Il n’y a pas qu’à Paris que le cœur et les yeux des cinéphiles peuvent se gaver de trésors des plus grands maîtres du Septième Art ! Alors que dans la capitale française, on peut actuellement (re)découvrir les filmographies imposantes de Ingmar Bergman, de Jean Renoir et du plus confidentiel Youssef Chahine, en attendant les plaisirs à venir sous forme de rétrospectives consacrées à Billy Wilder et Eric Rohmer, parmi d’autres, c’est dans la deuxième ville de France en termes de cinéma, à Lyon, que l’on pourra se plonger dans l’univers de Alfred Hitchcock à partir de la semaine prochaine et jusqu’à la mi-février 2019, grâce à un cycle géant conçu par l’équipe de l’Institut Lumière. L’occasion idéale de revoir les chefs-d’œuvre du maître du suspense, qui s’est fait plutôt rare sur nos écrans depuis les hommages qui lui ont été rendus notamment à la Cinémathèque Française et déjà à Lyon début 2011.
Tous les détails de la programmation ne sont pas encore connus, mais deux rendez-vous incontournables ont d’ores et déjà été annoncés : la soirée d’ouverture mercredi prochain, le 21 novembre à partir de 19h00 en présence de Thierry Frémaux qui présentera le cycle et Les Enchaînés avec Cary Grant et Ingrid Bergman, puis une petite semaine plus tard, le mardi 27 novembre à la même heure, une rencontre également animée par le directeur général de l’Institut Lumière avec Patrick McGilligan, l’auteur de la biographie incontournable « Alfred Hitchcock Une vie d’ombres et de lumière » sortie en janvier 2011 chez Actes Sud, suivie d’une présentation de L’Homme qui en savait trop, la version de 1956 avec James Stewart et Doris Day. En plus de ces deux premiers temps forts d’une rétrospective longue de près de trois mois, il y a aura évidemment la projection d’une cinquantaine de films réalisés par Alfred Hitchcock, dans la mesure du possible en copies neuves et restaurées, des conférences par des spécialistes en la matière comme Jean Douchet, Serge Toubiana et Dominique Païni, des ciné-concerts pour accompagner les films muets et une exposition inédite d’affiches originales rares des films de Hitchcock dans la galerie de l’Institut Lumière.
Que reste-t-il encore à dire ou à écrire sur Alfred Hitchcock (1899-1980) ? On va se contenter d’un bref résumé de sa filmographie ici, tout en enviant considérablement les chanceux spectateurs lyonnais qui pourront s’y plonger plus amplement prochainement. Les premières quinze années de la carrière du réalisateur étaient exclusivement britanniques, puisqu’il avait commencé à tourner des films dans son pays d’origine au temps du cinéma muet. Grâce à des succès comme Les 39 marches et Une femme disparaît, il avait suivi l’appel de Hollywood par le biais du producteur David O. Selznick pour lequel il avait réalisé ses premiers films américains : Rebecca – Oscar du Meilleur Film en 1941 –, Soupçons, L’Ombre d’un doute, La Maison du docteur Edwardes et Les Enchaînés. Après la guerre, il trouve progressivement une plus grande liberté en devenant le producteur de ses propres films, même si le succès commercial se fait attendre au fil d’une période qui va de La Corde en 1948 jusqu’à La Loi du silence cinq ans plus tard, en passant par Les Amants du Capricorne, Le Grand alibi et L’Inconnu du Nord-Express. Les années ’50 sont véritablement la décennie Hitchcock, ponctuées d’innombrables chefs-d’œuvre tels que Fenêtre sur cour, Sueurs froides et La Mort aux trousses. A la même époque, le réalisateur s’invite dans les foyers américains par le biais de sa série à succès « Alfred Hitchcock présente ». Il réinvente le thriller et accessoirement le film d’horreur en 1960 avec Psychose, puis enchaîne sur le pas moins effrayant Les Oiseaux, avant de perdre lentement de son influence artistique et commerciale avec des films comme Pas de printemps pour Marnie, Le Rideau déchiré et Complot de famille. C’est par contre sa réputation qui monte en flèche à ce moment-là, grâce à l’intervention de son admirateur inconditionnel François Truffaut qui publie un livre d’entretiens de son maître en 1966 aux éditions Robert Laffont. Sur ses vieux jours, Hitchcock reçoit de même quelques signes de reconnaissance tardifs de la part de l’industrie hollywoodienne, tels que le prix Irving G. Thalberg de l’Académie du cinéma américain en 1968, le prix Cecil B. DeMille de la presse étrangère à Hollywood en 1972 et le Life Achievement Award de l’American Film Institute en 1979.