Critique : Le Fondateur

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le-fondateur-afficheLe Fondateur

Etats-Unis, 2016
Titre original : The Founder
Réalisateur : John Lee Hancock
Scénario : Robert D. Siegel
Acteurs : Michael Keaton, Laura Dern, Nick Offerman, John Carroll Lynch
Distribution : EuropaCorp Distribution
Durée : 1h55
Genre : Biographie
Date de sortie : 28 décembre 2016

3,5/5

Comme chaque année, alors que la saison des Oscars se profile, nous avons notre lot de films dits « à oscars » pointant le bout de leur nez, avec plus ou moins de réussite. En la matière, les Weinstein sont reconnus pour leur capacité à porter jusqu’à la cérémonie les films en lesquels ils croient, qu’ils soient dignes de récompenses ou non. On se souvient du hold-up par Shakespeare in love en 1999 de l’oscar du meilleur film face à Terrence Malick et Steven Spielberg, respectivement pour La Ligne Rouge et Il Faut sauver le soldat Ryan. À ce jour, il est bien évidemment difficile d’émettre le moindre pronostic concernant la cérémonie de 2017, et le film présent a tout de même peu de chances de récolter les plus hautes récompenses, face à de sérieux challengers. Néanmoins, le genre auquel il appartient, le biopic, et la prestation toute en démesure de Michael Keaton, encore déçu de son occasion manquée pour Birdman, sont à priori des éléments sérieux pour éventuellement prétendre à des récompenses dans certaines catégories majeures.

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Synopsis : Dans les années 50, Ray Kroc rencontre les frères McDonald qui tiennent un restaurant de burgers en Californie. Bluffé par leur concept, Ray leur propose de franchiser la marque et va s’en emparer pour bâtir l’empire que l’on connaît aujourd’hui.

Trop flamboyant pour être vrai

En s’attachant au destin de Ray Kroc, petit démarcheur tentant en vain de vendre un produit n’ayant que peu d’attraits, qui après avoir approché les frères McDonald, aura franchisé la marque pour finir par bâtir l’empire que l’on connaît aujourd’hui, les scénaristes investissent un genre dont raffolent les Américains, à savoir la success story, les confortant dans leur idée qu’en Amérique, tout est possible, lorsque l’on est armé d’une volonté de feu. Et en la matière, il est clair que le personnage campé par Michael Keaton semble presque trop flamboyant pour être vrai. Si, pour construire un film efficace, des réajustements de la véritable histoire sont indispensables, la personnalité hors normes du véritable Ray Kroc était tout de même une formidable base pour un scénariste hollywoodien. La structure est évidemment banale, suivant dans un ordre chronologique la montée en puissance progressive du personnage, du moment où il est à la recherche d’une idée en or à vendre, à sa rencontre avec les frères qui seront à l’origine de son succès à venir. Bien entendu, il est difficile, lorsque l’on parle de ce type de personnage haut en couleur, de renvoyer une image proprette et sympathique du bonhomme, tant celui-ci, comme l’on peut s’en douter, n’a pas pu en arriver là par hasard. Son ascension fulgurante s’est faite à un certain prix, et la façon dont il a traité ses proches, que se soit sa femme (campée par une Laura Dern en retrait, chose somme toute logique rapport à son personnage effacé subissant quelque peu la personnalité ingérable de son mari) ou, bien entendu, ses collaborateurs, les frères McDonald en tête.

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Michael Keaton croque les Mac Donald

Car si ceux-ci sont à l’origine de la marque et du concept de base des restaurants, c’est bel et bien Ray Kroc qui aura propulsé le petit restaurant californien de base en cette franchise redoutable implantée aujourd’hui dans le monde entier. Et cela s’est évidemment fait au détriment de ces derniers, ce qui donne dans le film des scènes assez cruelles, où Michael Keaton peut laisser s’exprimer toute la folie de son jeu, avec des joutes verbales fusant à toute vitesse. Si l’on a évidemment de l’empathie pour les frères qui ont eu l’idée de base exploitée ensuite à plus grande ampleur, il est évident qu’ils n’auraient jamais développés la marque comme Ray Kroc l’a fait, faute d’ambition. Si le comportement de ce dernier vis-à-vis de ceux sans lesquels il n’aurait sans doute jamais rien réussi de sa vie est particulièrement impitoyable, on ne peut s’empêcher d’avoir une forme de respect pour sa personnalité, tant son absence de scrupules et son ambition démesurée auront été payantes. C’est un requin qui aura eu le flair et le cran d’aller là où les créateurs de la marque n’auraient jamais eu le courage de s’aventurer. Sur ce sujet somme toute assez peu cinématographique, le scénariste cisèle un script implacable, sans le moindre temps mort, au rythme parfait, et aux dialogues impeccables dont l’impact est décuplé par le jeu d’un Michael Keaton égal à lui-même, donc génial, du moins pour ses admirateurs de toujours. Si l’on est en droit de trouver sa prestation dans Birdman plus marquante et nuancée, on se contente avec grand plaisir de la flamboyance dont il est coutumier, et qui sied parfaitement à son personnage.

Le reste du casting ne démérite pas, avec ses seconds couteaux typiques du cinéma américain «adulte » dont on connaît les visages sans forcément mémoriser leurs noms.  On est évidemment ici en terrain connu, et il n’y a rien dans ce film qui soit de nature à révolutionner le septième art. Néanmoins, le professionnalisme avec lequel le tout est exécuté, est inattaquable. Le film appartient à un sous genre dont les Américains sont les spécialistes, réussissant à rendre captivantes des histoires dont on se dit, sur le papier, qu’elles ne sont pas une base très inspirante pour développer une dramaturgie suffisante pour tenir la distance sur un long métrage. Et pourtant, le récit avance avec un sens du rythme et de l’efficacité qui happent le spectateur pour ne le lâcher qu’à l’issue du film, sans qu’au moindre moment, on ne se soit posé la question de la pertinence de telle ou telle scène.

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Conclusion

C’est donc un excellent moment que l’on passe devant ce biopic énergique et divertissant, fait avec un savoir faire indéniable, souvent drôle, dont les deux heures passent à toute vitesse.

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