Critique : Zouzou

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Zouzou afficheZouzou

France, 2012
Titre original : –
Réalisateur : Blandine Lenoir
Scénario : Jean-Luc Gaget, Blandine Lenoir
Acteurs : Olivier Broche, Laure Calamy, Jeanne Ferron
Distribution : Happiness Distribution
Durée : 1h25
Genre : Comédie
Date de sortie : 24 décembre 2014

Note : 3,5/5

Refaire le monde en parlant de sexualité, c’est le projet improvisé d’une sexe-agénaire, de ses trois filles et de sa petite-fille dans cette comédie allègre et rafraîchissante à ne pas manquer…

Laure Calamy, Jeanne Ferron, Sarah Grappin et Florence Muller
Laure Calamy, Jeanne Ferron, Sarah Grappin et Florence Muller

 

Synopsis : Réunion de famille à la campagne : Solange, la soixantaine, reçoit la visite de ses filles Marie, Lucie et Agathe, et la fille de cette dernière, Zouzou. À 14 ans, elle s’apprête à connaître l’amour alors que sa grand-mère va révéler à ses grandes filles qu’elle a un homme dans sa vie. Elles vont parler de sexe, un peu, beaucoup, passionnément…

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Laure Calamy, un bonheur d’actrice

Lucie, la cadette, est interprétée par Laure Calamy, un bonheur d’actrice. Elle débite ses dialogues façon mitraillette, et sa verve accompagne les dialogues piquants signés Blandine Lenoir et Jean-Luc Gaget. Elle n’est jamais vulgaire, lorsqu’elle fait une démonstration anatomique à une petite voisine, lorsqu’elle parle de vulve ou se lance dans, non pas une, mais deux plages de dialogues graphiques sur le clitoris. Un échange autour de la parité, à l’Assemblée Nationale ou dans les bus, est porté par sa gouaille communicative. Celle qui fut révélée par Un monde sans femmes de Guillaume Brac confirme qu’elle est une très grande actrice que l’on ne se lasse pas d’apercevoir, même dans des films impersonnels comme Sous les jupes des filles où elle était une superbe voleuse de scène face à Vanessa Paradis ou Un plan parfait en invitée d’un dîner où on lui racontait les amours improbables (et sans intérêt) de Danyboon et Diane Kruger. Il est tout de même préférable de la voir ici, aux côtés de ses deux sœurs de cinéma, non moins convaincantes.

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Florence Muller, l’aînée de la sororité, dans un registre plus tranquille mais elle a aussi ses grands moments dans le rôle d’Agathe, mère inquiète (et seule) de l’adolescente Zouzou. Belle même lorsqu’elle fait de bien laides grimaces ou lorsqu’elle tremble pour sa fille, elle possède elle aussi un timing comique utilisé à bon escient. Sarah Grappin surprend en touchante benjamine qui remet sa vie amoureuse en question. Lorsqu’elle se découvre un cheveu blanc, l’on se souvient de sa première apparition encore adolescente et maladroite dans son jeu (pas du tout ici où elle est parfaite, comme ses aînées) dans Le Nouveau Monde d’Alain Corneau et là on prend un coup de vieux. Leurs caractères se complètent, se répètent et s’opposent, et elles ne deviennent jamais trois faces bien huilées d’une mécanique rigide de scénario. Malgré leurs vies différentes, le scénario ne fait pas d’elle des exemples symbolisant les femmes en général (aux côtés de leur mère et de leur fille et nièce) mais les présente comme des individualités qui ne représentent qu’elles-mêmes et encore…

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Le sexe, en parler ou pas ? Et comment ?

Comme dans son court-métrage Monsieur L’abbé (où apparaissaient déjà Nanou Garcia, Florence Muller, Philippe Rebbot et la petite Elisa Lifshitz) adapté d’un recueil de courriers de paroissiens adressés à leur curé, la réalisatrice parle de sexe avec gourmandise, légèreté, curiosité, pédagogie, sans fausse pudeur, simplement, tranquillement avec humour et délicatesse et sans virer au graveleux dans lequel se sont vautrées la quasi totalité des réalisatrices de comédies (faussement) sexuées cette année. Qualité des dialogues, richesse de l’interprétation qui dénoue tout dérapage lourdingue et efficacité de la mise en scène qui adopte le bon tempo, accélérant pour la vitalité du rire, ralentissant pour quelques douces plages d’émotion entre sœurs qui s’inquiètent ensemble ou s’engueulent, c’est un sans faute pour ce délice de comédie hivernale qui réchauffe les zygomatiques.

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Ce divertissement malin (et à l’ambition modeste) évoque toutes les premières fois, sexuelles évidemment mais aussi capillaires avec cet échange entre Philippe Rebbot (très présent en salles en 2014 avec 11 longs-métrages sauf oubli et une ribambelle de courts) et Olivier Broche sur leur évocation du moment où ils ont constaté amèrement que pour eux les cheveux, c’était fini. La force de l’écriture de Lenoir & Gaget (qui a écrit plusieurs scénarios pour Solveig Anspach dont le dernier Lulu femme nue) réside dans le bel équilibre entre la dérision et la tendresse dans l’évocation du rapport à la séduction et du temps qui passe. Un peu de politique aussi, via le conseiller municipal amant de la mère, un commentaire sur la parité donc et l’évocation de l’absence de cours de sexualité à l’école, alors qu’il existe une loi qui précise que les élèves doivent recevoir trois séances par an d’informations à propos de la sexualité, ce qui n’est pas appliqué dans toutes les écoles. À signaler la prestation qui tombe de nulle part (mais plutôt drôle) de Nanou Garcia en improbable vedette américaine appelée Brenda Nelson, croisement entre Sue Ellen et Liza Minnelli (période Sex & The City 2) silençophobe. Le mot n’existe pas mais ce néologisme hideux a le mérite d’être aussi explicite que les dialogues imagés de cette pépite de fin d’année qui a reçu un Prix du public bien mérité lors du festival Cinessonne 2014.

Jeanne Ferron, Elisa Lifshitz et Sarah Grappin
Jeanne Ferron, Elisa Lifshitz et Sarah Grappin

Conclusion

Un festival de bonne humeur reposant sur son quintet de sympathiques actrices, de bons dialogues et du sexe (verbal) explicite. La parole y est libre, entre dérision et dérisoire dans cette bien légère mais énergique comédie gentiment sensuelle.

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