Critique : Macbeth (Justin Kurzel)

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Macbeth

Royaume-Uni, 2015
Titre original : Macbeth
Réalisateur : Justin Kurzel
Scénario : Jacob Koskoff, Michael Lesslie et Todd Louiso, d’après la pièce de William Shakespeare
Acteurs : Michael Fassbender, Marion Cotillard, David Thewlis, Paddy Considine
Distribution : Studiocanal
Durée : 1h53
Genre : Drame
Date de sortie : 18 novembre 2015

Note : 2,5/5

La longévité de l’œuvre de William Shakespeare est avant tout due à l’aisance avec laquelle sa plume traverse les genres, maîtrisant toujours parfaitement la langue anglaise. Dans la plupart des cas, ses pièces peuvent être adaptées en des films passionnants, comme l’ont prouvé à maintes reprises ses deux disciples principaux Laurence Olivier et Kenneth Branagh. Cependant, la dernière époque faste de l’engouement pour Shakespeare au cinéma remonte aux années 1990, avec seulement quelques tentatives moyennement convaincantes depuis, comme le Beaucoup de bruit pour rien de Joss Whedon sorti il y a près de deux ans. Cette nouvelle adaptation de Macbeth ne risque guère de changer la donne. Les intrigues machiavéliques qui rythment cette lutte acharnée pour le pouvoir nous paraissent même assez peu propices au transfert sur grand écran. Car aucune des versions précédentes, qu’elle soit de Orson Welles ou de Roman Polanski, ne compte parmi les pièces maîtresses de la filmographie de l’auteur. Celle de Justin Kurzel devrait même passer inaperçu, tellement elle ne nous a inspiré que de l’indifférence, face à un spectacle aussi creux que tonitruant.

Synopsis : L’Ecosse est au bord de la guerre civile. Le comte Macbeth, fidèle au roi tandis que d’autres aristocrates cèdent à la trahison, vient de remporter une bataille importante. Trois oracles lui annoncent alors qu’il montera un jour sur le trône. Passablement séduit par cette prophétie, Macbeth en fait part à son épouse, qui élabore tout de suite un plan pour accélérer l’ascension de son mari au pouvoir. Quand le roi fait escale dans le village de Macbeth, ce dernier commet le régicide et accuse le prince héritier du crime. Désormais souverain, Macbeth ne pourra pas jouir longtemps de son statut, à cause de la rivalité croissante des autres comtes.

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Macbeth ne s’avère impressionnant qu’au tout début. Sur les hautes plaines de l’Ecosse, sur fond d’une musique lourde et intense, le clan du protagoniste se livre une bataille féroce contre ses adversaires. Le sang gicle, le son percute : nous sommes au cœur d’un affrontement viscéral, exécuté selon le cahier de charges d’un film d’action contemporain. Hélas, l’effet d’immersion est rapidement anéanti par le choix fort discutable de la réalisation de laisser alterner des plans vigoureux avec des ralentis horriblement pompeux. Pareille incongruité esthétique ne se reproduira certes pas, mais elle donne une idée de la désinvolture formelle, en fin de compte très frustrante, avec laquelle le réalisateur aborde son sujet. Il manque ainsi une ligne narrative claire au récit, capable d’insuffler un sens d’urgence aux répliques anciennes. Celles-ci ont beau respecter le texte de Shakespeare, par leur intonation archaïque elles instaurent une barrière supplémentaire entre le spectateur et les stratagèmes malveillants à la cour du roi illégitime.

Machiavel mou du genou

De la même façon, les acteurs – Michael Fassbender, Marion Cotillard et David Thewlis en tête – ne font que déclamer leur texte, sans que ces paroles lourdes de sens ne confèrent la moindre vérité universelle à leurs personnages. A la limite, les costumes somptueux créés par Jacqueline Durran expriment davantage l’âme torturée des intrigants que leurs changements d’allégeance venus de nulle part. L’histoire amplement connue de Macbeth et de sa soif du pouvoir qui mène à la déchéance n’acquiert ici à aucun moment un rythme organique. Le maelstrom de l’ambition démesurée qui avait su, tant soit peu, galvaniser et assombrir le récit des meilleures versions précédentes ne s’apparente ici qu’à un piètre ruisseau de doutes et de reproches. Le destin tragique du roi malheureux nous importe par contre peu, exténués que nous sommes d’ores et déjà lorsque l’affrontement final, excessivement long et prétentieux, lui donne, ainsi qu’à ce film très peu engageant, le coup de grâce.

Conclusion

L’histoire de Macbeth ne compte certes pas parmi nos pièces préférées de Shakespeare. Il nous semble néanmoins possible d’en tirer un film moins affecté et vain que celui-ci. A moins que la volonté de Justin Kurzel ait justement été de vider l’intrigue de toute sa force vitale, afin d’en faire une source redoutable d’ennui.

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