Critique : L’envol

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2001

L’envol

France, Italie  : 2022
Titre original : –
Réalisation : Pietro Marcello
Scénario : Pietro Marcello, Maurizio Braucci, Maud Ameline, Geneviève Brisac, librement inspiré de «Les Voiles Écarlates» d’Alexandre Grine
Interprètes : Raphaël Thiéry, Juliette Jouan, Louis Garrel, Noémie Lvovsky
Distribution : Le Pacte
Durée : 1h40
Genre : Drame, Romance
Date de sortie : 11 janvier 2023

2.5/5

Synopsis : Quelque part dans le Nord de la France, Juliette grandit seule avec son père, Raphaël, un soldat rescapé de la Première Guerre mondiale. Passionnée par le chant et la musique, la jeune fille solitaire fait un été la rencontre d’une magicienne qui lui promet que des voiles écarlates viendront un jour l’emmener loin de son village. Juliette ne cessera jamais de croire en la prophétie.

Deux volets très différents

Revenant veuf et physiquement abimé de la Grande Guerre dans un village de la Baie de Somme, Raphaël se découvre père d’une petite Juliette dont Madame Adeline s’est occupée depuis le décès de Marie, la maman. Femme au grand cœur, Adeline accueille Raphaël dans sa ferme, au sein de la petite communauté qui s’est formée autour d’elle, une communauté de marginaux mal perçue par les habitants du village voisin qui y voient une sorte de « cour des miracles ». Raphaël va trouver sa place dans cette fermette délabrée, lui dont les mains « en or » lui permettent de travailler le bois. Par contre, le village refuse de l’adopter, au point qu’il reçoit de plein fouet des remarques du type « tu aurais mieux fait de mourir à la guerre ». Pourquoi cet ostracisme ? Ne serait-il pas lié à l’évènement se trouvant à l’origine du décès de Marie ? Malgré cet environnement malsain d’un village qui n’accepte pas la différence, malgré les brimades qu’elle subit de son côté de la part de jeunes de son âge, malgré les gamins qui, sans raison, la traitent de sorcière, Juliette, élevée par son père, grandit, grandit bien, se réfugiant dans la lecture et dans la nature, développant ses qualités artistiques, rencontrant dans la forêt une espèce de magicienne qui lui prédit une rencontre qui « l’emportera au loin sur ses voiles écarlates » !

Film féministe, film féminin sur l’émancipation d’une jeune femme, L’envol présente deux volets très différents l’un de l’autre. Le premier volet s’apparente à une chronique sociale réaliste prenant place dans le monde paysan de la première moitié du vingtième siècle et le personnage principal en est Raphaël, cet homme qui a connu les tranchées de la guerre de 14 et qui a de « l’or dans les mains ». A côté de lui, on voit grandir Juliette en s’arrêtant à 4 moments de son existence. A la mort de Raphaël, le film change complètement de registre, se rapprochant presque d’une comédie musicale à la Jacques Demy. Avec les chansons musicalement insipides que chante Juliette, avec ces images tellement belles qu’elles en deviennent trop belles, avec la rencontre faite par Juliette avec Jean, un jeune et bel aviateur qui a atterri près du village, le film quitte le réalisme social de la première partie pour glisser vers une sorte de conte qui dégage une forme de mièvrerie qu’on a parfois du mal à supporter. Heureusement, toutefois, le comportement de Juliette arrive à « sauver » cette deuxième partie : cette femme, sans doute parce qu’elle a été élevée par un homme, montre dans son comportement avec Jean combien, en tant que femme, elle est émancipée pour l’époque.

Film français de Pietro Marcello, réalisateur italien qui, il y a 3 ans, nous avait offert une adaptation très libre de Martin Eden de Jack London, L’envol a fait l’ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs lors du dernier Festival de Cannes. De nouveau, il s’agit d’une adaptation très libre d’une œuvre littéraire, la nouvelle « Les voiles écarlates » de l’écrivain russe Alexandre Grine, souvent comparé à … Jack London, une nouvelle déjà adaptée au cinéma en 1961 par le réalisateur soviétique Alexandre Ptouchko. Alors que L’envol n’est que son deuxième long métrage de fiction à sortir sur nos écrans, Pietro Marcello semble déjà dégager deux constantes : l’utilisation d’images d’archive et le désir de glisser des chansons dans ses films (des chansons qu’à titre personnel on considère malheureusement comme étant d’une grande médiocrité musicale !). La distribution permet de faire une belle découverte : celle de Juliette Jouan, l’interprète de Juliette adulte, dont c’est la première apparition à l’écran. A ses côtés, deux comédiens et deux comédiennes : Raphaël Thiéry qui impressionne dans le rôle de Raphaël et Louis Garrel qui impressionne moins dans celui de Jean ; Noémie Lvovsky qui campe le beau personnage d’Adeline et Yolande Moreau dans celui de la magicienne de la forêt.


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