À (re)voir en VOD : Bad boys – Watcha gonna do ?

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Bad boys
États-Unis : 1995
Titre original : –
Réalisateur : Michael Bay
Scénario : George Gallo, Michael Barrie, Jim Mulholland
Acteurs : Will Smith, Martin Lawrence, Téa Leoni
Distributeur : Sony Pictures
Durée : 1h59
Genre : Action
Date de sortie cinéma : 5 juillet 1995

Note : 3,5/5

Si Mike Lowrey est un séducteur invétéré, héritier d’une fortune et policier par passion, son collègue et ami Marcus Burnett est un homme rangé, marié et père de famille. Leur amitié ne les empêche pas d’avoir des méthodes parfaitement différentes. Mais la disparition de cent kilos d’héroïne, dérobés dans les locaux mêmes de la brigade des stups, va leur faire oublier leur concept sur la façon d’exercer leur métier, pour se lancer a la poursuite des voleurs…

A l’occasion de la sortie en Blu-ray, DVD et 4KUltra HD de Bad boys for life chez Sony Pictures, qui marque également les 25 ans de la franchise mettant en scène Will Smith et Martin Lawrence, on a décidé de revenir sur les deux premiers films de la saga, en commençant donc par le premier. Que reste-t-il de la franchise Bad boys aujourd’hui ?

Le film des débuts

Bad boys c’est le film des « débuts » pour à peu près tout le monde, que cela soit devant ou derrière la caméra. Des débuts fracassants pour son réalisateur et pour le duo d’acteurs principaux, puisque le film remportera 143 millions de dollars de recettes à travers le monde, et réunira 1,6 millions de français dans les salles obscures. Des résultats clairement enthousiasmants pour un film qui, à l’origine, avait été écrit et pensé pour deux acteurs du Saturday Night Live, Dana Carvey (Wayne’s world) et Jon Lovitz (Prof et rebelle). Après quelques tractations (le rôle de Mike Lowrey serait d’abord proposé à Arsenio Hall), et sur l’insistance du réalisateur Michael Bay, les deux rôles principaux se verront finalement confiés à Will Smith (Mike Lowrey) et Martin Lawrence (Marcus Burnett). Un duo d’acteurs qui, en 1995, ne bénéficiait pas de l’aura qu’ils possèdent aujourd’hui auprès du grand public. Célèbre aux États-Unis pour la sitcom Martin, Martin Lawrence était un parfait inconnu pour les français. Ces derniers – les adolescents du moins – étaient en revanche plus familiers avec le visage de Will Smith, héros de la série multi-diffusée Le prince de Bel Air. Deux bons gros tchatcheurs qui, dès la première séquence du film, s’imposeront comme de parfaits successeurs du Flic de Beverly Hills et d’Eddie Murphy en se balançant à vitesse grand V les vannes les plus vulgaires qui soient. Le film les fera passer quasi-instantanément de l’ombre à la lumière.

Bad boys marque également les débuts de Michael Bay, fraîchement débarqué de la publicité qui dès ce premier film s’imposera quasiment comme « LE » réalisateur que l’intelligentsia adorerait détester pour les dix années à venir. Cinéaste de la forme, volontiers adepte de la vulgarité, du bling bling et de l’emphase, Michael Bay marquerait de suite son territoire en se faisant l’apôtre d’une certaine efficacité certes teintée de mauvais goût et de surenchère pyrotechnique. Un adepte du « cool », affichant sans complexe une vision pour le moins décontractée du médium cinéma, ouvertement clippesque et ultra-cut.

Une production Simpson / Bruckheimer avant tout

Pour autant, et même si dès ce premier film Bay réussissait à imposer une véritable signature visuelle – notamment avec son fameux plan à 360 degrés au cœur duquel la caméra tourne lentement autour de ses deux personnages en train de se relever – on ne pourra s’empêcher de penser qu’avant d’être à 100% un film de Michael Bay, Bad boys est sans doute avant tout un film estampillé du sceau de ses producteurs, Don Simpson et Jerry Bruckheimer. Recyclant sans vergogne des éléments issus d’autres franchises du genre, le film de Bay rappelle énormément le travail de Tony Scott sur Le flic de Beverly Hills 2, dont il recycle l’esthétique, l’abondance de filtres – notamment orangés – ou encore la violence, la vulgarité et même certaines idées, telles que celle d’utiliser de gros camions de chantier à des fins d’action spectaculaire.

Dans le même état d’esprit, la musique de Mark Mancina va globalement lorgner du côté des thèmes héroïques et testostéronés à la Hans Zimmer, mais s’offre également à l’occasion quelques clins d’yeux à celle de Michael Kamen pour L’arme fatale. Les autres titres flirtent avec le rap et le R’n’B FM, et auront largement été diffusés dans le monde entier l’année de sortie du film. On notera par ailleurs que la musique est assez importante dans Bad boys, puisque le titre du film est lui-même une référence à la chanson « Bad boys » du groupe de reggae Inner circle. Un morceau connu dans le monde entier, mais qui aux États-Unis évoquait – du moins dans les années 90 – immédiatement la police, puisqu’elle servait de générique à l’émission de reality show américaine COPS, créée en 1989 et annulée en 2020 à la suite de manifestations liées à la mort de George Floyd, afro-américain tué par des violences policières.

Des acteurs attachants

Bad boys se situe donc au croisement de diverses influences, et si Michael Bay multiplie certes les effets de style qui deviendront au fil du temps sa marque de fabrique, il ne peut rien contre l’influence écrasante du duo Simpson / Bruckheimer, qui impose un cahier des charges tellement strict qu’il ne peut au final accoucher que d’un produit calibré selon les standards des années 90, avec tout ce que cela implique de détachement, voire même de ridicule par moments. C’est particulièrement net quand les personnages échangent vannes et des bons mots juste après des événements traumatisants ayant failli leur coûter la vie, impliquant violence, destruction et mort. Restent donc les personnages, sympathiques même s’ils manquent de relief. On commence avec le duo Martin Lawrence / Will Smith, dont l’alchimie fonctionne parfaitement, mais qui peine un peu à convaincre, surtout 25 ans après. Leur logorrhée verbale et leurs joutes incessantes peuvent certes amuser, surtout en version originale, mais leurs caractères bien trempés ne s’opposent pas encore assez nettement, l’intrigue nous présentant finalement ici deux flics aux méthodes équivalentes. La vraie mécanique de comédie sera d’avantage à l’œuvre à partir du deuxième épisode, dans lequel Lawrence deviendrait purement et simplement le sidekick comique et geignard d’un Will Smith érigé en véritable Superman. Dans Bad boys premier du nom en revanche, leurs caractères sont finalement assez équilibrés, et Martin Lawrence s’offrira également de solides scènes d’action en solo, sans pour autant sombrer dans le ridicule.

Dans la peau du témoin à protéger, on trouvera Téa Leoni, qui jouerait également quelques années plus tard dans Deep impact et Jurassic Park III. Après un passage à vide de quelques années (Hollywood n’aime pas les actrices de plus de 35 ans), elle reviendrait finalement à la télévision avec la série Madam Secretary (2014-2019). Elle fut connue durant de nombreuses années en tant qu’épouse de l’acteur David Duchovny. Elle donna également son nom à un astéroïde. Dans la peau du méchant, Tchéky Karyo peaufinait un personnage d’ordure à la voix douce qu’il recyclerait par la suite à de nombreuses reprises dans sa carrière, notamment dans Le baiser mortel du dragon (2001). Enfin, on notera la prestation haute en couleurs de Joe Pantoliano dans la peau du Capitaine de police irascible, figure incontournable du genre.

