Critique : Chorus

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Chorus

chorus afficheCanada : 2015
Titre original : –
Réalisateur : François Delisle
Scénario : François Delisle
Acteurs : Sébastien Ricard, Fanny Mallette, Geneviève Bujold
Distribution : UFO Distribution
Durée : 1h36
Genre : Drame
Date de sortie : 20 janvier 2016

3,5/5

Chorus est le 6ème long métrage du réalisateur québécois François Delisle mais c’est le premier à avoir droit à une sortie dans les salles hexagonales. D’une manière générale, les films de ce réalisateur écument les festivals et y rencontrent beaucoup de succès, mais le fait que François Delisle refuse obstinément de faire du cinéma de divertissement nuit parfois à leur acceptation par le grand public. Chorus, beau film sur le deuil, devrait toutefois permettre un bon premier contact avec le public français.

 

Synopsis : Le jour où leur fils a disparu, un après-midi après l’école, la vie d’Irène et Christophe s’est brisée. Chacun de son côté a survécu à sa façon, lui au Mexique, elle en reprenant sa carrière au sein d’une chorale. Dix ans après, un appel de la police les amène à se retrouver…

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De l’incertitude à la certitude

Suite à la disparition, dix ans auparavant, de leur fils Hugo, âgé de huit ans, le couple formé par Christophe et Irène a éclaté. Christophe est parti vivre au Mexique où il s’efforce, apparemment avec succès, d’oublier ce drame en partageant ses journées entre hamac, baignades et compagne pleine de charme. La vie d’Irène est plus austère, son occupation principale étant sa participation au sein d’une chorale spécialisée dans les polyphonies de la Renaissance. Dix ans qu’ils sont sans nouvelle d’Hugo, dix ans sans qu’ils aient pu réellement faire leur deuil. Et voilà que, depuis sa prison où il a été envoyé pour des crimes pédophiles, un homme avoue avoir enlevé Hugo, l’avoir retenu prisonnier en « jouant » régulièrement avec lui et avoir fini par l’étouffer. Très vite prévenue, Irène reprend contact avec Christophe qui vient aussitôt la retrouver.

 

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Un couple face à l’évolution de sa relation

C’est avec beaucoup de tact et de pudeur que François Delisle accompagne Irène et Christophe dans cet épisode bouleversant de leur existence, dans ces moments où la mort de leur fils est devenue tangible, où il faut réapprendre à vivre avec la certitude de cet énorme manque, ces moments où se bousculent dans tout leur être souvenirs, affliction et remords. Même s’il permet au spectateur de savoir ce qui s’est passé dix ans auparavant par le truchement des rapports de Christophe et d’Irène avec la police, ce qui intéresse surtout le réalisateur, c’est de peindre l’évolution de la relation nouvelle qui s’établit entre un homme et une femme qui se sont séparés à la suite d’un drame resté sans conclusion et qui se retrouvent face à l’inéluctable. L’incertitude les avaient laissés totalement désorientés, la certitude de la mort de leur enfant va peut-être leur permettre de retrouver les rails d‘une vie plus apaisée. Une vie dans laquelle, bien sûr, des personnages ont leur place, tel Jérôme, le père de Christophe, un homme rassurant et plein d’empathie, et Gabrielle, la mère d’Irène, une femme tout à la fois froide, aimante et intéressée par l’argent. Une vie dans laquelle apparaît Antonin, qui, dix ans auparavant, était le meilleur ami de leur fils, un jeune homme de 18 ans dont la fougue juvénile peut les aider à surmonter ce qu’ils ont vécu.

 

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Un beau travail sur l’image

Film sur la dualité homme / femme au sein d’un couple, Chorus l’est aussi au niveau de l’image par le choix fait par François Delisle de réaliser son film en noir et blanc. Un noir et blanc peu contrasté qui correspondait aux images qu’il imaginait dans sa tête lors de l’écriture du scénario, un noir et blanc qu’il a pu se « fabriquer » de A jusqu’à Z, puisque, dans ce film, il a été son propre Directeur de la photographie, s’occupant à ce titre de la lumière, du cadre et de l’étalonnage. Fanny Mallette et Sébastien Ricard, qui interprètent avec une grande intensité, parfaitement maîtrisée, les rôles d’Irène et de Christophe, ne sont pas très connus dans notre pays mais leur réputation n’est plus à faire de l’autre côté de l’Atlantique. Par contre, Geneviève Bujold, la comédienne qui joue le rôle de Gabrielle, la mère d’Irène, est apparue sur nos écrans, dans des premiers rôles, il y a 50 ans tout rond et on la retrouve toujours avec beaucoup de plaisir. Quant à Pierre Curzi, qui joue Jérôme, le père de Christophe, on le connaît bien pour l’avoir vu jouer chez Gilles Carle et, surtout, dans Le déclin de l’empire américain et Les invasions barbares de Denys Arcand. Pour finir, un petit mot sur la musique, élément important du film, au point d’avoir participé au choix de son titre : une musique qui n’est pas une musique d’accompagnement mais qui fait partie intégrante de l’action et qui satisfera aussi bien les amateurs de polyphonie de la Renaissance avec, en particulier, le motet «Osculetur me osculo oris sui » de Palestrina que ceux qui préfèrent le rock avec la prestation scénique du groupe canadien Suuns.

 

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Conclusion

On est souvent surpris lorsque arrive sur nos écrans le énième film (ici, le sixième) d’un réalisateur étranger dont aucun des films précédents n’avait trouvé sa place sur nos écrans. En tout cas, on l’est à coup sûr lorsque ce film prouve de façon indéniable les qualités du réalisateur, ce qui est le cas avec Chorus. Un réalisateur qui nous fait partager, sans aucun pathos, le quotidien d’un couple qui se retrouve après plusieurs années, face à l’épilogue du drame qui avait causé leur séparation.

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