La rentrée de la Cinémathèque Française

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Au programme de cette rentrée de septembre 2014 : en parallèle du quarantième anniversaire du Festival de Deauville, un hommage au cinéma américain avec les 19 Grands prix du Festival depuis la création du prix en 1995 et une rétrospective autour de 40 ans de cinéma américain (du 3/9 au 23/10) ainsi que des rétrospectives consacrées aux réalisateurs américain John McTiernan (du 10 au 28 septembre, en sa présence, avec une master class le samedi 13 septembre couplée avec le film Predator – c’est déjà presque complet, mais de nouvelles places seront mises en vente à partir du 6 septembre à midi -), italien Sergio Leone (3-20/9) et français Guy Gilles (24/9 – 5/10), un artiste fragile à redécouvrir.

cinematheque cinema US

Les Grands Prix du Festival de Deauville

Parmi les films primés à Deauville, il est conseillé de découvrir les films rares, quelle qu’en soit la qualité (cela reste une affaire de goût) à commencer par les inédits en salles What Alice found d’A. Dean Bell (2003) et The Messenger d’Oren Moverman (2009) qui auront droit à cette rare présentation en salles en France. À voir encore, les méconnus The Dead girl de Karen Moncrieff, beau drame noir avec la regrettée Brittany Murphy (mais aussi Toni Collette et Rose Byrne), la comédie musicale culte (mais peu vue) Hedwig and the angry inch de John Cameron Mitchell, la comédie dramatique Et plus si affinités de Brad Anderson avec l’attachant bougon Victor Argo disparu alors qu’il commençait à trouver des rôles de premier plan après des seconds rôles marquants (le policier déterminé de The King of New-York d’Abel Ferrara), Girlfight de Karyn Kusama qui révéla Michelle Rodriguez, force de la nature qui n’a clairement pas la carrière qu’elle mérite, The Visitor de Thomas McCarthy qui a offert à Richard Jenkins son plus beau rôle.

Hedwig and the Angry Inch
Hedwig and the Angry Inch
Little Miss Sunshine
Little Miss Sunshine

Little Miss Sunshine de Jonathan Dayton et Valerie Faris reste l’un des Grands Prix les plus mémorables de Deauville, avec en point d’orgue la chorégraphie d’Abigail Breslin sur Super Freak de Rick James. Une belle distribution, une belle émotion, de l’humour et un vrai plaisir à chaque vision notamment grâce à la belle performance de Steve Carell qui affichait pour la première fois un talent dramatique. En seconds rôles à peine présents, on aperçoit Bryan Cranston (l’agent fuyant de Greg Kinnear, le père de famille) et Dean Norris (le motard de la police) qui seront plus tard réunis dans la série Breaking Bad, Wallace Langham (le laborantin maniéré des Experts) ou Mary Lynn Rajskub (24 heures chrono) qui s’enthousiasme lorsqu’elle constate la dérive du concours des mini-miss.

Les deux autres meilleurs films (et de loin) de la collection, Dans la peau de John Malkovich de Spike Jonze et Take Shelter de Jeff Nichols, sont hélas présentés en DCP. Également recommandables : Ca tourne à Manhattan de Tom DiCillo, Long way home de Peter Sollett, Sunday de Jonathan Nossiter et le lauréat 2013 Night Moves de Kelly Reichardt. En route vers Manhattan de Greg Mottola et Maria pleine de grâce de Joshua Marston sont moins précieux, et si les Grands Prix sont en général au minimum recommandables, on peut aisément se passer de voir ou revoir Les Bêtes du sud sauvage de Benh Zeitlin, Collision de Paul Haggis et Mother and child de Rodrigo García qui ressemblent à des erreurs de casting.

Mulholland Drive
Mulholland Drive

40 ans de cinéma américain

Ensuite, 39,5 films (l’excellent diptyque Che de Soderbergh est présenté en deux parties) pour honorer 40 ans de cinéma américain avec des chefs d’oeuvre incontestables comme Annie Hall, Crimes et délits et Match point de Woody Allen, le film de guerre âpre The Big red one de Samuel Fuller, Ed Wood de Tim Burton, l’un des meilleurs films de son auteur, Mulholland drive de David Lynch (en 35mm pour la dernière fois ?), l’angoissant Silence des agneaux de Jonathan Demme, Stranger than paradise de Jim Jarmusch, le musical parfait Victor Victoria de Blake Edwards avec la toujours magique Julia Andrews et le grand film noir Le Prince de New York de Sidney Lumet et sa lutte anti-corruption avec Treat Williams dans l’une de ses meilleures performances.

Le Silence des agneaux
Le Silence des agneaux
Victor Victoria
Victor Victoria

Avec aussi des perles connues mais pas forcément reconnues à leur juste valeur : Body Snatchers d’Abel Ferrara, l’un des films les plus singulièrement terrifiants de ces dernières années, le troublant Birth de Jonathan Glazer qui prend un cachet tout particulier avec la sortie récente de Under the skin, Boulevard de la mort de Quentin Tarantino qui a déçu lors de sa sortie et ne cesse de prendre de la valeur avec le temps, le frappadingue Disjoncté de et avec Ben Stiller avec un inquiétant Jim Carrey, Volte face de John Woo avec l’étonnante inversion de visages entre John Travolta et Nicolas Cage et Mad dog and Glory de John McNaughton qui montre une part sombre de Bill Murray et une part fragile de Robert De Niro qui se disputent Uma Thurman.

