Test Blu-ray : Silent Night

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Silent Night


États-Unis : 2023
Titre original : –
Réalisation : John Woo
Scénario : Robert Archer Lynn
Acteurs : Joel Kinnaman, Catalina Sandino Moreno, Kid Cudi
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Durée : 1h44
Genre : Action
Date de sortie DVD/BR : 29 février 2024

La veille de Noël, un père de famille voit son jeune fils mourir, victime collatérale d’une fusillade entre deux gangs rivaux. Alors qu’il se remet progressivement de la blessure qui l’a rendu muet, il se lance dans un programme d’entraînement intensif afin de venger sa mort. Maniement des armes à feu et des armes blanche, dextérité au combat rapproché et à la conduite automobile, c’est un homme que rien ne semble pouvoir arrêter qui part sur le chemin ombrageux de la vengeance…

Le film

[5/5]

Vous en avez marre de ces films d’action bavards, qui vous bercent de parlottes stériles et inutiles entre deux gunfights ? La tentation d’appuyer sur « avance rapide » est-elle forte, quand vous entendez Dominic Toretto vous balancer une énième tirade sur l’importance de la famille ? Vous êtes du genre à mettre des Post-it dans vos boitiers de DVD/Blu-ray pour savoir quels chapitres du film zapper pour éviter les longues scènes de dialogues inutiles ? Vous regrettez qu’au cœur du cinéma contemporain, la caractérisation des personnages passe davantage par le verbe que par les actes ? Si vous avez répondu « oui » à une de ces questions, sachez mes amis que John Woo vous a compris, et qu’il vous livre aujourd’hui avec Silent Night le film d’action que vous avez tant fantasmé.

Vingt ans après sa dernière expérience Hollywoodienne (Paycheck, 2003), John Woo est donc de retour, et à 77 ans, il compte bien prouver aux cascadeurs qui ont, depuis quelques années, pris le contrôle du cinéma d’action, qu’il est encore une personnalité avec laquelle il faut compter. Et Silent Night est le genre de claque dans la gueule qui vous laissera une bonne grosse marque rouge pour avoir osé supposer le contraire, ou pour avoir un temps oublié qu’il est le réalisateur de The Killer, A toute épreuve et Volte/Face. Une légende vivante, qui vous prouvera encore une fois – et en seulement un peu plus d’une heure et demie – qu’il était, est et restera le meilleur dans son domaine. Le GOAT. Mais si. Puisqu’on vous le dit !

La particularité la plus notable de Silent Night est, sans le moindre doute possible, de renouer avec l’essence du cinéma : il s’agit d’un film muet. C’est un film sonore, dans le sens où il y a de la musique, des sons et des bruits ambiants, des bruits de fond. On y entend aussi par moments des voix humaines, telles que des cris, ou des gens qui parlent à la télé, à la radio. Mais zéro dialogue. Comme si John Woo, grand admirateur de Melville, avait voulu prolonger les vingt premières minutes du Samouraï sur un film entier. Et le plus admirable dans cette histoire, c’est que ça marche à 100% – ça marche d’ailleurs tellement bien que si d’aventure vous n’étiez pas au courant de l’absence totale de dialogues dans le film au moment où vous vous lancez dans le visionnage de Silent Night, il vous faudrait probablement cinquante minutes à une heure de métrage avant de vous rendre compte qu’aucun mot n’avait été prononcé jusque-là.

On veut souligner par-là que l’absence de dialogues au cœur de Silent Night n’est absolument pas un gimmick, ou une fantaisie artificielle de mise en scène. Il s’agit au contraire d’un choix cohérent, réfléchi, qui fait écho à l’état dans lequel se retrouve le personnage interprété par Joel Kinnaman au terme de la première séquence du film. Et surtout, ce choix, qui aurait à coup sûr été désastreux dans les mains qu’un autre cinéaste que John Woo, permet de prouver à ceux qui en douteraient de la force que peut revêtir une narration basée sur l’image et le mouvement. Et en ce qui concerne l’avenir proche de John Woo, on peut être sûr que l’intensité viscérale développée tout au long de Silent Night permettra au cinéaste d’imposer des choix narratifs forts pour le remake de son chef d’œuvre The Killer, qu’il devrait logiquement mettre en scène.

