Critique : Une journée à Rome

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Une journée aUne Journée à Rome

Italie : 2012
Titre original : Un Giorno Speciale
Réalisateur : Francesca Comencini
Scénario : Giulia Calenda, Francesca Comencini
Acteurs : Filippo Scicchitano, Giulia Valentini
Distribution : Bellissima Films
Durée : 1 h 30
Genre : Drame
Date de sortie : 17 juillet 2013

Globale : [rating:4][five-star-rating]

Il n’y a pas de réponse toute faite à la question traditionnelle : dans le monde de l’art, est-ce un avantage ou un inconvénient d’être le fils ou la fille d’une personnalité artistique célèbre et reconnue ? Prenez le cas des 4 filles de Luigi Comencini qui, toutes, travaillent dans le monde du cinéma : sans doute, porter le nom de leur père a-t-il pu les aider à mettre un orteil dans le sérail. Mais ensuite ? S’agissant de Francesca, la 2ème fille de Luigi, une certitude : eut-elle porté n’importe quel nom, le talent qu’elle a démontré dans des films comme Carlo Giuliani, Ragazzo et J’aime travailler aurait suffi pour lui ouvrir une carrière pérenne dans le cinéma italien.

SynopsisUne nouvelle journée commence à Rome, la ville éternelle. Gina et Marco ont 19 et 20 ans et sont portés par l’exubérance de la jeunesse. Gina rêve d’entrer dans le monde du spectacle et doit rencontrer un homme politique influent qui pourrait lui ouvrir des portes. Marco l’accompagne au volant de sa berline noire, c’est son premier jour de travail. De la banlieue vers le centre historique de la ville, ils vont apprendre à se connaître, tomber amoureux, et vont ainsi basculer, peut-être un peu trop tôt et sans en avoir conscience, dans le monde des adultes.

une journée 2Une journée particulière

A 19 ans, Gina est une belle jeune fille, un peu naïve, pleine d’espoir, pleine de rêves. Dans la banlieue de Rome où elle habite avec sa mère, on la trouve en train de se préparer à une journée très particulière : une automobile conduite par un chauffeur va la conduire chez un député qui devrait pouvoir l’aider à faire son entrée dans le monde la télévision. Tout a été minutieusement préparé : une robe de prix, une coiffure « artistique » réalisée par un coiffeur contre-ténor qui travaille en chantant l’aria « Lascia Ch’io Pianga » du Rinaldo de Haendel (morceau qu’on réentendra à la fin du film, dans l’interprétation discographique de Cecilia Bartoli et Christopher Hogwwod), Gina doit être au summum de sa beauté. Si, en plus, tout le quartier peut voir le résultat, la maman sera encore plus satisfaite ! Le chauffeur de la Mercedes qui va conduire Gina chez le député s’avère être Marco, un jeune homme de son âge, dont c’est la première journée de travail. Lui, c’est un prêtre qui l’a « pistonné », un prêtre pour qui sa mère fait des travaux de couture sans jamais se faire payer, sachant qu’un jour il pourrait lui rendre un service. Entre les deux jeunes gens, la phase de « reniflement » s’avère un peu rude. Mais, petit à petit, Gina et Marco vont s’apprivoiser. D’autant plus que, très vite, le député a fait appeler Marco par sa secrétaire pour dire qu’il a pris du retard et, qu’en attendant sa disponibilité, Gina et Marco doivent tuer le temps en faisant ce qu’ils veulent.

une journéeUn faux manque de profondeur

A partir d’un tel point de départ qui voit deux jeunes gens issus d’un milieu populaire laissés dans la nature, dans une parenthèse limitée dans le temps pendant laquelle ils peuvent faire croire aux autres et à eux-mêmes qu’ils font partie de la société romaine riche et branchée, on peut s’attendre à tout, même au pire. Seulement voilà,Francesca Comencini n’est pas une réalisatrice de « teen movies » à 2 balles, c’est, bien au contraire, une femme à la conscience sociale et politique très aiguisée. Alors certes, tout au long de cette journée, Gina et Marco vont souvent se comporter comme se comportent les grands adolescents dans les films pour adolescents : Gina va dérober une robe dans une boutique de luxe, Gina et Marco vont s’inviter dans un restaurant chic et se faire servir langouste et champagne, aux frais du député, bien entendu, Marco va écorner la peinture de la belle limousine, etc. Seulement voilà : il y a toujours derrière, de la part de Francesca Comencini, la volonté de poser un regard lucide sur la société italienne et sur les problèmes qu’y rencontre la jeune génération : la difficulté qu’il y a à trouver un travail, l’importance que revêt toujours le « piston » dans ce pays, le rêve quasiment universel que font les jeunes de la banlieue de trouver leur place dans les strates privilégiées de la société. La force de la réalisatrice, c’est de glisser ces messages de façon subtile, sans forcer le trait, sans alourdir le ton général du film et on ne peut s’empêcher de sourire (un peu jaune !) lorsque Gina dérobe la robe après avoir adopté un comportement odieux dans le magasin et glisse presque innocemment à Marco : « Pour faire croire qu’on est riche, il suffit d’être désagréable ! ».

une journée 1La fraîcheur des comédiens, la beauté de Rome

Pour interpréter les deux rôles principaux de son film, Francesca Comencini a eu la chance, ou le talent, de mettre la main sur deux jeunes comédiens très prometteurs et, surtout, ayant la jeunesse et la fraîcheur indispensables pour interpréter Gina et Marco : pour Giula Valentini, qui joue Gina, il s’agit de son premier film ; pour Filippo Scicchitano, c’est son deuxième, le premier ayant été Scialla !, sorti en France il y a 6 mois. Moins jeune que Giula et Filippo, la ville de Rome met également au film sa beauté millénaire au service du film, une beauté bien mise en valeur par la photographie de Luca Bigazzi, bien connu pour son travail auprès de Paolo Sorrentino.

Résumé

Présenté à la Mostra de Venise 2012, Une journée à Rome apporte une nouvelle preuve que le cinéma italien n’est pas mort. Certes, les salles de cinéma ont fondu comme neige au soleil et la mainmise de Berlusconi sur les potentiels pourvoyeurs de financement que sont les chaînes de télévision n’a pas arrangé les choses. Le cinéma italien arrive toutefois à proposer un nombre assez important de films chaque année, dont certains font partie des meilleurs films du moment, même si, malheureusement, tous n’ont pas l’honneur d’une sortie en salle dans notre pays. On se félicite donc de pouvoir voir ce film, beaucoup plus profond qu’il n’y paraît, de Francesca Comencini.

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=YmLebMhNYm0[/youtube]

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