Critique : The Walk Rêver plus haut

0
1246

The Walk Rêver plus haut

Etats-Unis, 2015
Titre original : The Walk
Réalisateur : Robert Zemeckis
Scénario : Robert Zemeckis et Christopher Browne, d’après un livre de Philippe Petit
Acteurs : Joseph Gordon-Levitt, Charlotte Le Bon, Ben Kingsley, Clément Sibony
Distribution : Sony Pictures Releasing
Durée : 2h03
Genre : Drame
Date de sortie : 28 octobre 2015

Note : 3/5

Les rêves les plus beaux et les plus fous ne sont pas forcément américains. Car même si l’aventure incroyable du funambule Philippe Petit est étroitement liée au goût pour la démesure qui prévaut aux Etats-Unis, la nature française de ce forcené se manifeste autrement qu’à travers l’accent bancal que Joseph Gordon-Levitt emploie pour l’incarner. C’est l’esprit de la fronde et de l’arrogance qui l’anime, jumelé à un sens aigu pour la beauté du geste interdit. Ces influences à première vue irréconciliables se trouvent adroitement conjuguées dans le nouveau film de Robert Zemeckis. Le réalisateur y réussit d’une façon diablement efficace l’association entre des effets spéciaux prodigieux et cette histoire inouïe, qui avait défrayé la chronique il y a plus de quarante ans.

Synopsis : Depuis son enfance, le Français Philippe Petit est un funambule passionné. Alors qu’il gagne tant bien que mal sa vie en tant qu’artiste de rue à Paris au début des années 1970, il rêve d’un endroit exceptionnel où il pourrait tendre son fil. Par hasard, il apprend que la construction du World Trade Center va bientôt s’achever à New York. Dès lors, il fait tout son possible pour organiser une opération aussi dangereuse qu’illégale, qui consiste en une traversée spectaculaire entre ces deux tours de plus de cent étages chacune.

Vertige de la folie

Philippe Petit est fou. Il n’y a aucun doute à ce sujet. Sa folie a été encore confirmée récemment, lorsqu’il tenait en équilibre sur son menton l’Oscar remporté il y a six ans pour Le Funambule de James Marsh, le documentaire sur les mêmes événements que The Walk Rêver plus haut raconte sur le mode de la fiction. Pour mieux appréhender cet esprit singulier et le rendre accessible au spectateur, il fallait un subterfuge particulièrement habile. L’option de la narration directe, soit en voix off, soit par le biais du protagoniste perché sur la Statue de la Liberté qui s’adresse au public dans la salle afin d’évoquer ses souvenirs, n’est pas forcément celle que nous aurions choisie en premier. Elle permet cependant de découvrir une stratégie et un raisonnement implacables derrière ces manifestations de l’impensable, au fur et à mesure que Petit nous accompagne dans les préparatifs et la réalisation de son projet. Car ce qui touche surtout dans l’odyssée de ce saltimbanque, c’est qu’il poursuit son idée folle malgré et contre tout.

Les carottes sont cuites

La récompense est en effet redoutable, une fois que tous les obstacles ont été écartés du fil de fer finement tendu. Un véritable sentiment d’extase se produit alors, grâce à l’effet d’immersion complète, qui provoquera certainement une panique viscérale chez quiconque a peur du vide, ainsi qu’à l’accomplissement souverain de l’idéal imaginé par Petit. Le cheminement dramatique du récit ne s’inscrit pas tellement dans la trame classique de rudes épreuves en fin de compte couronnées de succès, mais plutôt dans celle plus engageante de l’observation incrédule d’une idée folle, qui devient une réalité plus éclatante que même les visionnaires les plus téméraires auraient pu l’anticiper. La beauté de cette acrobatie à couper le souffle se situe alors justement dans sa vacuité de sens, à moins que l’on adhère à la conviction intime que l’accomplissement d’un destin personnel justifie tous les moyens. En tout cas, telle qu’elle est représentée dans ce film de plus en plus prenant, elle rejoint comme par magie et d’une manière absolument euphorisante cet incontournable rêve américain de tous les possibles. Or, le baptême très officieux des tours jumelles entrepris par Philippe Petit résonne désormais comme un testament empreint d’une nostalgie triste, ce que l’épilogue du film ne manque pas de mentionner avec tact.

Conclusion

Accrochez-vous pour suivre cette aventure de haut vol, sortie tout droit d’une vie réelle pas si lointaine dans le temps, où l’infraction au règlement pouvait encore donner naissance aux héros ! La modernité de l’action insensée de Philippe Petit ne se retrouve certes que partiellement dans ce film à la facture assez sage. Elle transcende toutefois la forme, grâce à la détermination à peine entamée par le doute dont fait preuve le personnage principal. Souhaitons néanmoins à The Walk Rêver plus haut un parcours au moins aussi éclatant que la traversée matinale en août 1974, même si le sujet ne paraît hélas pas mobiliser les foules, comme le laissent supposer l’engouement jusqu’à présent très modéré de la part du public américain et la sortie du documentaire précité exclusivement en vidéo en France.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici