Rencontre avec Francis Ford Coppola

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Rencontre avec Francis Ford Coppola

Festival du cinéma américain de Deauville 2011 : 12H45: Avec un peu de retard, Francis Ford Coppola entre dans cette petite salle de conférence devant laquelle de nombreuses personnes se sont pressées au moins 1h avant pour espérer apercevoir le Patron. Très peu d’élus donc, on pu voir arriver ce grand monsieur boitant, simplement vêtu d’une chemisette bleue et d’un pantalon en lin blanc version touriste allemand sur les plages françaises…le ton est donné : Francis est plus qu’abordable et prêt à parler de tout, tranquillement, encore plus si on lui apporte une bouteille de Calva selon lui…

Pendant un peu plus d’une heure et demi, les questions vont se succéder, le public est un mélange de journalistes et de festivaliers venus passer le weekend à Deauville. Outre les déclarations de fans enflammés, de très bonnes questions sont posées, donnant à Coppola l’occasion de s’exprimer sur sa vie privée, ses débuts, ses anecdotes de tournage, ses projets d’avenir et même sur les attentats du 11 septembre. Voici donc un condensé de cette « conversation avec Francis Ford Coppola ».

Rencontre avec Francis Ford Coppola

Des nouvelles de son prochain film : Twixt

Sur son nouveau film, Twixt (qui signifie « entre deux » en vieil anglais), le réalisateur nous a expliqué comment l’idée lui est venue. Lors d’un festival il y a quelques années, il avait été étonné d’entendre tout le monde parler de la 3D, alors présentée comme une révolution qui pousserait les gens à revenir dans les salles obscures. Seulement, lui n’a jamais été d’accord avec ça, pensant que la solution venait d’ailleurs. Néanmoins il reconnaît que la 3D offre de nouvelles opportunités au cinéma qu’il faut savoir exploiter. Cette technique sert à rendre le cinéma plus vrai, pour être au cœur du film. Et selon Coppola, c’est ça le secret du cinéma. Un film doit sembler vrai. Comme une pièce de théâtre ou un opéra, la représentation devrait être différente chaque soir et son réalisateur devrait servir de chef d’orchestre. C’est comme ça qu’il a décidé de réaliser son Twixt, un film qu’il présente comme « une romance gothique unique et inhabituelle ». Le film n’est pas facile à catégoriser, et malgré son budget qui a beaucoup bougé depuis le début, il le présente comme un film personnel auquel il tient beaucoup.

Là-dessus, il en profite pour dire à quel point il est fier de sa fille Sofia, qui a décidé de ne pas suivre la voie facile du cinéma commercial, mais qui continue à faire des films sur pellicule (et non en digital) auxquels elle est attachée et auxquels elle croit. Coppola fustige au passage tout le cinéma moderne (et commercial donc) qu’il décrit comme une grosse machine à faire de l’argent et qui ne nous donne au final que toujours le même film en boucle. D’ailleurs pour lui, les jeunes réalisateurs prometteurs qui ont su rester indépendants sont Woody Allen, Wes Anderson, Steven Sodenbergh… c’est pour dire ! Mais ça, il ne nous l’explique pas très longtemps puisqu’il pense qu’en France, nous sommes un vrai public de cinéphiles avertis qui aimons sincèrement aller au cinéma. Et pour ça, il nous remercie sachez-le, et il est fier que sa fille habite désormais chez nous, si loin de ses vignes californiennes…

Les difficultés du cinéma indépendant

Pourtant, il reconnaît que c’est difficile de forcer les gens à croire en vos projets cinématographiques, même quand on s’appelle Coppola. Il rappelle alors que malgré le succès des Parrain 1 et 2 tournés dans la foulée, personne n’a voulu croire et financer Apocalypse Now, sujet bien trop sensible à l’époque et premier film de guerre sur le Vietnam. Il aura alors fallu qu’il donne tout ce qu’il avait économisé et bien plus pour mener à bien ce projet fou qui manquerait aujourd’hui au cinéma s’il n’avait pas existé.