Silent Night va donc bien au-delà du « concept » que pourrait représenter ce défi de tourner un film entier sans une seule ligne de dialogue. Bien entendu, le pitch du film n’est pas foncièrement original : on y suit la vendetta d’un père meurtri se lançant dans une croisade au cœur des bas-fonds de Los Angeles pour venger la mort de son jeune fils. Mais l’absence de communication verbale entre les personnages de Joel Kinnaman et Catalina Sandino Moreno amènera un supplément d’âme et d’émotion à la douleur ressentie par ces parents. Les larmes, les gestes, les regards prennent une importance capitale. Toute la force du cinéma de John Woo est, comme souvent, d’être « Bigger than life » et de nous donner à voir à l’écran des personnages quasi-chevaleresques, sujets à des sentiments intenses, exacerbés. Mais paradoxalement, grâce à un vrai travail d’équilibriste des émotions, le recours au pathos, à des symboles ou à des idées de mise en scène naïves et romantiques fait toujours mouche, et ne provoquera pas les haussements de sourcil ou les ricanements du côté du public… Un sacré tour de force quand on pense que certains des effets utilisés par John Woo sur Silent Night apparaitraient, chez d’autres, comme absolument ridicules et too much.

En d’autres termes, l’immense réussite de Silent Night est vraiment à mettre au crédit du travail d’orfèvre développé par John Woo derrière la caméra. Une mélancolie indéniable imprègne l’histoire, mais le cinéaste va puiser dans la douleur de cette famille déchirée par la mort de leur enfant pour nous livrer quelques-unes des scènes d’action les plus intenses et les plus cathartiques qu’il nous ait été donné de voir ces dernières années, avec en bonus quelques effets de mise en scène – dont un époustouflant plan-séquence – absolument jouissifs. Et si on pense souvent au chef d’œuvre de James Wan Death Sentence au fur et à mesure qu’avance la croisade suicidaire du personnage principal, on ne saurait émettre une préférence pour l’un ou l’autre tant les deux films sont à la fois très similaires et très différents. Un chose est sûre cela dit : une séance avec les deux films en Back-to-Back vous réservera de véritables montagnes russes d’émotion !

Le Blu-ray

[4/5]

C’est sous les couleurs de Metropolitan Vidéo que vient de débarquer en France le Blu-ray de Silent Night, après une courte période d’exclusivité sur Prime Vidéo. Côté image, le film est récent et on le sent : le master est propre, la définition est impeccable, la colorimétrie fait toujours mouche, le piqué est d’une précision redoutable et les contrastes sont impeccablement tenus, avec des noirs denses et profonds. Côté son, l’éditeur continue sur son excellente lancée avec, comme à son habitude, à la fois la VF et la VO proposées en DTS-HD Master Audio 5.1, dans des mixages finalement très proches l’un de l’autres, absence de dialogues oblige. Les deux bandes-son bénéficient d’un dynamisme époustouflant et d’une spatialisation impeccable, de même que de basses littéralement tonitruantes, renforçant encore l’immersion au cœur du film, surtout bien sûr durant les scènes d’action qui rythment généreusement le métrage.

Du côté des suppléments, en plus de la traditionnelle bande-annonce, on se régalera d’un intéressant making of qui donnera la parole à John Woo, et la rendra à ses acteurs qui s’exprimeront justement sur les difficultés liées à une interprétation entièrement non verbale. On aura également droit à quelques moments volés sur le tournage des scènes d’action. Est-il besoin de préciser qu’on tient là un Blu-ray absolument indispensable ?

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