Test Blu-ray : Severance

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Severance

Royaume-Uni : 2006
Titre original : –
Réalisation : Christopher Smith
Scénario : James Moran, Christopher Smith
Acteurs : Laura Harris, Danny Dyer, Tim McInnerny
Éditeur : BQHL Éditions
Durée : 1h36
Genre : Horreur, Comédie
Date de sortie cinéma : 18 octobre 2006
Date de sortie DVD/BR : 17 février 2022

Sept commerciaux se rendent à un week-end de paintball organisé par leur entreprise pour renforcer l’esprit d’équipe. Le séjour démarre plutôt bien mais très vite nos cadres sup’ réalisent qu’ils sont devenus la proie de soldats d’élite super entraînés complètement dégénérés. Dès lors, ils vont devoir se battre pour leur survie tout en essayant de comprendre qui est derrière tout cela…

Le film

[4/5]

Après s’être dévoué corps et âme, entre 2004 et 2010, au cinéma d’horreur, la carrière du cinéaste britannique Christopher Smith a pris un tournant singulier : il s’est en effet égaré dans la réalisation d’épisodes de séries TV et d’un film de Noël avant de renouer avec le cinéma de genre avec Detour en 2015. Éditeur encore trop discret sur le front de la Haute-Définition, BQHL Éditions a néanmoins décidé, au premier trimestre 2022, de remettre sur le devant de la scène le deuxième long-métrage de Christopher Smith, l’excellent Severance, un mélange improbable de satire du monde du travail et de survival bien brutal tendance gore. Un peu comme si The Office rencontrait La Colline a des yeux

Quand il aborde la réalisation de Severance, Christopher Smith s’est principalement fait remarquer avec Creep en 2004, un film d’horreur bien craspec prenant place dans le métro de Londres. Pour son nouveau film, Smith prend le parti de s’inspirer des modes alors en vogue dans le cinéma horrifique, à savoir le survival, remis au goût du jour par Détour mortel en 2003, et le « torture porn » initié par Hostel en 2005. Mais à la façon du chef d’œuvre Shaun of the Dead (2004), le scénariste / réalisateur décide d’élargir un peu le spectre de son répertoire en ajoutant une bonne dose de comédie à l’ensemble. Cependant, contrairement à la recette concoctée par Simon Pegg et Edgar Wright sur Shaun of the Dead, qui était essentiellement centré sur la comédie et laissait largement de côté les aspects les plus horrifiques de leur récit, Christopher Smith décide d’y aller franco dans l’horreur graphique, nous livrant de fait un film slalomant sans cesse entre les rires nerveux et les démonstrations d’horreur gore épouvantablement réalistes.

Le point de départ de Severance est extrêmement simple : une équipe de cadres commerciaux de Palisade Defence, une multinationale spécialisée dans l’armement, se rend à un séminaire d’entreprise dans les forêts de Hongrie pour renforcer leur esprit d’équipe et de cohésion de groupe. A leur arrivée sur place, ils réalisent à leur grand désarroi que leur pavillon supposé luxueux ressemble davantage à une vieille bicoque tombant en ruines. Après une nuit agitée, ils se verront traqués un par un par d’impitoyables assaillants masqués dans les bois, pour des raisons qui ne sont jamais complètement explicitées par l’intrigue. Bien sûr, la découverte dans le pavillon de vieux dossiers estampillés Palisade Defence comportant les photos de plusieurs soldats des pays de l’Est suggère la possibilité qu’il s’agisse de mercenaires ayant œuvré dans l’ombre pour la multinationale par le passé, mais il ne s’agit là que d’une des théories hypothétiques pouvant expliquer la présence dans le secteur de ces fous sanguinaires et armés jusqu’aux dents. Les personnages de Harris (Toby Stephens), le commercial arrogant, et de Jill (Claudie Blakley), la féministe de service, évoqueront également des légendes urbaines concernant le chalet où loge le petit groupe : un gaz neurotoxique de chez Palisade Defence aurait été utilisé pour pacifier l’endroit, qui était à l’époque soit un asile, soit une prison, selon les versions.

La première moitié de Severance sera principalement axée sur la découverte des personnages ainsi que sur la comédie pure, notamment autour des personnages de Richard, le supérieur hiérarchique du groupe (Tim McInnerny) et de Steve (Danny Dyer), employé très porté sur les drogues, ayant ingéré des champignons hallucinogènes dans le bus qui menait le groupe sur les routes de Hongrie. Comme au cœur de n’importe quelle équipe de bureau, quelques tensions existent au sein du groupe : il y a des luttes de pouvoir, des rancœurs, mais aussi des tensions sexuelles et même quelques tensions de classe, de genre ou de race. Ce premier acte de Severance sera également l’occasion pour Christopher Smith de montrer ce dont il est capable d’un point de vue technique : les récits évoqués par Harris, Jill puis par Steve (en mode 70’s) sont absolument remarquables formellement parlant, en plus de permettre au spectateur de se familiariser avec les personnages, tous attachants et sympathiques au-delà de leurs défauts.

