Test Blu-ray : Les blancs ne savent pas sauter

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Les blancs ne savent pas sauter

États-Unis : 1992
Titre original : White men can’t jump
Réalisation : Ron Shelton
Scénario : Ron Shelton
Acteurs : Wesley Snipes, Woody Harrelson, Rosie Perez
Editeur : Lionheart Éditions
Durée : 1h55
Genre : Comédie, Sport
Date de sortie cinéma : 21 octobre 1992
Date de sortie DVD/BR : 6 décembre 2019

Billy Hoyle est un ancien joueur de basket professionnel qui gagne sa vie en poussant d’autres joueurs de basket de rue à parier de l’argent. Il laisse croire à ses adversaires qu’ils ont un avantage naturel sur lui dû à leur couleur de peau et leur style vestimentaire. C’est ainsi qu’il s’associe à Sidney Deane, joueur aussi arrogant que talentueux pour affronter les joueurs les plus coriaces des terrains publics de Los Angeles…

La naissance d’un nouvel éditeur

Avant toute chose, on voulait saluer leur travail. La sortie en Blu-ray des Blancs ne savent pas sauter marque la naissance d’une nouvelle petite structure spécialisée dans l’édition de galettes Haute-Définition : Lionheart Éditions. Le choix de ce nom en particulier, qui rappellera bien sûr aux amateurs le titre original de Full contact avec Jean-Claude Van Damme, indique clairement le public visé par ce nouvel éditeur : les anciens lecteurs de Ciné News et Impact, amateurs de cinéma viril made in 90’s. Lionheart Éditions nous proposera donc une sélection de titres-phares des années 90 dans des éditions Blu-ray soignées, sortant qui plus dans des tirages limités qui en feront des objets d’autant plus rares et précieux.

Le choix de devenir éditeur, surtout Blu-ray, est vraiment une affaire de passion – même si on leur souhaite un avenir bordé de villas de rêve à Miami Beach, ce n’est probablement pas demain la veille que l’équipe de Lionheart Éditions deviendra millionnaire. Le choix d’un public de niche (un certain cinéma US 90’s) dans un secteur de niche (la vidéo physique au format Blu-ray) est toujours un risque. Cette passion et les ventes des 1000 exemplaires de leurs premiers Blu-ray leur permettront cependant, on l’espère, de financer l’achat de droits et le travail d’édition sur de futurs titres. Ainsi, si Cyborg est déjà dans les tuyaux et arrivera incessamment sous peu chez tous les meilleurs revendeurs, l’éditeur annonce déjà la possibilité de sortir prochainement des films tels que le sympathique Un flic à la maternelle (1990) ainsi que Au dessus de la loi (1993), alias The Joshua tree, l’un des meilleurs films de Dolph Lundgren. Et franchement, vu les ventes disons, hum, très « décevantes » des Combos 90’s consacrés par Metropolitan Vidéo à Van Damme, Albert Pyun et Dolph Lundgren en 2016/2017, on leur souhaite vraiment d’y arriver. Une chose est sure cependant : ils ne pourront y parvenir qu’avec votre soutien, alors foncez, et dévalisez en masse les éditions encore disponibles sur leur site officiel.

Parmi les films que nous pourrions hypothétiquement voir un jour débarquer en Blu-ray chez Lionheart, on notera Dark angel (1990), Navy Seals – les meilleurs (1990), Timebomb (1991), Ricochet (1991), Cavale sans issue (1992), Sans rémission (1992), Last action hero (1993), Timecop (1994), True lies (1994), Mort subite (1995) ou encore Barb wire (1996). On aimerait bien sûr également voir débarquer des films tels que Dans les griffes du dragon rouge (1991) ou Demolition man (1993), mais les droits de ces deux-là sont détenus par Warner, et il y a de fait bien peu de chance de les voir arriver un jour dans des éditions « collector ».