Volte Face
Volte Face
Boulevard de la mort
Boulevard de la mort

Plus anecdotiques peut-être, même s’ils méritent, au moins pour certains, une nouvelle vision : Bird et J. Edgar qui ne sont pas les meilleures réalisations de Clint Eastwood, L’Enfer du devoir de William Friedkin, Hostel d’Eli Roth (moins pertinent que sa suite), Jardins de pierre de Francis Ford Coppola, Jungle fever de Spike Lee, Les Lois de l’attraction de Roger Avary ou Zero dark thirty de Kathryn Bigelow. Un inédit dans cette liste : Lost in America d’Albert Brooks avec Julie Hagerty (Y a-t-il un pilote dans l’avion?) : une pépite méconnue ? Enfin, en attendant les volets 2, 3 et 4, le premier Avatar de James Cameron est à revoir en 3D dans la salle Henri-Langlois le mercredi 24 septembre et ça ne se refuse pas.

Hélas, plusieurs films tournés en pellicule sont présentés en DCP ou numérique : Aliens le retour de James Cameron, Apocalypse Now redux de Francis Ford Coppola, Les Dents de la mer de Steven Spielberg, Elephant de Gus Van Sant (un contresens absolu), Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick, Obsession, Scarface et L’Impasse de Brian de Palma, Starship troopers de Paul Verhoeven et Voyage au bout de l’enfer de Michael Cimino. Ces longs-métrages majeurs de l’histoire contemporaine, dont certains présentés à plusieurs reprises à la CF depuis sa réouverture à Bercy dans d’excellentes copies, sont donc désormais un peu morts et enterrés. Taxi Driver de Martin Scorsese devait l’être aussi mais a finalement été déprogrammé. Pourtant bien plus récents, Inception de Christopher Nolan et La Planète des singes : Les origines de Rupert Wyatt seront eux projetés en pellicule. C’est toujours ça de pris… Et où sont les films de John Hughes si emblématiques des années 80 ? Dommage !

mac tiernan

John Mac Tiernan sera donc présent pour sa rétrospective, le soir de l’ouverture avec Piège de Cristal (le seul -ouf et hélas- en dcp) et pour sa master class. Pour Sergio Leone, si Le Bon, la brute et le truand et Et pour quelques dollars de plus sont projetés en DCP, le reste de sa filmographie l’est heureusement en copies films dont la trilogie Il était une fois… et Pour une poignée de dollars. On se réjouit comme on peu…

cinematheque 2014 2015

Plus tard dans ce premier trimestre

Ce qui aurait du être un événement la rétrospective intégrale de l’oeuvre cinématographique de François Truffaut, la star de la Nouvelle Vague, aura lieu du 8 octobre 2014 au 25 janvier 2015 accompagnée d’une exposition et de conférences. Aurait du être un événement, car voilà, c’est fait, comme Eric Rohmer, Maurice Pialat ou Jacques Demy, le cinéma de Truffaut ne sera plus disponible qu’en numérique. À l’exception de La Chambre Verte et de La Nuit Américaine et quelques courts-métrages, tout sera projeté en DCP ! Et c’est présenté comme un super youpi tra la la événement. C’est un peu une honte quand même, la signature de la fin du cinéma de patrimoine français. La Cinémathèque Française devrait être un lieu de préservation des films tels qu’ils ont été tournés et non pas un robinet à DVD sur très grand écran. Imagine-t-on Henri Langlois stocker des fichiers numériques dans sa baignoire ou la restauration héroïque du Voyage dans la Lune de Méliès en 2011 sans les boîtiers pellicule retrouvés en 1993 ? La question n’est pas de dénigrer le travail de restauration, que l’on nous survend complaisamment d’ailleurs comme s’il s’agissait de la panacée mais l’oubli par les dirigeants de la Cinémathèque sur leur travail de mémoire. C’est cela en fait, la maladie d’Alzheimer atteint le 51 rue de Bercy. Et il n’existe toujours pas de remède.

La Reine des pommes
La Reine des pommes

En accompagnement de cette rétrospective, une sélection de films de réalisateurs inspirés de Truffaut, avec quelques grands films dont le lien n’est pas évident, dont quelques très belles réussites : Esther Kahn d’Arnaud Desplechin, Irma Vep d’Olivier Assayas, Lady Chatterley de Pascale Ferran, Mauvais sang de Leos Carax, La Reine des pommes de Valérie Donzelli ou Tonnerre de Guillaume Brac.

Joe Don Baker et son gourdin dans Justice Sauvage
Joe Don Baker et son gourdin dans Justice Sauvage

Heureusement la rétrospective consacrée au cinéaste américain Phil Karlson (1908–1985) en 44 films présentés dans leur format d’origine, avec quelques rares vidéos. Une vraie redécouverte d’un cinéaste dont on connaît très mal le cinéma, riche en films noirs mais pas seulement dont le film le plus connu est peut-être l’un de ses derniers, Justice Sauvage avec Joe Don Baker en shérif rugueux. Enfin, la saison s’achèvera avec une rétrospective autour du cinéma de la Grande Guerre (là encore hérésie, beaucoup de numérique) et un cycle Portraits de femmes dans le cinéma chinois, en présence de Maggie Cheung pour l’ouverture avec Center Stage de Stanley Kwan, l’un de ses plus beaux rôles.

Saison 2014-2015

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En hiver : John Ford, Alexei Guerman, Claude Sautet (ça sent le DCP), la troisième saison de Toute la mémoire du monde (itou), au printemps : Nagisa Oshima, une histoire du cinéma brésilien, Buster Keaton et en été : Orson Welles, Philippe de Broca et Ingrid Bergman.

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