Bref, le déferlement de tripaille et de brutalité brillamment annoncé par la séquence d’ouverture de Severance ne commencera réellement qu’après que le spectateur se soit confortablement installé dans son fauteuil, et qu’il ait pris soin de faire connaissance avec les différents protagonistes du récit. Habile, Christopher Smith choisit de conduire son public dans une direction, puis propose un demi-tour en drift à la Dominic Toretto, de sorte que ledit public se retrouve finalement dans une autre direction. Très drôle, Severance provoquera à coup sûr de nombreux éclats de rire durant sa première partie : le plan mettant en scène Gordon (Andy Nyman) couvert de feuilles dans les couloirs du chalet est par exemple absolument irrésistible. Bref, on rit, puis on se couvre brutalement les yeux. Et quand le deuxième acte est lancé et que le jeu de massacre commence, on commence à faire les deux en même temps…

Durant la deuxième partie de Severance, la comédie est légèrement mise en veilleuse et ne reviendra qu’aux moment où l’on s’y attend le moins. Le niveau de gore est extrêmement élevé, avec des scènes dérangeantes à ne pas mettre devant tous les yeux. Les effets spéciaux et visuels sont à la fois réalistes et très réussis. Cet élément est vraiment une des clés de la réussite du film de Christopher Smith : habituellement, dans le mélange horreur / comédie, les éléments comiques sont le plus souvent assez boiteux, et ajoutés à l’intrigue pour renforcer des éléments horrifiques faiblards, à grands renforts de second degré et de clins d’yeux complices au public. Ce n’est pas le cas de Severance : qu’ils soient visuels ou verbaux, les gags sont efficaces et bien pensés, si bien qu’il s’agit vraiment d’un film qui devrait tout à la fois ravir ET les fans d’horreur ET les amateurs de comédie. Cet équilibre parfait n’est pas si fréquent au sein du genre, et de plus, l’attachement de Christopher Smith à prendre le temps de construire de « vrais » personnages (et non de simples caricatures) permet de plus au cinéaste de nous livrer quelques passages presque émouvants quand untel ou untel passera de vie à trépas.

En deux mots comme en cent, Severance parvient assez admirablement à se montrer à la fois drôle et terrifiant dans son intrigue, qui fait entrer en collision la politique de bureau et la notion de survie. En dépit d’un budget restreint, le film de Christopher Smith tient toutes ses promesses, alliant des personnages amusants à des effets gore épouvantablement réussis, le tout étant sublimé par une écriture solide à la fois dans le registre de l’humour et de l’horreur. Malheureusement, Severance a été un échec commercial, rapportant environ cinq millions de dollars au box-office mondial pour un budget avoisinant les dix millions. En France, il n’avait attiré qu’un peu plus de 151.000 curieux lors de sa sortie à l’automne 2006. On est donc heureux que BQHL Éditions lui donne aujourd’hui une seconde chance en Blu-ray !

Le Blu-ray

[4/5]

Étant donné son faible score dans les salles obscures, Severance n’était sorti en France qu’au format DVD en 2007 : à l’image d’autres films d’horreur sortis à la même époque (tels que Wolf Creek, Isolation, Les ruines, Black Sheep ou Amer), le film de Christopher Smith s’était vu privé de Haute-Définition. La sortie de Severance en Blu-ray sous les couleurs de BQHL Éditions est donc un petit événement, d’autant plus remarquable d’ailleurs que cette édition HD s’impose comme un fier représentant du support Blu-ray : le transfert 1080p du film est en effet bluffant de précision, avec un piqué, un niveau de détail et une profondeur de champ assez époustouflants. Si l’on se dit parfois que les contrastes auraient pu être un poil boostés, les couleurs sont cependant naturelles, et qu’il s’agisse des plans d’ensemble ou de détail, tout est parfait. Le transfert semble par ailleurs exempt de toute trace de bruit, fourmillements, banding ou tout autre écueil numérique : un sans-faute donc ! Côté bande sonore, la VO nous est proposée dans un mixage LPCM Audio 5.1 de haute volée, naturellement riche en basses et en effets d’ambiance multidirectionnels, permettant une immersion optimale au cœur de ce récit horrifique de haute volée. Les dialogues sont par ailleurs toujours clairs. La VF (assurée entre autres par Charles Pestel, Pierre Tessier et Sandra Valentin) nous est en revanche proposée en Dolby Digital 5.1 : le rendu acoustique est assez efficace, mais on notera tout de même que l’ensemble est mixé à un niveau très bas, surtout comparé à la VO.

Du côté des suppléments, on commencera avec un intéressant making of (17 minutes – et non 34 comme indiqué sur la jaquette), qui nous fournira de nombreuses informations sur la genèse du film. Outre les entretiens avec le réalisateur et les acteurs, qui reviendront sur l’histoire et les différents personnages, on trouvera également de nombreux moments volés sur le plateau. On continuera ensuite avec une poignée de featurettes, consacrées aux effets spéciaux (5 minutes) ou encore à la genèse du film (5 minutes), ce dernier sujet comportant quelques redondances avec le making of. L’éditeur nous propose également une poignée de scènes coupées (8 minutes) ainsi qu’une fin alternative présentée sous la forme d’un storyboard animé (1 minute). On retrouvera également une version alternative de la scène d’ouverture du film sous forme de storyboard animé (3 minutes). Last but not least, on trouvera également une présentation du film par Rafik Djoumi (14 minutes), au cœur de laquelle le journaliste / figure de proue du magazine Capture Mag remettra le film de Christopher Smith dans son contexte de sortie, reviendra sur ses qualités et évoquera l’insuccès du film dans les salles obscures. Passionnant !

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