Critique : L’As des as

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L’As des as

France, Allemagne, 1982
Titre original : –
Réalisateur : Gérard Oury
Scénario : Danièle Thompson et Gérard Oury
Acteurs : Jean-Paul Belmondo, Marie-France Pisier, Rachid Ferrache
Distribution : Gaumont
Durée : 1h44
Genre : Comédie
Date de sortie : 27 octobre 1982

Note : 3/5

Afin de célébrer la confirmation de notre accréditation au prochain festival de Berlin et surtout pour soutenir fidèlement la première grande rétrospective des Fauvettes qui ne semble hélas pas mobiliser une foule de spectateurs, voici l’un des plus grands succès de la carrière de Bébel, issu d’une époque où le nom de l’acteur en haut de l’affiche suffisait pratiquement pour assurer un spectacle populaire. Comme dans tant d’autres de ses films des années 1980, Jean-Paul Belmondo fait essentiellement son show dans L’As des as. Il y interprète le stéréotype qui lui colle à la peau pendant cette période de sa carrière, celui de l’aventurier sans peur, ni gêne, qui a la fâcheuse tendance de se retrouver dans des situations embarrassantes, mais qui s’en sort chaque fois avec des pirouettes en accord avec son tempérament et son cœur altruiste. Cette farce de Gérard Oury ne cherche qu’à divertir. Un objectif qu’elle atteint sans peine, voire avec une désinvolture qui lui assure depuis plus de trente ans une place de choix dans le cœur du public français, toujours aussi friand de ces contes sur des fanfarons patriotes.

Synopsis : Ancien aviateur de la guerre de 14-18, Jo Cavalier est l’entraîneur de l’équipe française de boxe qui participe aux Jeux olympiques à Berlin en 1936. Pendant le trajet en train pour rejoindre la capitale de l’Allemagne nazie, il fait la connaissance de Simon Rosenblum, un orphelin juif qui doit retrouver ses grands-parents à Berlin. Une fois sur place, Jo aide à plusieurs reprises le garçonnet d’échapper à la police allemande, quitte à laisser en suspens ses activités sportives et à remettre à plus tard ses avances envers la journaliste Gaby Delcourt.

Heroicus interruptus

A ce stade de sa carrière, au seuil de la cinquantaine et avec une filmographie impressionnante derrière lui, Jean-Paul Belmondo s’est peut-être un peu trop évertué à jouer un type de personnage interchangeable de film en film. Il s’agit d’un héros, qui déborde certes de charme, de force et d’une forme de courage un brin opportuniste. Mais simultanément, ce baroudeur vieillissant manie avec aisance un second degré dans ses actions et dans son propre regard sur lui-même, qui fait irrémédiablement basculer ses aventures dans le champ de la parodie plus ou moins assumée. Ainsi, son entraîneur casse-cou se comporte comme un héros de bande dessinée dans ses affrontements musclés contre des adversaires qui ne sont jamais à sa hauteur. Il ne fait pas non plus preuve de plus de maturité dans ses affaires romantiques, comme le démontre l’importance hélas progressivement décroissante au fil du récit du personnage féminin incarné par l’impériale Marie-France Pisier. Non, ce Jo Cavalier est en fait un éternel adolescent qui fuit toute responsabilité comme la peste, à l’exception notable de sa passion pour la boxe. Heureusement, le scénario de Danièle Thompson et de son père fait tout son possible pour casser cette belle harmonie de l’homme-enfant. L’aura du héros sans reproche et sans attaches est par conséquent systématiquement mise en question, jusqu’à transformer les nombreux obstacles qui se trouvent sur le chemin du protagoniste en moteur principal de l’intrigue.

Los, los, schnell, schnell

Si le traitement du héros peut déjà prêter à sourire, celui que doivent subir ses adversaires pousse définitivement L’As des as du côté du chahut filmique très difficile à prendre au sérieux. Le règne des nazis avec à leur tête Adolf Hitler est en effet amplement ridiculisé, au point d’inventer à l’affreux dictateur une sœur jumelle en manque d’affection. Cette dernière est de surcroît interprétée par Günter Meisner, l’acteur habituellement abonné à jouer Hitler dans toute sa mégalomanie, un double-emploi travesti qui renforce encore le malaise que nous inspire pareille liberté prise avec l’Histoire. Cependant, l’optimisme entreprenant du héros, l’ami proche d’un bon Allemand qui ne se laisse pas duper par le discours haineux de ses supérieurs, aura tôt ou tard raison de nos réserves. Car après tout, ce film ne cherche nullement à retranscrire un quelconque contexte historique, mais plutôt à le plier coûte que coûte aux exigences d’un spectacle rocambolesque, orchestré exclusivement autour de sa vedette. Cette tâche de déformation volontaire et tout à fait consciente des événements lui réussit plutôt bien, puisque cette comédie débridée s’apparente en fin de compte plus à un conte destiné à un public familial qu’à un drame imbu de l’importance de sa toile de fond historique.

Conclusion

Est-ce que L’As des as fait partie des films de la grande époque de Jean-Paul Belmondo ? La réponse dépend de ce que l’on pense de ces années ’80, qui rimaient pour l’acteur avec des succès populaires à la chaîne, quoique dépourvus des ambitions artistiques associées aux débuts de sa carrière. Ne boudons pourtant pas notre plaisir face à cette aventure haute en couleur, qui nous montre Bébel au meilleur de sa forme dans le genre restrictif du bagarreur au cœur en or.

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