Critique : Five

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Five

France, 2016
Titre original : –
Réalisateur : Igor Gotesman
Scénario : Igor Gotesman
Acteurs : Pierre Niney, François Civil, Igor Gotesman, Margot Bancilhon
Distribution : Studiocanal
Durée : 1h42
Genre : Comédie
Date de sortie : 30 mars 2016

Note : 3/5

La bande des potes inséparables et prêts à commettre les pires conneries ensemble est l’un des dispositifs scénaristiques préférés de la comédie française. On ne compte ainsi plus les films où les amis traversent des expériences extrêmes pour mieux se prouver à quel point ils tiennent les uns aux autres. Pas facile donc d’innover en la matière, même si la vocation principale de ces films-là est de divertir, sans plomber l’atmosphère aussi festive que bordélique par d’éventuelles ambitions d’originalité. Sous cette réserve, le premier film de Igor Gotesman est une franche réussite ! Malgré son intrigue aux pieds d’argile et son apologie du crime à peine voilée, Five est une comédie exubérante, voire jubilatoire. Le mérite en revient aux interprétations joyeusement caricaturales, Pierre Niney en tête, ainsi qu’à une narration qui cherche certes plusieurs fois à manipuler le spectateur, mais le fait à une vitesse incroyable et avec une telle aisance que la supercherie ne laisse guère un arrière-goût amer. Bref, il s’agit d’un film qui sait parfaitement user de son charme, ce qui nous amène à lui pardonner sans rancune une certaine vacuité de son fond moral.

Synopsis : Julia vit paisiblement dans un paradis exotique. Son exil n’a pourtant pas été choisi. Elle a dû quitter la France suite à une histoire d’amis qui a mal tourné. Ses amis avec lesquels elle partage tout, ou presque, depuis l’enfance, ce sont le défoncé Timothée, le névrosé Vadim, le libidineux Nestor et le généreux Samuel. Ce dernier avait permis à la bande de mettre enfin en pratique le rêve de la colocation. Il comptait payer le loyer de leur appartement spacieux en plein Paris avec l’argent de son père, qui le soutenait financièrement tant qu’il pensait que son fils faisait des études de médecine. Quand les aspirations de comédien de Samuel éclatent au grand jour, il se retrouve soudainement sans le sou. Pour ne pas décevoir ses amis, qui ont tout juste emménagé, il décide d’exploiter des sources de revenu moins légales.

La relève des bobos

Qu’est-ce qui fait rêver la jeunesse d’aujourd’hui, sinon une piaule luxueuse à côté du Panthéon truffée de tous les derniers gadgets électroniques, rouler dans des bolides qui font accourir les filles et plus généralement suivre son idéal de liberté absolue, peu importe le prix à payer ? Un drôle d’hédonisme, soumis au joug de la bienséance bourgeoise et des pratiques de consommation courantes, est érigé en valeur suprême dans ce film, qui n’est en fait rien d’autre qu’un conte léger sur la perte de l’innocence. Car il s’avère tôt ou tard qu’aucun des membres du groupe n’est aussi dégourdi qu’il en a l’air. Logiquement, leur apprentissage de la vie devrait se faire à leur dépens, si ce n’était pour le ton malicieux avec lequel la mise en scène les fait basculer d’une situation embarrassante à l’autre. Une fois le récit cadre un peu bancal et moralement douteux dépassé, nous assistons à des gags en cascade, des malentendus savoureux et des coups libérateurs arrivant bien sûr toujours au dernier moment, qui ne font plus jamais retomber notre bonne humeur et notre joie maligne. Samuel et ses compagnons d’infortune s’en sortent certes in extremis, mais leurs épreuves farfelues sont orchestrées selon un rythme si soutenu, que les petites imperfections du scénario disparaissent discrètement dans le maelstrom du chaos qui se déchaîne autour d’eux.

Tope là

Aussi peu clair le propos du film paraît-il en fin de compte, avec cette amitié si prisée en théorie qui montre surtout ses failles sous la pression du dérèglement généralisé, la surenchère des effets comiques balaie toute tentative de résistance raisonnée et raisonnable. La moquerie bon enfant des maladresses répétées des personnages ne laisse qu’une marge de manœuvre très réduite à une approche plus sereine de cette farce qui ne prend rien, ni personne au sérieux. Pendant que Pierre Niney et François Civil sont les premiers à tirer leur épingle du jeu en tant qu’amis les plus survoltés et inconscients, de seconds rôles hauts en couleur interprétés notamment par Fanny Ardant, Michèle Moretti et Pascal Demolon épicent encore davantage le récit. L’issue de secours à cette folie ambiante doit alors forcément paraître comme un pis-aller, tant l’urgence à gérer en permanence avec un talent de plus en plus aigu pour la débrouillardise aurait mérité mieux qu’un refuge sous les tropiques.

Conclusion

Parfois, aller au cinéma doit aussi être le prétexte pour simplement se divertir sans arrière-pensée et rire de bon cœur. Pari réussi pour ce premier film endiablé qui vit beaucoup du charme indéniable de son acteur principal, mais qui sait en même temps tirer profit des aléas d’adaptation à la vraie vie d’une bande de gamins gâtés, qui ont osé rêver de grandes choses avant de s’empêtrer dans un traquenard machiavélique. Espérons que ce premier long de Igor Gotesman, inspiré d’un court-métrage réalisé cinq ans plus tôt, lui ouvrira les portes du cinéma comique français, qui a grandement besoin de talents aussi efficaces et irrévérencieux que le sien.

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