Test DVD : Chacun pour tous

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Chacun pour tous

 
France : 2018
Titre original : –
Réalisation : Vianney Lebasque
Scénario : Vianney Lebasque, Frank Bellocq
Acteurs : Ahmed Sylla, Jean-Pierre Darroussin, Olivier Barthelemy
Éditeur : M6 Vidéo
Durée : 1h30
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie cinéma : 31 octobre 2018
Date de sortie DVD : 20 mars 2019

 

Martin, coach de l’équipe française de basketteurs déficients mentaux, est au pied du mur. En pleine préparation des Jeux Paralympiques, ses meilleurs joueurs viennent de le laisser tomber. Refusant de perdre la subvention qui est vitale pour sa fédération, il décide de tricher pour participer coûte que coûte à la compétition. Il complète son effectif par des joueurs valides, dont Stan et Pippo, deux trentenaires désœuvrés. Même Julia, la psychologue de la fédération, ne s’aperçoit pas de la supercherie. En s’envolant pour Sydney, Martin est loin d’imaginer le mélange explosif qu’il vient de créer…

 


 

Le film

[4/5]

Alors que la France traverse depuis quelques mois une période de troubles sociaux avec la crise des « gilets jaunes » poussant une partie de la population en situation de précarité à descendre dans la rue tous les week-ends, il parait difficile de trouver un film d’avantage dans l’air du temps que Chacun pour tous. Car même si, paradoxalement, la trame du film de Vianney Lebasque prend place durant l’année 2000, et propose une version romancée de faits réels ayant incriminé l’équipe paralympique espagnole de basket aux jeux olympiques de Sydney, la façon dont le cinéaste et ses coscénaristes parviennent à replacer une série de préoccupations sociales tout à fait contemporaines au cœur de leur sujet s’avère tout simplement remarquable.

Ainsi, Chacun pour tous mettra en scène une série d’individus se faisant passer pour des déficients mentaux afin d’accéder aux J.O. Habile, le scénario du film ne se permet jamais de juger les protagonistes de cette « escroquerie » : s’ils ont choisi d’accepter ce mensonge, ce sont bien pour des raisons de pure violence sociale, la société ne leur permettant pas de joindre les deux bouts et de vivre dans la dignité. « Mieux vaut être un salaud qu’un pauvre » sera donc le leitmotiv de leurs justifications et si, bien sûr, les implications morales se cachant derrière cette embrouille sont nombreuses, tout n’est pas tout noir ni tout blanc. Difficile par exemple de déterminer un handicap sur une simple question de chiffres, ou de définir une limite au handicap mental : comme le souligne Jean-Pierre Darroussin durant le film, un individu affichant un Q.I de 73 n’est pas officiellement reconnu comme déficient, mais dans les faits, quelle différence cela fait-il ? Dans la réalité, après le scandale des jeux de Sydney, le Comité international paralympique a par ailleurs considéré qu’il était trop difficile de déterminer le niveau de handicap des athlètes déficients intellectuels, et exclu les handicapés mentaux aux Jeux paralympiques d’Athènes en 2004.

Cette question du niveau de handicap a le mérite d’être soulevée par le film, de la même façon que Chacun pour tous mettra au final tout un chacun devant ses propres limites morales : qu’auriez-vous donc fait à la place de ces joueurs aux fins de mois difficiles ? Tout ne se résume malheureusement pas à de simples questions de principes moraux… Le contexte tient une place importante dans ce choix, et il est impossible de classer péremptoirement ces personnages comme de simples « salauds ». C’est d’autant plus flagrant ici qu’en développant une tendresse infinie pour ses personnages, qu’ils soient déficients mentaux ou pas, Chacun pour tous soulève la question de l’implication dans cette supercherie, et présentera ces laissés pour compte du système surtout comme un groupe d’individus ayant fait une erreur, un mauvais choix à un moment donné de leur vie. Un moment où, acculés, ils ne parvenaient à entrevoir la lumière au bout du tunnel. Le fait d’intégrer l’équipe était donc pour eux une façon, certes pas reluisante, de se « sortir de la merde »… Leurs doutes néanmoins apparaissent bel et bien au cœur du film, qui au final s’impose comme un hymne assez vibrant à la différence, et évite d’une façon très habile le recours au pathos qui aurait pu survenir dans la dernière partie du métrage : en évitant, par exemple, de montrer la victoire de manière frontale, ou de mettre en scène les aveux de Darroussin face à la presse dans la dernière séquence du film. De la même façon, les acteurs font tous preuve d’une belle sincérité, et s’avèrent tous convaincants, jusque dans leurs failles – on salue donc bien bas les prestations vraiment habitées d’Ahmed Sylla, Olivier Barthélémy, Camélia Jordana et, bien sûr, du toujours excellent Jean-Pierre Darroussin.

Par association d’idées, on ne pourra s’empêcher de supposer que ce mélange d’humour et de charge sociale assez forte est une des marques de fabrique de Frank Bellocq, qui apparaît dans le film en tant qu’acteur mais est également crédité au générique en tant que co-scénariste. En effet, Bellocq est surtout connu du public pour avoir incarné durant de longues années le personnage de Franki Ki, journaliste frappadingue officiant régulièrement au sein des équipes de Groland, émission connue pour son mélange d’humour et de prises de position sociales très marquées.

En deux mots comme en cent, Chacun pour tous s’impose comme une très belle réussite, et comme une espèce de pendant français à Champions (Javier Fesser, 2018), gros succès récent du cinéma espagnol, qui mettait en scène une équipe de déficients mentaux jouant au basket. Dommage cependant qu’avec seulement 280.000 entrées enregistrées en France l’automne dernier, le film de Vianney Lebasque ne soit pas parvenu à faire son trou au box-office : on espère sincèrement que le DVD édité par M6 Vidéo permettra au film de trouver son public – il le mérite vraiment !

 

 

Le DVD

[4/5]

Niveau transfert, le DVD de Chacun pour tous proposé par M6 Vidéo est littéralement impeccable : format Scope 2.35 respecté, beau piqué, encodage sans problème… Les couleurs sont globalement très agréables, même si bien sûr, limites du support obligent, les aplats de couleur unie et les quelques séquences nocturnes ont par moments tendance à afficher un léger bruit vidéo. Mais d’une façon générale, les limites techniques du format semblent cela dit avoir été habilement contournées en ce qui concerne la définition et le piqué, qui nous réservent par moments de bien agréables surprises. Côté son, la version française est encodée en Dolby Digital 5.1, et propose un mixage très sobre, mais indéniablement efficace durant les séquences de matchs ou de fêtes, habilement spatialisées.

Côté suppléments, on trouvera uniquement la traditionnelle bande-annonce du film.

 

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