Test Blu-ray : Stillwater

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Stillwater

États-Unis : 2021
Réalisation : Tom McCarthy
Scénario : Thomas Bidegain, Noé Debré, Marcus Hinchey, Tom McCarthy
Acteurs : Matt Damon, Camille Cottin, Abigail Breslin
Éditeur : Universal Pictures
Durée : 2h19
Genre : Thriller
Date de sortie cinéma : 22 septembre 2021
Date de sortie DVD/BR : 26 janvier 2022

Travaillant sur des plateformes pétrolières, Bill Baker est un homme taiseux et taciturne qui a longtemps négligé sa famille. Il décide de faire le voyage de l’Oklahoma jusqu’à Marseille pour aller voir sa fille Allison, dont il n’a jamais été proche, mais qui est incarcérée pour un meurtre qu’elle affirme ne pas avoir commis. Quand Allison lui parle d’un nouvel indice susceptible de l’innocenter, Bill se retrouve confronté à la barrière de la langue et à un système judiciaire complexe qu’il ne comprend pas. Avec l’aide de Virginie, une comédienne rencontrée par hasard, il se met en tête de s’occuper lui-même de l’affaire et de prouver l’innocence de sa fille…

Le film

[4/5]

Quelques années après Spotlight, qui lui permit d’obtenir l’Oscar du meilleur scénario original et celui du meilleur film, Tom McCarthy revient sous les feux de la rampe avec Stillwater, un intéressant drame prenant la forme d’une chronique familiale teintée d’enquête policière. Porté par les prestations conjointes de Matt Damon, Abigail Breslin et Camille Cottin, le film n’est certes pas exempt de quelques défauts, mais les acteurs principaux apportent à la trajectoire contrariée de cette relation père/fille une authenticité émotionnelle qui parviendra à résonner de façon percutante tout au long de l’histoire.

Stillwater, c’est bien sûr le récit d’une rédemption : celle d’un père au passé trouble qui cherche à racheter ses erreurs passées en essayant de faire libérer sa fille emprisonnée, histoire de tenter de faire oublier qu’il a été un père absent pour elle durant la plus grande partie de sa vie. Parallèlement à ses démarches maladroites pour tenter de mener l’enquête, Bill, le personnage incarné par Matt Damon trouvera un nouveau souffle / une nouvelle chance auprès de Virginie (Camille Cottin) et de sa fille de huit ans, Maya (Lilou Siauvaud). Damon, tout à fait crédible dans le rôle d’un américain taciturne, découvre par leur intermédiaire la tendresse et la joie d’être père, et s’adapte à une nouvelle façon de voir la vie.

S’inspirant de l’affaire Amanda Knox, américaine emprisonnée en Italie pour le meurtre de sa colocataire, Stillwater se déroule en France, à Marseille, et le décalage culturel entre l’américain typique (qui possède deux armes à feu mais récite le bénédicité avant chaque repas) et l’européenne bohème crée finalement une dynamique aussi amusante qu’intéressante entre les personnages, qui virera au fil du récit à l’alchimie certes narrativement commode mais indéniablement chaleureuse.

Par le biais de la relation se nouant entre Bill et la petite Maya, Stillwater tente de dépasser ce schéma binaire de choc des cultures, et ce même si les amis de Camille Cottin, interprétés par Naidra Ayadi et Bastien d’Asnières dans le film, n’évitent pas une certaine « condescendance culturelle » typiquement française. Pour autant, on découvrira que Bill n’a pas voté pour Trump, ce qui permet à Tom McCarthy d’affirmer que derrière le vernis des apparences, les individus sont plus complexes qu’il n’y parait.

Cela dit, et malgré l’aide en tant que coscénaristes de Thomas Bidegain et Noé Debré, collaborateurs réguliers de Jacques Audiard, Tom McCarthy ne parvient pas pour autant toujours à canaliser son mélange d’études de personnages sur le mode de la chronique et d’enquête s’aventurant par moments sur le terrain du polar pur et dur – la concentration sur le drame familial dissipe l’élan du thriller, et le fait d’opter dans le dernier acte de Stillwater pour un rebondissement digne de Taken tombe finalement comme un cheveu sur la soupe au milieu de moments intimes finement observés.

Mais parallèlement à la « nouvelle » vie familiale de Bill, Stillwater met également en scène les difficultés de ce père gauche et peu démonstratif afin de recoller les morceaux avec sa fille naturelle, Allison (Abigail Breslin). Le film n’explique jamais réellement la nature froide des relations entre les deux personnages, même si le récit indique que Bill a traversé une période sombre de dépendance à l’alcool ainsi qu’à la drogue. Au fil des éléments narratifs dévoilés par le scénario, on découvrira également qu’Allison avait fait le choix de s’inscrire dans une université française parce qu’elle était « loin » – elle voulait s’éloigner le plus possible de sa ville natale et de son existence aux Etats-Unis. Quand nous rencontrons Allison au début de Stillwater, elle est incarcérée à Marseille depuis cinq ans, purgeant une peine de neuf ans pour le meurtre de sa compagne Lina – une peine que l’on pourra considérer comme étonnamment clémente, surtout étant donné l’âge de l’accusée, mais le récit n’explicitera pas ce point.

[Attention SPOILERS] L’’arc narratif gravitant autour du meurtre de Lina est amenée au spectateur par bribes, mais les informations dont on dispose finissent par nous faire comprendre qu’Allison est bel et bien impliquée dans le meurtre de sa compagne, et qu’elle a agi avec la complicité d’un jeune homme nommé Akim (Idir Azougli, vu dans Sheherazade). Pour autant, si elle ne l’a pas impliqué dans l’affaire au moment de sa condamnation, la présence de traces d’ADN non répertorié sur la scène de crime et cinq ans dans une prison française auront fini par la convaincre qu’elle était en mesure de faire porter le chapeau à son complice, et par conséquent d’obtenir sa propre libération. Pourquoi ? Hé bien tout simplement parce qu’Akim est un jeune issu de l’immigration, et que sa présence sur les lieux du crime deviendra forcément le synonyme de sa culpabilité. Le scénario n’est pas particulièrement clair concernant la culpabilité d’Allison ou d’Akim, mais la scène de la rencontre avec le patron de café s’avère assez explicite dans ce qu’elle dit de la France et de la déliquescence sociale de Marseille. Le film n’insiste jamais non plus réellement sur le fait que ce sont finalement les origines du jeune homme qui finiront par innocenter Allison, mais cet aspect de Stillwater existe bel et bien, et s’impose comme assez subversif dans son genre. [Fin des SPOILERS]

Au final, Stillwater réussit tout de même très bien à démêler les différentes intrigues qui composent son récit, et qui pourront presque donner au spectateur l’impression d’avoir deux, voire même trois films réunis en une seule histoire. Le film commence par suivre la trajectoire d’un père en mission, dans un pays dont il ignore les codes et les usages, avant de se muer en drame relationnel, puis de revenir en arrière, au moment où le personnage se décide à prendre les choses en main. Entre la quête de justice et/ou de vérité, l’impasse de la relation père/fille ou encore la chronique teintée de romance, Stillwater propose suffisamment de belles choses à l’écran pour s’avérer convaincant.

Le Blu-ray

[4/5]

Le Blu-ray de Stillwater édité par Universal Pictures nous propose une expérience visuelle et sonore absolument superbe, ce qui permettra aux spectateurs l’ayant loupé dans les salles (le film a réalisé un peu plus de 300.000 entrées en France) de découvrir le film dans des conditions optimales. Définition au taquet, piqué précis, couleurs et contrastes superbement gérés, l’image s’avère très belle et enthousiasmante : le top du top en matière de Haute-Définition. Côté son, et comme d’hab avec cet éditeur, seule la VO est proposée dans un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 immersif et très dynamique (le rendu acoustique de la scène du match de foot est à tomber à la renverse), tandis que la VF doit se contenter d’un « simple » encodage en DTS 5.1, certes ample et efficace, mais ne pouvant tenir la comparaison avec son aîné. On notera cela dit qu’étant donné l’atmosphère relativement intimiste du film, la piste française se défend bien, et que le doublage de Stillwater est soigné : la voix française de Matt Damon a comme toujours été confiée aux bons soins de Damien Boisseau, et c’est Claire Bouanich qui assure le doublage d’Abigail Breslin, comme elle le fait régulièrement depuis Signes en 2002.

Dans la section suppléments, la galette nous propose trois featurettes revenant sur le tournage du film, en notamment et de façon plus approfondie sur l’intrigue du film et l’influence de l’affaire Amanda Knox (5 minutes), sur la ville de Marseille (3 minutes) ainsi que sur la profonde humanité du film et les liens qui se créent entre les personnages (3 minutes).

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