Un ensemble trop conventionnel

Malgré les acteurs et l’énergie déployée par Michael Bay derrière la caméra, Bad boys ne parvient néanmoins pas à réellement s’imposer comme une référence immédiate, les limites du métrage étant trop évidentes. Si on sentait bien la volonté du cinéaste de dépasser le carcan du blockbuster Hollywoodien de l’époque, il se révélait encore bien trop bridé par ses producteurs Don Simpson et Jerry Bruckheimer, qui ne lui permirent pas avec ce film de dépasser le cadre de l’actioner classique, qui apparait beaucoup trop conventionnel pour réellement convaincre totalement (« ça court, ça saute, ça tire dans tous les coins, et ça explose à la fin » pouvait-on lire dans Télérama). C’est d’autant plus flagrant que la même année, John McTiernan orchestrait un époustouflant retour sur le devant de la scène avec Une journée en enfer, troisième volet des aventures de John McClane, qui redéfinirait presque totalement le genre.

Shut the fuck up you fuckin’ piece of shit

25 ans plus tard néanmoins, la (re)découverte de Bad boys pourra surprendre par son intense grossièreté et ses nombreuses répliques ouvertement vulgaires. Le très sérieux site IMDb a ainsi dénombré rien de moins que 100 utilisations du mot « fuck » (couplé avec « mother » à 21 reprises), 89 usages du mot « shit », 46 « damn » (dont 16 « Goddamn »), 40 « ass » (dont 4 « asshole »), 14 « bitch » (dont un en espagnol, pour les bilingues), 6 « hell », 2 « dick », un « bastard », un « Jesus », deux « Jesus Christ », 6 « piss », 3 « screw », 2 « titty » et un « crap ». Tout ça en grosso modo deux heures. Si vous visionnez le film en français, ça fait beaucoup de putains, d’enculés et de salopes. On pourra également tiquer devant certaines lignes de dialogue qui pourront aujourd’hui paraître vaguement homophobes ou misogynes, le personnage de Téa Leoni se voyant régulièrement appelé « pute » ou « salope ». Les productions Simpson / Bruckheimer cultivaient d’ailleurs généralement ce côté un peu « beauf », même s’il est évident que grossièreté et beaufitude ne sont pas systématiquement liées.

On admettra néanmoins que le temps qui nous sépare de la sortie du film de Michael Bay est d’un quart de siècle, et que depuis, les temps ont changé, pour le pire ou le meilleur selon les sensibilités. Cependant, il faut également admettre que Bad boys n’est certainement pas un cas isolé. Vulgarité et homophobie latente étaient souvent au cœur des films d’action de l’époque : il s’agit là d’une constante dans le cinéma d’action des années 80 / 90, qui cultivait une certaine image de l’homme et de la masculinité en général.

D’ailleurs, si vous me permettez un aparté personnel avant d’en finir avec ce papier, une anecdote sur le sujet me revient en tête. Retour dans les années 90. Ma mère n’a jamais été particulièrement restrictive concernant ma passion du cinéma, qui s’est principalement développée aux alentours de 1991, l’année de mes onze ans, année durant laquelle je devins également un lecteur assidu de Mad Movies. Cependant, si elle me laissait tranquillement regarder Evil Dead ou Massacre à la tronçonneuse sur l’antique magnétoscope de la maison, elle s’avérait en revanche beaucoup plus sévère dans le domaine du cinéma d’action. Pas pour la violence, non, mais juste pour une question de langage. Sylvester Stallone avait donc à ses yeux l’image du plus vulgaire d’entre eux, et j’ai dû sacrément biaiser adolescent (alors que d’autres baisaient) pour découvrir des films comme Haute sécurité ou Tango et Cash. Je pouvais ainsi me régaler sans limite des outrances gore et des zizis coupés de Street Trash, mais pas des muscles saillants et des saillies vulgos de Stallone.

Bad boys est disponible en SVOD sur Netflix, en VOD à l’acte et en téléchargement définitif sur la majorité des plate-formes de Vidéo à la demande : MyTF1, Orange, FilmoTV, Canal VOD. Le film est également sorti en Blu-ray / DVD en 2010, et ressortira en 4K Ultra-HD le 26 août 2020 chez Sony Pictures.

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