Test Blu-ray : Le Vampire et le sang des vierges

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Le Vampire et le sang des vierges

Allemagne de l’Ouest : 1967
Titre original : Die Schlangengrube und das Pendel
Réalisation : Harald Reinl
Scénario : Manfred R. Köhler
Acteurs : Lex Barker, Karin Dor, Christopher Lee
Éditeur : Artus Films
Durée : 1h24
Genre : Horreur
Date de sortie cinéma : 5 mars 1969
Date de sortie DVD/BR : 4 janvier 2022

En 1801, pour avoir assassiné douze jeunes femmes, la treizième, Béatrice de Brabant s’étant échappée, le comte Regula est condamné à être écartelé en place publique. Avant son supplice, il promet de revenir se venger. 35 ans plus tard, l’avocat Roger de Mont-Elise reçoit une invitation au château d’Andomai, demeure de la famille Regula. En chemin, il sauve une jeune femme d’une attaque de bandits : Lilian de Brabant, elle aussi invitée au château…

Le film

[4,5/5]

Si son nom est beaucoup moins connu et réputé que ceux des maestros du cinéma populaire italien, l’allemand Harald Reinl a consacré de nombreuses années à la gloire du cinéma « bis » européen. En un peu plus de trente ans de carrière, Reinl a en effet tourné une soixantaine de films, mais s’avère surtout connu pour ses films adaptés des romans d’Edgar Wallace et de Karl May, dont la série des Winnetou. Il a également réalisé deux films tournant autour du personnage du Docteur Mabuse. Horreur, policier, comédie, western, aventures, espionnage, guerre… A bien y regarder, son œuvre tout entière semble tournée en direction du divertissement populaire. Malheureusement, la quasi-totalité des films qu’il a réalisés durant les décennies 60 et 70 semblent aujourd’hui quasiment invisibles en France, et on le regrette amèrement.

Le Vampire et le sang des vierges est donc un pur film d’épouvante gothique réalisé par Harald Reinl, ayant la particularité d’avoir été produit et tourné en Allemagne, et ce même s’il s’inscrit dans la tradition des grands films de la Hammer ou du cycle d’adaptations d’Edgar Allan Poe réalisées par Roger Corman entre 1960 et 1964. La filiation est d’autant plus manifeste que le film de Reinl est également une adaptation (très libre) de la nouvelle d’Edgar Allan Poe « Le Puits et le pendule ». Et si vous aviez encore un doute, la présence au générique de Christopher Lee devrait terminer de rendre cette curiosité filmique absolument incontournable pour les amateurs du cinéma d’horreur des années 60…

Sorti sur les écrans français en 1969, Le Vampire et le sang des vierges a largement été distribué en Europe à la fin des années 60, ainsi qu’aux États-Unis, sous la bannière de Hemisphere Pictures – boite spécialisée dans les films d’horreur philippins réalisés par Eddie Romero dans les années 60/70. Appelé Die Schlangengrube und das Pendel (littéralement « La fosse aux serpents et le pendule ») dans la langue de Goethe, le film d’Harald Reinl a par conséquent connu de nombreuses vies à travers le monde, sous de nombreux titres, très différents les uns des autres. Ces derniers étaient parfois assez savoureux, mais on saluera l’effort des distributeurs français de l’époque, grands spécialistes de l’approximation poétique.

Car bien sûr, il n’y a pas à proprement parler de « vampire » dans Le Vampire et le sang des vierges – pas plus que dans Hercule contre les Vampires par exemple – mais la présence de Christopher Lee au casting suffisait à apporter la caution vampirique nécessaire afin d’attirer le public dans les salles. A la découverte du film, on ne peut s’empêcher de penser qu’étant donné ses qualités, le film aurait très bien pu se passer de ce fallacieux argument marketing et se serait largement suffi à lui-même.

Car contre toute attente, Le Vampire et le sang des vierges s’avère bel et bien un pur concentré de plaisir cinéphile – un bonbon plein de surprises destiné aux amateurs de cinéma gothique, qui séquence après séquence ne cesse de se renouveler, apportant au spectateur son lot de frissons, d’étrangeté et de poésie macabre, le tout étant même teinté d’un curieux exotisme assez unique en son genre.

