Critique : Crazy Amy

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Crazy Amy

Etats-Unis, 2015
Titre original : Trainwreck
Réalisateur : Judd Apatow
Scénario : Amy Schumer
Acteurs : Amy Schumer, Bill Hader, Brie Larson, Colin Quinn
Distribution : Universal Pictures International
Durée : 2h05
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 18 novembre 2015

Note : 2,5/5

La provocation n’est que façade dans le nouveau film de Judd Apatow. Derrière les frasques du personnage principal, une jeune femme qui fait tout son possible pour fuir la routine amoureuse et sexuelle, se cache en effet l’attachement indéfectible du cinéma hollywoodien à une conception romantique de la vie forcément conforme au statu quo. Les nombreux écarts de conduite de Amy, qui est moins une catastrophe ambulante – comme laisserait le supposer le titre original (Trainwreck) – qu’une rebelle modérée contre les voies tout tracées d’une existence terne et respectable, ont par conséquent tendance à rester sans suite, voire de manquer de justification dramatique. Car pourquoi perdre deux heures avec ce spectacle plus ou moins iconoclaste d’un individu tiraillé entre ses nombreuses obligations auprès de son travail, sa famille et sa vie privée, si tout ce qui en ressort en fin de compte est une conclusion consensuelle et passablement sirupeuse ? Bref, si vous aimez l’humour faussement osé de l’école Apatow et de Amy Schumer, l’actrice principale qui signe également le scénario, Crazy Amy vous arrachera au moins quelques sourires. Dans le cas contraire, ce film vaudra au mieux le détour pour sa distribution pour le moins hétéroclite.

Synopsis : Depuis que ses parents ont divorcé, alors qu’elle n’avait que neuf ans, Amy n’attache plus aucune importance à la monogamie. Désormais adulte et rédactrice dans un magazine pour hommes, elle enchaîne les conquêtes éphémères, tout en mettant un point d’honneur à ne jamais revoir ses amants. Son copain de circonstance est Steven, un fanatique de la musculation à l’intelligence limitée, avec lequel elle n’envisage guère une relation stable et exclusive. Sa rédactrice en chef lui confie contre son gré un reportage sur Aaron Conners, un médecin du sport qui soigne les athlètes les plus célèbres. Amy appréhende ce travail sur un sujet qui ne l’intéresse nullement, jusqu’à ce qu’elle tombe sous le charme du chirurgien. Et si c’était lui, l’homme avec qui elle pourra enfin former un couple ordinaire ?

Plus fadasse que « badass »

Ce n’est point dans les films de Judd Apatow qu’on trouvera une représentation valorisante de la femme d’aujourd’hui. Au lieu d’être un réalisateur engagé dans une cause quelconque, serait-elle féministe, Apatow s’adonne plutôt à la moquerie puérile sur le chemin difficile vers la maturité que ses personnages empruntent avec plus ou moins de succès. De cette démarche naissent des films imprégnés d’un ton lui aussi infantilisant, qui se réjouissent superficiellement des maladresses du comportement de ces adultes immatures, plutôt que de sonder avec intelligence et finesse leurs imperfections humaines. L’absence d’un regard sophistiqué est donc le point commun de ses films, à moins que ce ne soit au contraire une observation malicieuse de la vacuité inhérente à notre époque. Aucune des femmes mises en avant dans ce film-ci ne se distingue par son raisonnement ou son action. Peu importe que ce soit le personnage principal, uniquement crade et vulgaire à la surface, sa sœur ennuyeusement proprette ou bien sa supérieure prise au piège d’un narcissisme aigu, il serait hautement exagéré de considérer l’une ou l’autre d’entre elles comme une femme forte et déterminée. Le même constat s’applique hélas à la gente masculine, peuplée ici d’hommes pas très futés ou trop fades pour réellement éveiller notre intérêt pour leur sort.

« Maris gagas et légendes vivantes »

D’ores et déjà sensiblement limité par cette palette de personnages assez médiocre, le récit ne fait pas non plus preuve d’imagination du côté des péripéties qui sont censées le rythmer. L’équilibre entre le drame et la comédie s’avère relativement bancal, surtout à cause d’une absence de hardiesse chez la mise en scène de pousser les limites de la tragédie ou du mauvais goût. La progression de l’intrigue, dépourvue de hauts et de bas notables, n’est alors ponctuée que de l’apparition parfois surprenante de comédiens que l’on ne s’attendait pas forcément de voir dans un film a priori taillé sur mesure pour les talents de sa vedette. En dehors de la valeur montante à Hollywood Brie Larson et de la très éclectique Tilda Swinton, pas vraiment employée ici à la hauteur de son talent comique, on croise le centenaire Norman Lloyd, l’éternel jeune Ezra Miller, le catcheur John Cena, ainsi que Matthew Broderick et quelques sportifs à notoriété principalement américaine dans leur propre rôle. Cette quête des apparitions surprise n’est certes pas suffisante pour rendre le film dans son ensemble palpitant. Elle sert cependant à détourner notre attention par ci, par là d’une histoire qui risquerait sinon de nous ennuyer davantage.

Conclusion

Annoncé comme une farce irrévérencieuse, Crazy Amy ne s’emploie malheureusement pas assez à cultiver son grain de folie. Il s’agit d’un film au rythme plutôt pesant, qui n’est sauvé que par la présence de quelques comédiens aux rôles savoureux, voire par son insignifiance intrinsèque dont il se réclame presque avec fierté.

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