Le Film

[4/5]

Quand Les blancs ne savent pas sauter est sorti sur les écrans du monde entier en 1992, les films sur le basket n’étaient pas monnaie courante. Bien sûr, il y avait bien eu quelques essais dans les années 70, de Vas-y, fonce (1971) à Fast break (1979) en passant par One on one (1977), mais aucun n’avait réellement marqué les mémoires. Pas plus que Le grand défi (Hoosiers, 1986) et son équipe de petits blancs menée par Gene Hackman. En fait, le film de Rob Shelton était le premier à réellement proposer une vision du basket tel qu’il l’était sur les terrains, qu’ils soient professionnels ou de rue : dominé par les noirs. Le titre du film le rappelle d’ailleurs de façon assez amusante. Ainsi, le personnage du « petit blanc » incarné par Woody Harrelson a beau être excellent sur le terrain, il ne pourra qu’en faire l’amer constat. Il ne sait pas sauter.

Comme tous les films s’étant avérés capables de saisir au vol « l’air du temps », Les blancs ne savent pas sauter s’est révélé un beau succès dans les salles, cumulant plus de 90 millions de dollars au box-office international, et attirant même 260.000 jeunes fans de basket dans les salles françaises. Le succès du film donnera même carrément naissance à une grande vague de films dits « de basket », avec notamment, et rien qu’en 1994, à la fois Blue chips (William Friedkin), l’excellent documentaire Hoop dreams (Steve James) et Above the rim (Jeff Pollack). La popularité de ce sport auprès des kidz donnera même naissance à deux films pour enfants centrés sur le basket, Space Jam (Joe Pytka, 1996) et Air Bud – Buddy star des paniers (Charles Martin Smith, 1997). Plusieurs dizaines de films donnant une image plus ou moins réaliste du basket pro se sont ensuite succédés sur les écrans depuis vingt-cinq ans.

Mais Les blancs ne savent pas sauter garde une aura toute particulière. C’est d’autant plus vrai avec le temps qui nous sépare de sa sortie, Les blancs ne savent pas sauter est passé du statut de simple « témoignage » sur la popularité du basket dans les quartiers populaires US du début des années 90 à un véritable symbole : celui d’une époque littéralement « bénie des Dieux » en ce qui concerne le basket. Car les années 90 sont celles qui auront vu naître les personnalités les plus marquantes de ce sport : Michael Jordan, Magic Johnson, John Stockton, Scottie Pippen, Kobe Bryant, Shaquille O’Neal, Dennis Rodman, Patrick Ewing, Charles Barkley, Karl Malone, Hakeem Olajuwon… Les joueurs ne sont plus de simples joueurs de la NBA : ils deviennent de véritables « Stars ». Et même si l’on ne retrouvera au sein du film aucune d’entre elles (on verra leurs maillots, tout au pire !), Les blancs ne savent pas sauter a pour lui de transposer parfaitement à l’écran l’ambiance virile et survoltée qui règne sur les terrains de basket.

Ainsi, le film a su toucher le cœur du public américain. Un peu moins chez nous, forcément, même si, malgré la VF, il compte tout de même une poignée d’aficionados dans l’hexagone. On dit « malgré » la version française non pas parce que cette dernière est mauvaise – non, au contraire. Elle est même plutôt bonne dans son genre. Mais le basket, c’est un truc ricain. Les mecs qui transpirent sur les terrains de rues en se balançant des « Yo momma » et des insultes, c’est un truc ricain. Alors à moins de s’appeler Kassovitz et d’avoir eu une enfance passée entre la France et les U.S.A (oui oui, c’était une pique de jalousie purement gratuite), on y perd forcément un peu dans la « traduction » des dialogues méchants et franchement hilarants que s’échangent les joueurs sur le terrain. C’est un peu vrai pour tous les films, mais tout particulièrement sur les films « urbains » comme Les blancs ne savent pas sauter. Les subtilités linguistiques sont telles qu’un tel film ne peut vraiment s’apprécier à 100% qu’en version originale. Prenons ne serait-ce que l’exemple le plus basique qui soit : celui du choix de la traduction littérale du titre, White men can’t jump devenant fort logiquement Les blancs ne savent pas sauter. En France, tout comme aux États-Unis d’ailleurs, le verbe « sauter » peut avoir plusieurs significations. Selon les traductions, le titre pourra donc être considéré comme complètement innocent ou revêtir un double-sens un peu cochon, comme c’était le cas chez nous en 1992. Croyez-moi, je sais pas comment parlent les jeunes aujourd’hui, mais j’avais douze ans quand le film est sorti dans les salles, et le double-sens était flagrant à ce moment-là. Tout ça pour dire donc que si vous avez le choix, optez pour la découverte de Les blancs ne savent pas sauter en VO. Une version originale qui claque comme un mothafucka.

