Elles
Allemand, français, polonais : 2012
Titre original : Elles
Réalisateur : Malgorzata Szumowska
Scénario : Tine Byrckel , Malgorzata Szumowska
Acteurs : Juliette Binoche, Anaïs Demoustier, Joanna Kulig
Distribution : Haut et court
Durée : 1h36
Genre : Drame
Date de sortie : 1 février 2012
Globale : [rating:2][five-star-rating]
Il y a des films comme ça, qui ont tout d’une bonne idée sur le papier, et qui une fois vu vous laisse une impression de pétard mouillé. Elles, le film des lectrices de « Elle » fait cet effet là. Retour sur la bonne idée, et le reste…
Synopsis : Anne, journaliste dans un grand magazine féminin enquête sur la prostitution estudiantine. Alicja et Charlotte, étudiantes à Paris, se confient à elle sans tabou ni pudeur. Ces confessions vont trouver chez Anne un écho inattendu. Et c’est toute sa vie qui va en être bouleversée.
Un sujet et une interprétation parfaits
Elles s’affiche partout avec une sublime couverture glamour comme celles des magazines de mode. Le film s’annonce alors sulfureux et féminin au possible. Puis vient le synopsis, traitant d’un fait de plus en plus répandu en ces temps difficiles: la prostitution des étudiant(e)s. Sujet inédit au cinéma, traité de cette façon et de ce point de vue, ça donne envie de regarder. D’autant que le casting lui, fait rêver.
Et ces acteurs, ou plutôt actrices, tiennent effectivement tout le film sur leur interprétation. Anaïs Demoustier (Les neiges du Kilimandjaro), Juliette Binoche et Joanna Kulig (La femme du Vème) confirment leurs talents et jouent les prostituées des temps modernes débordantes de sensualité. Les hommes eux, sont relégués au second voir troisième plan dans Elles, film fait par une femme, presque pour les femmes. Les figures masculines n’étant que pure violence, bêtise et machisme incarnées. Louis-Do de Lencquesaing, décidément habitué aux rôles de beau salaud père de famille (Polisse et L’art D’aimer), livre d’ailleurs la prestation parfaite du mari pépère dans sa vie de couple de bourgeois parisiens ancré dans la routine, délaissant sa femme qu’il traite comme un objet.
Car en cela, Elles est vrai film féministe. Ici, ce sont les femmes qui ont le pouvoir. Y compris les prostituées. En faisant cela, les étudiantes décident de qui elles veulent voir, de ce qu’elles veulent faire et de combien elles veulent gagner. La réalisatrice, Malgorzata Szumowska, tente ici de filmer également à travers le personnage de la sublime Juliette Binoche, la prise de conscience de la sensualité féminine et de ce pouvoir sexuel propre aux femmes, qui leur permet de sauver leur mariage et leur santé mentale apparemment.
Et du sexe, le film n’en manque pas. Les hommes pourront se régaler devant la pellicule montrant tout ou presque de ses actrices. Au point même de nous mettre mal à l’aise devant certaines scènes plus ou moins choquantes. C’est ce malaise que la réalisatrice dit avoir voulu créer volontairement. Créer un malaise pour briser un tabou de société, certes. Mais le film perd rapidement son sujet principal et en devient d’un coup beaucoup moins polémique, et beaucoup plus ennuyeux…
Mais un message qui passe « mâle »
En effet, Elles ne veut pas blâmer, ni inciter la prostitution étudiante. Il ne prend aucun parti et se sert du personnage de Binoche en journaliste pour évoquer une prise de conscience. Sur le principe, cette idée de neutralité est bonne. Mais du coup, on se demande rapidement à quoi sert le film, et le message flou divulgué sur l’écran contribue à ce sentiment de malaise ambiant. Pour un film féministe, « Elles » finit même par faire passer les femmes pour des personnes uniquement vénales, attirées par la luxure et leur plaisir propre. Les successions de scènes de sexe sans amour deviennent quant à elles vite lassantes et tentent comme elles peuvent de combler le vide laissé par le traitement du sujet qu’on oublie bien vite.
On se retrouve donc avec un schéma de réalisation digne d’un film porno qui voit s’enchainer à l’écran une minute de dialogue, une fellation, une minute de dialogue, une scène de masturbation, une minute de dialogue et une levrette… Alors soit les actrices veulent finir dans l’industrie du X, soit elles ont pensé comme vous à tort que le film véhiculerait un message qu’elles imaginaient aux antipodes de celui qui passe à l’écran.
En plus de cela, le jugement sur les classes sociales inférieures qu’on nous inflige est plus que limite. En effet, ces étudiantes se prostituent pour sortir de la misère. Pourtant, la réalisatrice dénigre complètement les classes populaires et nous offre un personnage de Lola/charlotte disant que se prostituer c’est bien, et que c’est uniquement quand elle doit rentrer dans son HLM de banlieue qu’elle se sent sale. Parce qu’un HLM, « ça pue ».Oui, donc vous qui vivez dans des HLM, vous valez beaucoup moins que toutes les prostituées de France réunies, sachez-le. Et c’est aussi de votre faute si vous êtes pauvres si l’on en croit le film. Vous n’aviez qu’a faire comme tout le monde et finir sur le trottoir pour vous en sortir aussi…
Hormis l’aspect contestataire du message flou qui tente d’être passé, la réalisatrice se laisse surtout aller à une succession de petites scènes qui ne forment aucune logique. On perd le lien avec l’histoire, ce qui créé de la lassitude voire de l’ennui, et toutes les histoires se commencent sans jamais se finir (la pornographie, l’homosexualité, le plaisir sexuel, le viol…). Dommage, surtout pour certains passages qu’on aurait aimé voir abordés plus avant, comme lorsque la mère d’une des jeunes filles comprend ce qu’elle fait pour survivre. Et bien rassurez-vous, vous ne saurez pas la suite, puisqu’il n’y en a pas….En fait, les documentaires existants sur le sujet sont tous beaucoup plus intéressant et instructifs que ce film brouillon qui a pourtant le mérite d’aborder un nouveau phénomène de société encore tabou ,et qui place ses actrices en haut de la pyramide de la sensualité.
Résumé
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