Spirit Award 2016 : le triomphe de Spotlight

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spirit spotlight 2016

Tom McCarthy avait certainement rêvé voici quelques mois un tel succès aux Oscars mais la compétition de The Big Short – le casse du siècle dans un registre voisin et de The Revenant et Mad Max : Fury Road dans un style bien différent semble avoir raison de ses ambitions, à vérifier cette nuit pour la 88ème cérémonie des Academy Awards. En attendant, il peut se réjouir des quatre Spirit obtenus pour son film Spotlight, inspiré de l’enquête de journalistes de Boston pour prouver la complicité des autorités de l’église dans les actes de pédophilie de nombreux prêtres. Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario et prix Robert Altman pour sa distribution.

En tête des nominations, on retrouvait Carol de Todd Haynes qui se contente du beau prix de la photo pour le grand Ed Lachman, 67 ans, à qui l’on doit notamment les images de La Soufrière de Werner Herzog, Nick’s Movie de Wim Wenders, Recherche Susan désespérément de Susan Seidelman, L’Anglais et Erin Brockovich de Steven Soderbergh, Virgin Suicides de Sofia Coppola, Ken Park de Larry Clark, The Last Show de Robert Altman et plusieurs films pour l’autrichien Ulrich Seidl : Import/Export et la trilogie Paradis. Il est nommé pour la deuxième fois seulement aux Oscars pour le même film malgré son pedigree. C’est un homme affaibli qui est monté sur scène mais d’une grande élégance dans les propos qu’il tient sur la vision du réalisateur qu’il tient à honorer, sur les comédiennes qu’il a filmées (Cate Blanchett, Rooney Mara) et ses autres collaborateurs sur le tournage. Un vrai grand artiste honoré pour la deuxième fois ici après Loin du paradis.

Signalons au passage que Todd Haynes a été nommé en tant que réalisateur pour TOUS ses longs-métrages aux Spirit, dès le premier, Poison, et l’a remporté pour Loin du paradis en 2003. Pour rappel, ses autres films sont Safe (avec Julianne Moore), Velvet Goldmine et I’m Not There avec déjà Cate Blanchett dans le rôle de Bob Dylan. Nommé cinq fois, Beasts of No Nation surprend avec deux Spirit Awards, le premier était plus attendu, celui du second rôle pour Idris Elba, le second moins, le jeune acteur Abraham Attah, neuf ans, pour sa première apparition à l’écran. Un drame sur les enfants soldats, diffusé sur Netflix uniquement en France, ce qui minimise sa visibilité chez nous.

Première actrice transsexuelle à remporter un trophée majeur, Mia Taylor pour Tangerine, a admis en recevant son prix s’être dit, quand le réalisateur l’a prévenue qu’il allait tourner avec un iphone, que «ma première pensée était que ce film allait être de la merde». Heureusement pour elle, il n’en fut rien, et si je ne partage pas l’enthousiasme des nombreux spectateurs, il est néanmoins d’un niveau qualitatif correct (donc, pas de l’enthousiasme en effet…). On admirera l’américanitude extrême de l’actrice qui remercie «avant tout, vous savez, quoi…» Dieu juste après avoir remercié son compagnon…

Parmi les lauréats, des noms malheureux ailleurs dont quelques absents des oscars dont Carol et Elba donc, qui peut nourrir quelques regrets après avoir déjà remporté le Screen Actors Guild Award dans la même catégorie). Deux films français, Bande de filles de Céline Sciamma et Mustang de Deniz Gamze Ergüven, ont été battus par le favori des Oscars, Le Fils de Saul de Laszlo Nemes. Marielle Heller reçoit le Spirit du premier film après son échec au premier DGA du premier film, battue avec Nemes par Alex Garland pour Ex Machina. Seuls Brie Larson et le duo de scénaristes de Spotlight sont à peu près assurés de remporter le doublé aux Oscars.

Enfin, signalons la victoire de Krisha, belle surprise de la sélection 2015 de la Semaine de la Critique, récompensé par le prix John Cassavetes, un film tourné pour moins de 500 000 dollars avec en tête d’affiche une femme de soixante ans «sous influence», le réalisateur assumant son héritage cassavetien. Le film a été tourné en moins de neuf jours dans la maison des parents du réalisateur. Il succède notamment au Projet Blair Witch de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez, Personal Velocity de Rebecca Miller, The Station Agent de Tom McCarthy, Humpday de Lynn Shelton ou Middle of Nowhere de Ava DuVernay.

Le palmarès complet

  • Meilleur film : Spotlight produit par Blye Pagon Faust, Steve Golin, Nicole Rocklin et Michael Sugar

  • Meilleur réalisateur : Tom McCarthy – Spotlight

  • Meilleure actrice : Brie Larson dans Room

  • Meilleur acteur : Abraham Attah dans Beasts of no nation

  • Meilleure actrice dans un second rôle : Mya Taylor dans Tangerine

  • Meilleur acteur dans un second rôle : Idris Elba dans Beasts of no nation

  • Meilleur scénario : Spotlight – Tom McCarthy et Josh Singer

  • Meilleure photo : Ed Lachman – Carol

  • Meilleur montage : Tom McArdle – Spotlight

  • Meilleur film étranger : Le Fils de Saul de Laszlo Nemes (Hongrie)

  • Meilleur documentaire : The Look of silence de Joshua Oppenheimer

  • Meilleur premier film : The Diary of a Teenage Girl de Marielle Heller

  • Meilleur premier scenario : Room – Emma Donoghue, d’après son roman

  • John Cassavetes Award : Krisha de Trey Edward Shults

  • Prix Robert Altman pour Spotlight, remis au réalisateur Tom McCarthy, à ses directeurs de casting Kerry Barden et Paul Schnee et à sa troupe d’acteurs Billy Crudup, Brian d’Arcy James, Paul Guilfoyle, Neal Huff, Michael Keaton, Rachel McAdams, Mark Ruffalo, Liev Schreiber, Jamey Sheridan, John Slattery, Stanley Tucci et Michael Cyril Creighton

spirit 2016 Saturday Night Live star Kate McKinnon and Silicon Valley Kumail Nanjiani

Dans le discours d’ouverture plutôt drôle et carré (avec les références obligées et convenues aux #OscarsSoWhite), l’humoriste Kate McKinnon (Saturday Night Live et bientôt le S.O.S. Fantômes au féminin), animatrice de la soirée, signale notamment la présence de David Robert Mitchell (It follows), qu’elle a remercié d’avoir fait ce film qui «m’a tellement foutu les jetons que je ne n’ai pas pu coucher avec des inconnus pendant plusieurs jours». Son co-animateur Kumail Nanjiani (la série Silicon Valley) a lui salué celle du film suédois Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence dont le titre est nommé pour «le pire montage». Et ils ont souligné le thème récurrent des nommés (voir Spotlight, Beasts…, Room…) allant des violences contre les enfants à encore plus de violence contre les enfants. L’intégralité de leur présentation est ici ci-dessous, on vous épargne les parodies de Carol et Room, plus bof bof que ratées. J’ai quand même peur pour le S.O.S. Fantômes de Paul Feig.

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