Critique : L’Empire

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L’Empire

FR, 2024
Réalisateur: Bruno Dumont
Scénario : Bruno Dumont
Acteurs : Lyna Khoudri, Anamaria Vartolomei, Camille Cottin, Fabrice Luchini
Distributeur : ARP Sélection
Genre : Comédie dramatique, Science-fiction
Durée : 1h50
Date de sortie : 21 février 2024 (France)

4/5

Si le cinéma de Dumont a toujours divisé les spectateurs par la radicalité de ses propositions, il se dégage, depuis le “Petit Quinquin”, une nouvelle dimension comique dans les situations. Cette dérision trouve un formidable terrain de jeu dans cette relecture baroque de Star Wars dans le Nord-Pas-de-Calais.

Il y a clairement une complicité à créer avec le film pour pouvoir adhérer au “spectacle” d’un film qui n’a de cesse de montrer ses artifices et de volontairement faire douter le public sur ce qu’il voit. De notre côté, ce doute baroque, créant des images uniques mêlant la ruralité, l’amateurisme de ces acteurs à la diction chantante de Luchini dans une cathédrale flottante nous a réjoui.

Il y a un vrai plaisir jouissif du film à questionner, à frôler en permanence la limite du politiquement correct pour, peut-être, provoquer nos sensibilités et nous laisser définir par nous-même ce qui est drôle et ce qui est scandaleux.

La diversité des réactions de la salle après la projection est une preuve supplémentaire que le cinéma de Dumont, s’il ne donne pas de réponses claires, bouscule son public qui ne pourra pas résumer son expérience sans révéler, en même temps, ce qu’il était venu chercher.

Synopsis : Entre Ma Loute et La Vie de Jésus, entre le ciel et la terre, Bruno Dumont nous offre une vision caustique, cruelle et déjantée de La Guerre des étoiles.

Il faut reconnaître qu’il y a de la radicalité dans le geste de Dumont qui répète à outrance certains effets, ne collant pas tout à fait entre eux, jouant sur plusieurs niveaux visuels, pour bloquer toute décryptage possible d’un quelconque “projet” narratif. C’est question de goût, mais qu’il est agréable de se sentir “libre” devant un film, capable en tant que public de prendre en charge son expérience, de questionner, de regarder la réalité des acteurs du film qui, eux non-plus, n’ont aucune envie de répéter en boucle les mêmes dialogues que les films du genre recyclent à outrance ces dernières années.

L’on peut quand même déplorer à quel point cette démarche jouissive et libératrice a parfois ce côté un peu leçon de philo (pas étonnant quand on connaît le parcours de Dumont), où certains des enjeux de fiction sont racontés comme des concepts un peu “intellos” qui pourraient fatiguer, s’il n’était pas sous les yeux pétillants de Luchini où le manque de diction d’acteurs “du cru” qui ajoutent clairement une présence unique à ces moments caricaturaux.

On peut se demander aussi si c’est drôle, si on a le droit de rire. Question très intéressante de nos jours, parce qu’elle peut dépendre du climat de la salle ou de votre compagnie. D’autres n’y verront aucun humour. Nous gageons que ce spectacle les aura au moins confrontés à eux-mêmes. Il était drôle d’entendre à la sortie du film, plusieurs occurrences où des amis, comme pour se rassurer, avaient besoin de demander: “Mais ça t’as fait rire ?” “Tu n’as pas trouvé ça drôle ?”.

Enfin, c’est peut-être comme ça que l’Empire provoque un dialogue, fait naître du discours, pousse à partager. Et vous, vous en avez pensé quoi ?

Conclusion

“l’Empire” est une expérience radicale, scandaleuse, hilarante, baroque, exigeante, etc… Vous y trouverez peut-être matière à rire ou à admirer. En tout cas, vous y trouverez un point d’interrogation, un manque de réponses sur ce que vous venez chercher au cinéma. Bien qu’un peu épais à digérer d’un coup, c’est un film qui se partage, et on remercie Bruno Dumont pour ça !

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