Test Blu-ray : Cul-de-sac

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Cul-de-sac

Royaume-Uni : 1966
Titre original : –
Réalisation : Roman Polanski
Scénario : Roman Polanski, Gérard Brach
Acteurs : Donald Pleasence, Françoise Dorléac, Lionel Stander
Éditeur : Carlotta Films
Durée : 1h52
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 2 décembre 1966
Date de sortie Blu-ray : 5 mai 2021

Richard, gangster en cavale, et son acolyte Albert, qui est mourant, trouvent refuge dans un château irlandais. Richard ne tarde pas à semer le trouble au sein du couple étrange que forment la jeune et belle Teresa et George, un homme plus âgé qui vient de vendre son usine…

Le film

[4,5/5]

Difficile de mettre Cul-de-sac dans une « case » prédéfinie. Si le film met en scène des gangsters, on n’est pas pour autant en présence d’un véritable polar. Certains passages sont assez sombres, le film de Roman Polanski tend vraiment vers la comédie, dont la théâtralisation délibérée et les relents absurdes ne manqueront pas d’évoquer Samuel Beckett – une idée renforcée par le fait que les protagonistes du récit passent quasiment tout le film à attendre l’hypothétique arrivée d’un autre personnage, nommé non pas Godot, mais Katelbach.

Or, Katelbach n’arrive pas, et la poignée de personnages réunis par Polanski dans le vieux château isolé en bord de mer servant de décor au film devront donc s’efforcer de cohabiter, tout en composant avec les autres personnages débarquant occasionnellement dans le champ. Le résultat est un jeu de massacre absolument réjouissant, préfigurant avec une vingtaine d’années d’avance certains des films mis en scène par les frères Coen dans les années 80/90.

Irrésistiblement drôle, mais également joliment poétique – on pense à ces séquences mettant en scène la marée – Cul-de-sac mélange les éléments familiers du spectateur, piochant dans le Film Noir, le thriller ou le slapstick, et place deux gangsters à la petite semaine face au névrosé George (Donald Pleasence), récemment marié à Teresa (Françoise Dorléac), beaucoup plus jeune que lui. L’arrivée des deux truands, Richard (Lionel Stander) et Albie (Jack MacGowran), va forcément perturber l’harmonie apparente dans le couple. En effet, frustrée par la situation, Teresa va donc peu à peu exhorter George à se rebeller et à affronter Richard, puis se décidera à prendre les choses en main par elle-même…

La raison d’être de Cul-de-sac n’est ni la critique sociale ou la satire de mœurs. Bien sûr, le film de Polanski brocarde par ci par là l’hypocrisie bourgeoise, et la façon dont certains couples riches éduquent leurs enfants – on pense par exemple à ce sacré sale gosse d’Horace, incarné par Trevor Delaney.

Mais le vrai plaisir du cinéaste se situe vraiment dans la méchanceté vis à vis de ses personnages, et dans l’explosion sadomasochiste du couple au centre du film. Les frustrations et les défauts de ses protagonistes seront peu à peu mises à jour, et chacun se laissera aller à des révélations qui ouvriront chez eux un certain nombre de blessures.

Et le chaos prendra donc finalement le dessus, pour le plus grand plaisir du spectateur, dans le sens où le tout est littéralement transcendé par la mise en scène de Roman Polanski – qui s’offre notamment un extraordinaire plan-séquence de plus de sept minutes – et par la photographie absolument somptueuse de Gilbert Taylor, déjà à l’œuvre l’année précédente sur Répulsion. Du côté des acteurs, on notera que la regrettée Françoise Dorléac (1942-1967) succédait à sa sœur Catherine Deneuve devant la caméra de Polanski. A découvrir.

Le Blu-ray

[4,5/5]

Après des années d’attente, Cul-de-sac débarque enfin en France en Blu-ray, grâce au talent des équipes de Carlotta Films. Oubliez l’horrible édition Filmédia de 2012 : le film de Roman Polanski est ici enfin traité avec le respect et la considération que méritait cette œuvre unique et singulière. Le nouveau master restauré s’avère en effet assez impressionnant, affichant un piqué solide, un grain parfaitement respecté et un niveau de détail exceptionnel. Le noir et blanc est sublime, et la définition ne faiblit jamais, même pendant les séquences nocturnes ou en basse lumière. Les contrastes sont francs, les noirs sont profonds, et la variété des gris et des blancs est douce et naturelle. Côté son, VF et VO sont encodées en DTS-HD Master Audio 1.0, dans des mixages clairs et propres. Tous deux s’avèrent également relativement bien équilibrés, même durant les séquences où plusieurs personnes s’expriment en même temps.

Du côté des suppléments, on commencera avec un making of rétrospectif (24 minutes). Roman Polanski, accompagné par son directeur photo Gilbert Taylor et de ses producteurs Gene Gutowski et Tony Tenser, y évoquera la préparation du film, ainsi que les différents problèmes rencontrés sur le tournage de Cul-de-sac. Informatif et amusant ! On continuera ensuite avec la (re)découverte de trois courts-métrages réalisés par Roman Polanski (en HD et VOST) : il s’agit de Quand les anges tombent (1959, 22 minutes), Le gros et le maigre (1961, 15 minutes) et Les mammifères (1962, 11 minutes). Enfin, on terminera avec la traditionnelle bande-annonce.

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