences sont tournées en noir et blanc (et étant donné leur granulation particulière, peut-être même en vidéo), les décadrages sont fréquents, les décors et des personnages fleurant bon la crasse, la boue et le glaviot, bref, tout semble avoir été fait pour prendre des distances franches et tranchantes avec les grands classiques du western. Et si par là même Walter Hill choisit de mettre entre parenthèses son attachement à la démesure visuelle propre au cinéma de son maître Sam Peckinpah, il écarte de la même façon l’espèce de misogynie latente souvent développée par Peckinpah sur ses westerns des années 70. Ainsi, c’est avec une certaine surprise qu’on constatera qu’à mi-parcours, le film délaisse finalement le personnage de Wild Bill pour se concentrer sur celui de Calamity Jane, excellent portrait de femme porté par la prestation ébouriffante d’Ellen Barkin, qui entre ce rôle et celui qu’elle tenait dans le film de Blake Edwards Dans la peau d’une blonde (1991), prouvait qu’elle n’était jamais plus à l’aise qu’en incarnant des personnages « masculins ». Enfin, même d’un point de vue strictement narratif, Wild Bill s’impose comme un récit totalement déconstruit, refusant d’aborder son histoire de façon chronologique, et concentrant dans sa première bobine un enchainement de scènes d’action – les moments de « gloire » de la vie de Hickok – comme pour mieux s’en débarrasser en affichant tout le spectacle d’entrée de jeu.

Au final, s’il fallait chercher des passerelles et autres influences entre Wild Bill et d’autres westerns, on les trouverait finalement sans doute beaucoup plus du côté du western spaghetti que des grands classiques américains du genre. On comprend de fait beaucoup mieux le peu d’enthousiasme que met Patrick Brion dans la présentation du film qu’il signe pour cette édition Blu-ray, mais les amoureux de westerns inhabituels, excessifs voire même franchement bizarres, se régaleront à coup sûr de ce portrait de cowboy unique, à l’ambiance volontiers borderline.

Pour l’anecdote, quelques années après Wild Bill, Walter Hill reviendrait à la ville de Deadwood en réalisant le premier épisode de la série éponyme diffusée sur HBO. On peut dès lors supposer à coup sûr que le créateur de la série David Milch était fan du film…

 

 

Le Blu-ray

[4,5/5]

Disponible chez Sidonis Calysta au sein d’une nouvelle vague de sorties venant enrichir sa collection « Western de légende » (qui compte déjà plusieurs centaines de titres, et s’impose sans peine comme la plus imposante collection de DVD / Blu-ray jamais créée en France), Wild Bill s’offre donc un lifting HD sur galette Blu-ray qui ravira les nombreux amateurs du cinéma de Walter Hill.

Aussi bien côté image que côté son, le master proposé par l’éditeur est d’excellente tenue, et comparable en tous points au Blu-ray sorti en 2017 aux Etats-Unis, sous les couleurs de Twilight Time ; le film est naturellement proposé au format 1.85 respecté et encodé en 1080p. Le piqué est d’une belle précision, le grain cinéma est parfaitement préservé, et couleurs et contrastes semblent avoir été tout particulièrement soignés. L’ensemble est donc plus que recommandable ! Rien à redire non plus sur le mixage audio, proposé en VF et en VO en DTS-HD Master Audio 5.1, dans des mixages bien enveloppants et relativement dynamiques. On notera que si vous regardez le film sur un téléviseur, l’éditeur propose également la VF et la VO mixées en DTS-HD Master Audio 2.0 : les mixages s’avèrent clairs et sans souffle, et donc tout à fait satisfaisants !

Côté suppléments, Sidonis Calysta nous propose, outre les traditionnelles bandes-annonces de la collection en avant-programme, deux présentations du film, assurées par les vétérans Bertrand Tavernier et Patrick Brion. Comme à son habitude, Tavernier monopolise l’attention pendant environ trente minutes : il se montre donc comme toujours plus bavard, plus passionnant et surtout beaucoup plus pertinent que son confrère, Patrick Brion donnant quant à lui le plus souvent l’impression de ne même plus (re)voir les films dont il parle et de « torcher » ses sujets en impro, sans rien préparer en amont. Dans le cas présent, en l’espace de sept petites minutes, il évoque rapidement la carrière de Walter Hill en qualifiant ses films de « pas mal », propose une digression enthousiaste d’environ deux minutes sur le Mort ou vif de Sam Raimi, et conclut en survolant le casting de Wild Bill. C’est certes un peu du foutage de gueule, mais sa personnalité de nounours sympathique attirera forcément – et comme toujours – une certaine indulgence teintée d’attachement.

 

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