Passée sa courte introduction destinée à introduire le personnage incarné par Christopher Lee (qui ne réapparaîtra par la suite que durant le dernier tiers du métrage), Le Vampire et le sang des vierges est par la suite clairement coupé en deux parties à peu près égales : la première suivra le trio de personnages principaux dans sa quête du château d’Andomai, et la deuxième les verra aux prises avec un revenant visiblement très porté sur le sang de vierge terrorisée. Chacune des deux parties du film compte son lot d’idées folles et de scènes formidables, baignées au cœur d’un gloubi-boulga narratif n’ayant finalement que d’incidence sur le ressenti du spectateur, qui suivra ce grand et beau spectacle avec un grand sourire de plaisir non feint.

Désordonné, surréaliste, amusant, maladroit, parfois grotesque mais toujours plein de charme, Le Vampire et le sang des vierges s’impose en effet comme un film d’une sincérité, d’une générosité et d’un respect pour le genre qui font franchement plaisir à voir. Habile, Harald Reinl mélange les tonalités, passant abruptement de l’humour à l’horreur, mettant parfois le spectateur à distance par l’utilisation de la musique. Pour autant, il parvient assez admirablement à conserver une sorte d’homogénéité baroque à son film, en partie peut-être grâce au soin apporté aux décors. En effet, qu’il s’agisse de la forêt ou du château du Comte Regula, on ne pourra que s’ébahir devant le sens du détail développé par le film, avec ses statues grotesques, ses crânes en pagaille et bien sûr ses peintures murales inspirées des œuvres du peinte flamand Jérôme Bosch.

Le coffret Blu-ray + DVD + Livret

[5/5]

Les amoureux du grand cinéma gothique des années 60 ne pourront que se réjouir de l’arrivée en Blu-ray de ce sublime morceau de péloche-plaisir qu’est Le Vampire et le sang des vierges, disponible dès aujourd’hui sous les couleurs de Artus Films. Cette sortie s’impose d’autant plus comme un événement qu’elle est ici présentée sous la forme d’un superbe Mediabook Blu-ray + DVD + Livret de 80 pages. Cette belle édition prouve une nouvelle fois que l’éditeur français est bel et bien un des acteurs majeurs de l’édition vidéo en France. De plus, il s’agit là d’un signe manifeste qu’Artus est plus que jamais déterminé à fournir au consommateur des éditions « Collector » qui soient non seulement irréprochables d’un point de vue technique, mais qui s’imposent également comme de « beaux objets » de collection.

Côté master, on n’avait jamais vu Le Vampire et le sang des vierges dans de telles conditions : le rendu Haute-Définition est remarquable. Le film retrouve ainsi ses couleurs, sa précision, et affiche une stabilité de tous les instants. Les contrastes et le niveau de détails sont sensiblement renforcés, le grain cinéma est respecté, même si la définition vacille parfois un peu sur les séquences sombres ou durant les plans à effets (fondus…). En deux mots comme en cent, c’est un vrai plaisir de (re)découvrir le petit chef d’œuvre d’Harald Reinl dans un écrin aussi épatant. En ce qui concerne le son, nous avons évidemment le choix entre la VO allemande, la version anglaise ainsi que et la version française, toutes trois proposées en LPCM Audio 2.0 : le doublage français est suranné mais plein de charme. La version originale propose en revanche une restitution des ambiances, de la musique et les dialogues beaucoup plus fine. Les sous-titres ne posent pas de problème particulier.

Dans la section suppléments, on s’attardera tout d’abord sur la traditionnelle présentation du film par Stéphane Derderian et Christian Lucas (40 minutes). Les duettistes y reviendront, de façon particulièrement complémentaire, sur le contexte de production du film, disséquant ses influences et revenant sur son héritage. On continuera ensuite avec deux versions « Super 8 » du film (deux fois 16 minutes), ainsi qu’avec un sujet sur les lieux de tournage du film par le YouTubeur Markus Wolf (8 minutes). On trouvera également la bande-annonce originale du film, ainsi qu’une galerie de photos. Enfin, on terminera le tour des suppléments avec le passionnant livret de 80 pages intégré au boîtier, signé Christophe Bier. Richement illustré, ce passionnant ouvrage reviendra sur l’intégralité de la carrière d’Harald Reinl.

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