Un badass mothafucka, même, d’autant qu’on retrouve au casting des Blancs ne savent pas sauter une poignée d’acteurs découverts quelques années plus tôt chez Spike Lee. Rosie Perez avait fait sensation dans Do the right thing (1989), on avait vu Tyra Ferrell, Cylk Cozart et Kadeem Hardison dans School daze (1988), de même que Wesley Snipes avait réellement explosé aux yeux du public dans Mo’ Better Blues (1990) et Jungle fever (1991). Trop de coïncidences de casting pour affirmer que le film de Ron Shelton ne propose pas un réelle valeur ajoutée « politique » à son métrage, qui évoque sans se voiler la face les problèmes de racisme et de précarité sociale au cœur de la société US. Mais comme le déclarait Wesley Snipes au mensuel Ciné News en octobre 1992, le film de Ron Shelton n’en est pas pour autant un film « à message » comme peuvent l’être les « Spike Lee joints » depuis une quarantaine d’années : « Les blancs ne savent pas sauter est d’abord un film fun, pas une caravane à messages avec des bannières partout. Ça concerne des gars qui mettent leur virilité sur le tapis, devant les gonzesses. Un petit combat de coqs. » Un combat de coqs n’ayant pas pris une ride en l’espace de bientôt trente ans…

Le Blu-ray

[5/5]

Inédit en France depuis son exploitation sur support DVD il y a une vingtaine d’années, Les blancs ne savent pas sauter arrive donc aujourd’hui chez Lionheart Éditions, dans une superbe édition Blu-ray limitée à 1000 exemplaires et s’affichant dans un superbe packaging metalliqueFuturePak – surmonté d’un petit magnet en longueur à placer et replacer sur la tranche (ou sur votre frigo). Le Blu-ray arrive également accompagné d’un livret de 24 pages contenant un entretien exclusif avec le réalisateur Ron Shelton. Ce dernier y reviendra sur le succès du film, le tournage, son implication dans Blue chips ou encore l’idée d’une suite. L’entretien a été mené courant 2019 par Lionel Grenier. Le livret est par ailleurs largement illustré de photos d’exploitation.

Côté master, la définition ne pose pas de problème, le piqué est précis, les couleurs sont chaudes et naturelles, et la préservation du grain cinéma a semble-t-il fait l’objet d’un soin tout particulier de la part de Lionheart. Cette granulation un peu « roots » fait d’ailleurs partie intégrante de la patine et du charme du cinéma des années 90. L’éditeur a par ailleurs fait le choix judicieux d’opter pour un encodage en 1080p respectant le défilement cinéma, et on l’en félicite chaleureusement. Côté son, la version française d’origine côtoie naturellement la version originale dans le menu. La VF est proposée en DTS-HD Master Audio 2.0, tandis que la VO bénéficie d’une véritable et solide spatialisation au cœur d’un mixage DTS-HD Master Audio 5.1, qui la rend plus ample, plus immersive, plus efficace. Les deux mixages proposent des dialogues clairs, mais on préférera néanmoins la version originale, pour les raisons que l’on a évoqué un peu plus haut.

Du côté des suppléments, et outre le riche livret contenant l’entretien avec Ron Shelton, on trouvera sur la galette la traditionnelle bande-annonce ainsi qu’une présentation du film par Julien Camy, co-auteur du livre « Sport & Cinéma » (18 minutes). Il y reviendra sur le contexte de production ainsi que sur tout le processus de création des Blancs ne savent pas sauter. C’est complet et très intéressant.

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