FEFFS 2015 : retour sur les Jours 6 et 7 1/2

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Comme dirait Mark Snow : «fiou, fiou, fiou, fiou, fiou, fiou, tu lu lu lu lu lu» (oui, moi, je prononce comme ça, voir en fin de paragraphe pour la version audio). On a retrouvé enfin les pages manquantes du compte-rendu du FEFFS 2015 (là je me suis hyper bien sorti d’un trop plein dans mon boulot, ni vu ni connu, j’t’embrouille). Un complot extraterrestre a donc privé les lecteurs de ces commentaires éclairés à la bougie de mon ordinateur (WTF?!?) sur quelques films, bon du coup ils ont été honteusement réduits à leur essence (ça ne se voit pas, ça ne se voit pas, ça ne se voit pas, merci Mr Coué).

On commence avec le premier jour manquant, le mercredi 23 septembre où six longs-métrages se sont accumulés devant mes yeux trop gourmands, avides de chair fraîche pelliculaire (pas dans les cheveux, sur l’écran – tais toi, matière grise à vannes débiles, tais-toi), avec par ordre d’apparition :

Sweet home de l’espagnol Rafael Martinez (3/5) : agent immobilier, Alicia croit avoir une bonne idée pour l’anniversaire de son amoureux : l’inviter dans un immeuble vétuste (volontairement, les nouveaux propriétaires cherchant à déloger leurs vieux résidents). Mais cette nuit là, trois hommes de main vont employer la manière forte et liquider le dernier locataire qui refuse obstinément de partir. Pas de bol, les témoins se font remarquer et une traque commence alors dans un huis-clos jamais marqué par ses contraintes narratives de décors, multipliant les rebondissements pas trop tirés par les cheveux. L’ouverture avec la musique délicieusement giallesque de Tolo Prats sur le générique lance bien le récit dont la tension est maintenue de bout en bout. Le réalisateur utilise les appartements vides de façon maline et l’affrontement entre des criminels aguerris et ceux qui n’ont jamais écrasé un papillon est crédible. Un adversaire plus dur à cuire fait presque glisser ce «not my» home invasion vers le fantastique par sa fonction de boogeyman inhumain. Très belle prestation de Ingrid Garcia Jonsson (La Belle jeunesse de Jaime Rosales), l’autre grande actrice espagnole du FEFFS 2015 avec Alba Ribas pour The Corpse of Anna Fritz.

GTFO (alias Get the fuck out ou Get the f&#% out en langage feutré) de Shannon Sun-Higginson (4/5). LE film le plus terrifiant de cette édition du FEFFS car terriblement vrai. La réalisatrice de ce documentaire, une plongée engagée dans le milieu des gamers, dépeint la misogynie, la haine de la femme, le mépris de l’autre sexe comme rarement car son propos est argumenté, équilibré, ne rentrant jamais dans les généralités universelles mais reposant sur des témoignages précis et mesurés, ce qui n’empêche pas la colère légitime de transparaître. Son film est né de ces images incroyables (voir ici) où une jeune gamer est clairement harcelée par le coach de son équipe devant des caméras. Il n’a peur de rien, un sentiment d’impunité coule en lui et malgré les «no means no» d’un témoin, il continue à l’agresser (le mot n’est pas trop fort) en l’insultant, en la reniflant et autres joyeusetés. Shannon Sun-Higginson interviewe des femmes qui ont été victimes mais aussi des hommes solidaires contre ces agressions dans l’univers des jeux vidéos. Les sonneurs d’alarme, surtout s’il s’agit de femmes sont menacés de viols, de meurtres, et comme le prouve la vidéo, même en dehors de l’anonymat des réseaux sociaux, certains ne se cachent pas. Heureusement certains réagissent, ce qu’enregistre ce film d’une intelligence rare dans son écriture car, oui, un documentaire, ça s’écrit, ce que beaucoup de réalisateurs ignorent. Non seulement Shannon Sun-Higginson capte un mal social mais en plus fait preuve de cinéma, non pas dans la mise en images des témoignages, techniquement sobres, mais par l’agencement de son montage.

La Mauvaise graine de Mervyn LeRoy (2/5) est l’adaptation très théâtrale d’une pièce de théâtre. Rien ne justifie la durée interminable de ce portrait d’une petite peste genre Nellie Oleson que l’on soupçonne d’avoir assassiné un enfant à qui elle venait de reprocher de lui avoir volé le prix de meilleur élève. C’est lent, très lent même. Le sujet est osé pour l’époque mais préfère se pencher sur les interrogations de la mère du monstre qui elle-même aurait un secret terrible mais lourdement amené. Le film a obtenu trois citations pour ses interprètes, la rigide Nancy Kelly en actrice principale qui énonce péniblement tous les enjeux à haute voix (l’affrontement verbal avec le père et les souvenirs qui remontent est d’un ennui mortel) et en second rôle les plus convaincantes Patty McCormack (la mauvaise graine, impressionnante, notamment dans ses échanges avec le jardinier sociopathe incarné par Henry Jones) et aussi Eileen Heckhart, bouleversante dans le rôle de la mère du petit défunt, sa meurtrissure étant prégnante. De Vera Cruz, David nous en parle aussi ici.

la mauvaise graine 01

On enchaîne avec The Guest (3,5/5), confirmation du talent d’Adam Wingard (You’re next) futur/déjà grand du cinéma avec cette variation très particulière de Théorème qui soudain dévie de façon totalement inattendue. Dan Stevens (Downton Abbey) est tout simplement extraordinaire dans ce délire fantastique sur lequel il est préférable de ne pas s’étendre sous peine, là encore, de trop en dire, même si l’on peut insister sur le charisme de son interprète principal qui passe par un sourire qui en dit long (genre, je suis sincèrement désolé, mais je dois vous tuer, vraiment je ne peux pas faire autrement, avec toutes mes excuses) et des séquences assez réjouissantes, souvent grâce à lui (les fûts de bière au ralenti). Notre reporter à Vera Cruz en parle aussi ici.

Présenté dans la case Crossovers, Uncle John de Steve Piet (3,5/5) partage avec d’autres films de la sélection le fait de n’avoir rien de fantastique mais reste néanmoins un beau drame où deux destins sont racontés en parallèle, d’un côté le personnage du titre incarné par John Ashton dans le plus beau rôle de sa carrière (il est surtout connu comme le partenaire de Judge Reinhold – Taggart – dans les deux premiers volets du Flic de Beverly Hills) alors qu’il doit gérer les conséquences d’un meurtre qu’il a commis et de l’autre son neveu qu’il a élevé alors qu’il vient de rencontrer celle qui semble être la femme de sa vie. C’est une très belle histoire que l’on découvre à l’écran, filmé avec sobriété, dans un rythme très lent mais le charme passe aussi par cette approche étonnante. Les retrouvailles des deux hommes sont tardives et se révèlent émouvantes, malgré les menaces qui se révèlent lentement.

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