Critique : Hope

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Corée : 2013
Titre original : Su-won
Réalisateur : LEE Joon-ik
Scénario : LEE Joon-ik
Acteurs : Seol Kyeong-gu, Eom Ji-won, Lee Re
Distribution :
Durée : 2h05
Genre : Drame
Date de sortie :

Note : 4/5

Le film d’ouverture de l’édition 2013 du Festival du Film Coréen à Paris s’est ouvert le mardi 29 octobre avec un drame bouleversant autour de la pédophilie qui évite tous les pièges dans lesquels il aurait pu tomber. Le résultat est ce bijou qu’il sera difficile de dépasser en qualité.

Synopsis :Après l’agression sexuelle dont est victime leur petite fille So-won (qui signifie « vœu » en coréen), la vie de Dong-hoon et Mi-hee bascule et les deux parents sombrent peu à peu dans le désespoir. Mais un jour, So-won fait un vœu dont les conséquences pourraient bien faire renaître l’espoir et aider sa famille à se reconstruire.

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Une petite fille blessée

Sur le chemin de l’école, So-won ( que l’on peut traduire par Wish / vœu et qui devient pour son titre anglais Hope ou Espoir ), une petite fille, est attirée dans une ruelle et violée.

Le pire était à craindre avec un tel sujet, adapté d’un fait réel qui a marqué la Corée il y a cinq ans à peine. Le réalisateur Lee Joon-ik ( Le Roi et le clown ) surprend avec un drame bouleversant qui évite les nombreux écueils dans lesquels il aurait pu se complaire. Il filme avec une distance juste le parcours émotionnel et social de cette famille marquée par le pire.

En prologue, on découvre la vie de cette petite fille avant l’agression. Sans emphase, le terrible avenir est comme annoncé par une mise en place rigoureuse. Sa mère Mi-hee tient une petite épicerie et son père Dong-hoon reste vautré devant sa télévision, épuisé par son travail à l’usine. La famille vit modestement, les soucis financiers prenant souvent le pas sur les états d’âme. Marque de cette tension sous-jacente, Mi-hee ne révèle pas à son mari qu’elle attend un nouvel enfant. So-won se sent seule, ses parents ne l’écoutent pas vraiment mais ne se plaint pas. Elle s’amuse et se dispute avec ses camarades dont Young-seok, petit garçon qui l’aime bien et donc se moque d’elle, c’est l’âge. Sous la pluie, elle se rend seule à l’école, proche de chez elle et est abordée par un homme alors qu’elle n’est qu’à quelques pas de la grille d’entrée.

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La bonne distance

Lee Joon-ik filme avec une rare pudeur sans pour autant minimiser les conséquences d’un tel traumatisme. Les séquelles physiques sont dépeintes frontalement et tout est dit, jusqu’à l’horreur, même si la caméra s’arrête avant de devenir obscène. La vie ne sera plus jamais la même pour So-won mais sa force sera de refuser cet état de fait et de tenter de revenir autant que possible à son ancienne vie. Si elle ne peut rien contre ses blessures corporelles, elle va réapprendre à vivre, aidée par ses parents eux-même très marqués et qui vont se réinventer pour l’aider à guérir.

La culpabilité de ne pas avoir su lui parler avant, de ne pas avoir été là pendant et de ne pas trouver, au moins dans un premier temps, la bonne distance pendant sa rééducation est prégnante. Ce poids est fort mais grâce à cette retenue qui marque autant l’écriture des personnages, des situations et des dialogues que la mise en scène, le spectateur n’est pas pris en otage. On ne fait pas appel aux bas instincts mais aux sentiments les plus nobles. La colère est là, la peine aussi, mais l’humour souvent inattendu soulage et l’on s’étonne de rire avec éclat. En portant le costume de Kokomong la saucisse, personnage de programme pour enfant qui existe vraiment et est très populaire, le père va réussir à communiquer avec sa fille. Alors qu’ils ne parvenaient plus à se faire face, le visage de So-won va s’éclairer à nouveau et le père va lui aussi reprendre vie. Ce costume encombrant, sous lequel il fait très très chaud, permet, par sa dimension incongrue, des instants qui sont amusants pour le spectateur mais restent sérieux pour les personnages.

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Une légèreté apaisante

Lee Re dans le rôle de la petite fille et Seol Kyeong-gu dans celui du père sont émouvants, grâce à une retenue qui permet l’empathie. La direction d’acteurs est à ce titre exemplaire. On les voit se regarder, s’observer, se cacher l’un de l’autre et enfin se parler. Les voir se promener dans la rue main dans la main restera comme l’un des moments les plus émouvants de l’année. Le douleur de la mère n’est pas moins forte, avec là encore une belle interprétation de Eom Ji-won, déjà magnifique dans Les Femmes de mes amis de Hong Sangsoo dans un tout autre registre.

La tonalité générale de cette grande œuvre reste positive et souvent légère, autant que possible, à l’image du choix de vie de So-won et tranchent avec la noirceur du thème et des scènes les plus dramatiques. L’enquête policière puis les scènes dans le tribunal permettent de comprendre le fonctionnement de la justice coréenne sur ce sujet, avec cet aspect absurde où l’alcoolisme peut être considéré comme une circonstance atténuante. Le portrait du coupable peut apparaître comme manquant de subtilité, mais il ne fait que refléter l’attitude de ce monstre lors du procès où il n’a affiché aucun remords et a tout fait pour nier ses responsabilités.

Résumé

Même s’il était indispensable d’affronter la dimension publique de cet acte de pédophilie, c’est le drame intime qui est mis en avant. La force de Hope est de nous proposer un grand moment de cinéma avant d’être la simple captation de faits réels. Un sacré tour de force artistique qui prend aux tripes et restera comme l’un des grands moments de la huitième édition du Festival du Film Coréen à Paris. On ne peut qu’espérer une sortie en salles, mais ce n’est hélas pas gagné !.

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