Rencontre avec Francis Ford Coppola

Difficile de montrer l’horreur de la guerre

Sur la guerre justement, Coppola s’est attardé, assumant le fait qu’il est difficile de faire un film contre la guerre. En effet, tourner des scènes de batailles avec des explosions et du sang rend la guerre excitante, et on aime regarder cela. Pour lui donc, dès qu’on filme la guerre, on fait un peu l’apologie de la violence, même lorsque l’on cherche à dire le contraire. Il enchainera sur l’idée qu’un vrai film sur la réalité de la guerre devrait se tourner au fin fond de l’Irak par exemple, sur le quotidien des hommes et des femmes là-bas tentant de survivre, sans aucune scène sanglante.

Le moyen-Orient, Coppola en reparlera sur le sujet du 11 septembre dont nous allons « célébrer » les 10 ans. Sans langue de bois, il dit que ces attentats n’ont fait que révéler les problèmes qui existent aux États-Unis depuis longtemps et que l’on ne voulait pas voir. Tout en regrettant ce qu’il s’est passé bien sûr, il est content que certains occidentaux se soient rendu compte de leur responsabilité, et il espère que ceux-ci arrêteront de soutenir des dictateurs pour un enjeu comme le pétrole. Il reconnaît aussi que ces attentats ont un peu fait prendre conscience aux américains de la chance qu’ils avaient de vivre là, dans ces conditions, contrairement à beaucoup de pays sous-développés qui se doivent d’utiliser la violence pour se faire entendre…

Fier d’avoir participé à la saga Star Wars

Sur un ton beaucoup plus léger, il a rappelé à quel point il était timide et modeste, amoureux de la littérature avec un grand L, ainsi que de la science fiction. Même s’il s’étonne de n’avoir encore jamais fait de film de SF, il n’est pas peu fier d’avoir aidé un certain George Lucas à faire un film étrange qui se passe dans l’espace…Sachez-le, le Star Wars préféré de Coppola, c’est L’Empire contre-attaque !

Oui, Francis c’est un peu l’homme qui a découvert tout le monde et fait tourné les plus grands, parlant d’acteurs et de réalisateurs immensément célèbres comme des gens de sa famille, de Spielberg à Brando en passant par « Bobby de Niro » ou Al Pacino. Et c’est là qu’on se souvient à quel point cet homme est grand. Ses anecdotes sur les tournages avec Marlon Brando l’ont inévitablement amené à parler du Parrain, nous donnant de quoi nous mettre sous la dent.

Rencontre avec Francis Ford Coppola

Aujourd’hui culte, la trilogie du Parrain est pourtant loin d’être celle que Coppola préfère. Pour lui, il ne devait y avoir qu’un seul et unique film. Seulement déjà à l’époque, les studios sont tombés dans le piège commercial et ont exigé un 2ème opus. Coppola s’est senti obligé de le faire, mais était déçu de ne pouvoir réutiliser Brando. Il a alors eu l’idée de cette scène à la fin du second film, dans laquelle toute la famille Corleone doit se retrouver. Oui mais voilà, il fallait réunir tout le monde pour la tourner. Et Brando, vexé de ne pas avoir touché d’argent sur les recettes du premier film, n’a pas voulu se faire avoir une deuxième fois. Il plantera donc Coppola à la dernière minute, bien que ce dernier ait déjà payé tous les acteurs pour revenir, et le forçant à réécrire la scène dans l’urgence. Scène qui sera donc celle qui est restée à la fin du film.

C’est sur ce genre de petites anecdotes que s’achèvera la conversation, un agréable moment passé en compagnie d’un maître du cinéma, simple et talentueux. A la sortie de la salle, tout le monde était plutôt d’accord sur ce qu’il y avait à dire, un simple « Merci Mr Coppola, et surtout, n’arrêtez pas ! »

 Tout savoir sur le Festival de Deauville 2011

 

 

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