Test Blu-ray : La Nuit des maléfices

Angleterre, XVIIIème siècle. Dans un petit village, un jeune homme affirme avoir vu le Diable. Le juge du comté n’y prête pas attention. Mais soudain, des événements anormaux se déroulent : les villageois sombrent dans la folie, et des jeunes femmes se voient affligées de marques sur le corps. C’est alors qu’un groupe mené par la jolie Angel Blake pratique d’étranges cérémonies funèbres…

Petite société de production britannique indépendante montée pour « concurrencer » la Hammer Films sur le terrain du cinéma fantastique, la Tigon a remporté son premier succès notable avec Le Grand Inquisiteur (1968), aujourd’hui largement reconnu comme un chef d’œuvre. Leur deuxième titre de gloire, La Nuit des maléfices, est sorti sur les écrans trois ans plus tard, et surfait sur la mode du film d’horreur « satanique » liée au succès des Vierges de Satan et de Rosemary’s Baby en 1968. Si le film de Piers Haggard n’a pas été un grand succès commercial au moment de sa sortie, il s’est imposé avec le temps comme un véritable classique du cinéma fantastique britannique, en partie parce qu’il ne ressemble vraiment à aucun autre film de l’époque.

La première chose qui différencie La Nuit des maléfices des autres films tournés à la même époque est la structure, étrange et maladroite, de son scénario. Initialement conçu comme un film à sketches semblable à ceux produits par la firme Amicus à la même époque (Le Caveau de la terreur, La Maison qui tue, Les Contes aux limites de la folie, Le Train des épouvantes, Asylum, Histoires d’outre-tombe…), le scénario du film a été remanié afin de réunir ses trois histoires déconnectées les unes des autres en un seul et même récit. Le résultat est un scénario décousu, bancal, manquant de cohérence générale, mais développant une bizarrerie qui finit par donner au film de Piers Haggard une tonalité assez unique et étrange.

L’atmosphère de La Nuit des maléfices est par ailleurs encore renforcée par un travail très imaginatif sur l’image et le cadre, et par une bande originale aussi sinistre qu’envoûtante. Secondé par son talentueux directeur de la photographie Dick Bush, Piers Haggard (Venin) parvient littéralement à faire des merveilles avec le budget dérisoire dont il disposait. Certaines scènes s’imposent de fait comme littéralement glaçantes, et la mise en scène renforce souvent leur côté quasi-hypnotique – à la façon de cette scène de sabbat finale étonnante, utilisant de façon extrêmement habile les plans d’ensemble comme pour mieux mettre le spectateur dans la peau de ces villageois médusés ne sachant comment y mettre un terme.

Le casting est globalement très solide, mais reste dominé par la performance de Linda Hayden (Une messe pour Dracula, Madhouse, Ces garçons qui venaient du Brésil…). En dépit des sourcils surdimensionnés qu’elle affiche dans le dernier acte du film, la jeune actrice s’avère tout à fait convaincante quand elle passe en un éclair de la pureté et l’innocence aux forces démoniaques. Trouvant une partie de sa force dans sa profusion de personnages liés à un scénario ayant des difficultés à trouver son homogénéité, La Nuit des maléfices fait monter la tension crescendo jusqu’à son apogée, la dernière bobine laissant place au traditionnel combat entre les forces des ténèbres et de la lumière. Il ne s’agit certes pas d’un film totalement parfait, mais qui parvient efficacement à transformer ses défauts en qualités, et qui s’impose aisément comme un des meilleurs films fantastiques anglais des années 70.