Revu sur Warner Bros. TV : Fusion The Core

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© 2003 Rob McEwan / David Foster Productions / Paramount Pictures France Tous droits réservés

A quand la prochaine renaissance du genre coriace du film catastrophe ? Depuis leur décennie faste dans les années 1970, ces aventures riches en péripéties apocalyptiques pointent en effet leur nez à intervalles réguliers sur les écrans du monde entier. Chaque fois qu’une échéance à forte valeur pessimiste approche, les producteurs essentiellement américains se font un malin plaisir de mettre en état de panique le microcosme de plus en plus vaste qu’ils rêvent de voir péricliter. Car si, auparavant, il suffisait de faire sombrer un bateau de croisière ou de mettre en péril les occupants d’un avion, la surenchère de l’horreur, à l’œuvre un peu partout dans le cinéma populaire contemporain, oblige les scénaristes de chercher des prémisses de plus en plus spectaculaires. Jusqu’à l’infarctus de la crédulité auprès de spectateurs pas non plus prêts à accepter n’importe quelle idée farfelue … !

Fusion The Core, en ce moment disponible sur le replay de Warner Bros. TV – alors qu’il a été produit et distribué par la Paramount, étrange ! – , était arrivé un peu en retardataire par rapport à toutes ces épopées de l’improbable, qui avaient pullulé autour du tournant du siècle. A l’époque, on l’avait perçu comme le film de trop, celui qui ne fait que recycler sans inspiration particulière les recettes éprouvées de ses nombreux prédécesseurs. Et si ce constat est toujours valable aujourd’hui, il n’en demeure pas moins un divertissement plus qu’acceptable. Assez crétin et complètement improbable, certes, mais en même temps presque attachant dans son empressement d’inclure l’essentiel des poncifs qui avaient autrefois rendu son genre si jouissif. A condition de ne pas le prendre une seule seconde au sérieux, le film de Jon Amiel – un réalisateur qu’on a la fâcheuse habitude de confondre avec Jon Avnet, alors que sa filmographie est plus solide que celle de ce dernier – tient donc encore plutôt la route, à la fois comme l’exemple à ne pas suivre et en tant que condensé de tout ce qui nous fait tant aimer les films catastrophe.

© 2003 Rob McEwan / David Foster Productions / Paramount Pictures France Tous droits réservés

La science qui vole au secours des autorités, impuissantes face à des événements inexplicables : quoi de plus classique au cinéma, voire dans une certaine mesure dans un contexte sanitaire hautement tendu, duquel on ne saura s’extraire, peut-être, qu’à condition d’écouter plus les spécialistes du monde médical que les politiciens et notre propre propension au confort ? Toutefois, Fusion The Core va quand même très loin dans la quête du grand n’importe quoi. Des pacemakers qui s’arrêtent comme par miracle. Des oiseaux qui n’ont pas été aussi bien dressés que ceux de Hitchcock. Sans oublier bien sûr l’explosion en règle des lieux emblématiques du monde occidental, cette fois-ci les édifices antiques de Rome et le pont Golden Gate à San Francisco. Non, franchement, on n’échappe décidément pas aux clichés les plus prévisibles, accumulés ici avec une obstination qui forcerait presque le respect.

Les héros potentiels pour remettre en ordre ce chaos, pourtant filmé avec une efficacité toute relative, ne font pas davantage preuve d’originalité. A ce moment-là aux débuts d’une carrière prometteuse qui n’est en fin de compte allée nulle part, Aaron Eckhart campe le rôle du professeur valeureux, conscient des dangers du dérèglement avant tout le monde, quoique incapable de se faire entendre. Il est assisté par un Tchéky Karyo plutôt sobre, le Français type d’une certaine manière, qui s’acharne sur les distributeurs de boissons en panne et qui ramène un dessin fait par ses enfants à l’endroit le plus reculé de la planète. Stanley Tucci et Delroy Lindo complètent ce carré scientifique, le premier flamboyant et vaniteux, le deuxième aigri et asocial, tous les deux engagés dans une guéguerre qui fait partie des éléments les plus enfantins de l’intrigue.

© 2003 Rob McEwan / David Foster Productions / Paramount Pictures France Tous droits réservés

Elle aussi devait cultiver à l’époque des rêves de grandeur cinématographique, qui se sont révélés à long terme aussi illusoires que ceux d’Eckhart. Hilary Swank est investie de presque toute la responsabilité féminine du récit. A l’exception de Alfre Woodard, cantonnée à l’emploi caricatural de chef de mission resté dans les bureaux de la NASA, d’où elle peut curieusement communiquer avec un vaisseau enfoui en profondeur dans la terre et accessoirement se prendre le chou avec Richard Jenkins en général pas entièrement méchant. Près de vingt ans avant de partir en sens inverse, vers Mars dans la récente mini-série Netflix « Away » aussi peu couronnée de succès que ce film-ci, Swank persiste et signe dans le registre des femmes fortes à qui tout réussit. Vraiment tout ? Son personnage ne se montre en fait pas plus nuancé que ceux de ses co-équipiers, tous réunis dans une aventure qui se veut un mélange entre Jules Verne et une esthétique plus moderne.

Malgré le divertissement tout à fait abracadabrant que constitue le film, il peine à se démarquer de quelque manière que ce soit, d’être autre chose que la somme molle des ingrédients qu’il a accumulés consciencieusement pendant deux heures. Ainsi, notre faible pour ce genre de production sans âme, mais avec beaucoup de volonté forcée pour en acquérir une, aussi artificielle soit-elle, n’ira pas jusqu’à lui pardonner toutes ses invraisemblances, ni sa grandiloquence théâtrale, quand l’heure est venue de se séparer, l’un après l’autre, des explorateurs terriens sans peur. C’est en somme un indiscutable plaisir coupable, apprécié plus pour ses nombreuses faiblesses que pour ses rares qualités !

© 2003 Rob McEwan / David Foster Productions / Paramount Pictures France Tous droits réservés

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