Test Blu-ray : The fake

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The fake

 
Corée du Sud : 2013
Titre original : Saibi
Réalisation : Yeon Sang-ho
Scénario : Yeon Sang-ho
Acteurs : Yang Ik-june, Oh Jung-se, Kwon Hae-hyo
Éditeur : Spectrum Films
Durée : 1h41
Genre : Animation, Drame
Date de sortie DVD/BR : 9 mai 2018

 

 

Les habitants d’un village voué à disparaître en raison de la construction d’un barrage, s’apprêtent à partir avec une compensation offerte pour leur délocalisation. Se faisant passer pour un prophète, Choi, un homme d’affaires charismatique et Sung le nouveau pasteur, parviennent à convaincre les villageois de verser leurs indemnités de relogement à la construction d’une chapelle. De retour, Min-chul, un bon à rien violent et agressif vole les économies de sa fille et part s’offrir une soirée de vices qui le mène rapidement à une confrontation avec Choi, puis au poste de police. Sur une affiche illustrant des individus recherchés pour fraudes, il croit reconnaître l’homme d’affaires…

 

 

Le film

[4/5]

Révélé en 2011 avec le puissant The king of pigs (lire notre article), Yeon Sang-ho a surtout énormément fait parler de lui fin 2017, avec l’électrochoc Dernier train pour Busan, qui a remis un coup de projecteur rétroactif sur sa carrière dans le domaine de l’animation. Grâce à Spectrum Films, éditeur indépendant spécialisé dans les cinémas d’Asie, le public français a aujourd’hui l’occasion de découvrir The fake, son deuxième film, au cœur duquel il dresse le portrait pas très reluisant d’un pays en pleine déliquescence sociale.

Ainsi, si Seoul Station et Dernier train pour Busan évoquaient clairement un pays où chacun marche ouvertement sur la gueule de son voisin pour assurer sa survie, les deux films le faisaient de façon « métaphorique », en utilisant le prisme du cinéma fantastique pour accentuer leur propos. Plus noirs et ouvertement agressifs vis-à-vis de la Corée du Sud, présentée comme un pays où règnent la corruption et les magouilles, les plus cyniques se « gavant » littéralement sur le dos d’une population paysanne quasiment arriérée, ancrée dans des croyances et traditions d’un autre âge. Si King of pigs nous présentait déjà un pays où toutes les humiliations étaient possibles en toute impunité, Yeon Sang-ho en remet encore une couche avec The fake, dont l’animation « brute de décoffrage » colle parfaitement bien avec son propos « choc », frappant le spectateur comme un uppercut au visage.

Comme les autres films de son auteur, The fake n’est peuplé que de personnages foncièrement antipathiques : ouvertement faibles, violents, manipulateurs et/ou enclins au mensonge, ils forment la substantifique moelle d’un récit forcément très noir, où aucun espoir quant à la possibilité d’un avenir ou d’une société meilleurs ne semble percer au bout du tunnel. Au point même que l’on finisse par se dire que si The fake avait été tourné en « live », sans la distance qu’implique presque automatiquement l’animation vis-à-vis du public, son ambiance aurait probablement été trop noire, suffocante, déprimante. Pas l’ombre de la plus petite trace d’humour au cœur de The fake, mais l’animation crée finalement une espèce d’ambiance teintée de poésie sombre, ne serait-ce que dans l’utilisation de décors bucoliques et vraiment très beaux, en contradiction totale avec ce qui nous est montré.

The fake est donc sans conteste un film très sombre, et très dur. Comme son titre l’indique en filigrane, aucun des personnages n’est ce qu’il parait à priori, et où même ceux nous étant présentés comme « positifs » s’avèrent au final de parfaites ordures. Et le véritable « héros » du film, Min-Chul, ivrogne, violent, revanchard, misogyne et incapable de réprimer ses pulsions apparait peut-être comme le plus sympathique d’entre eux ; parce qu’au moins, il a le mérite de ne pas camoufler sa véritable nature derrière un « masque » social. Au final, The fake s’avère donc une sacrée claque de film d’animation, et la confirmation –pour ceux qui pouvaient encore en douter– que Yeon Sang-ho est probablement l’un des cinéastes Sud-Coréens les plus intéressants qui soient.

 

 

Le Blu-ray

[5/5]

Quelques mois à peine après la sortie de King of pigs sur support Blu-ray, Spectrum Films remet le couvert en nous proposant de découvrir The fake en Haute Définition. Comme de bien entendu, le film est proposé au format 1.85 respecté, la définition est parfaite, le piqué précis, les noirs affichent une belle densité et les contrastes ne manquent pas de mordant. Côté enceintes, The fake est proposé en version originale DTS-HD Master Audio 2.0 uniquement. Les sous-titres français souffrent parfois de petites fautes d’orthographe, mais l’ensemble demeure excellent.

Dans la section suppléments, on trouvera tout d’abord une intéressante présentation du film par Cinéma coréen : en une vingtaine de minutes, The fake y est replacé de façon dans son contexte de tournage autant que dans la carrière de Yeon Sang-ho, qui est d’ailleurs évoquée dans le détail. On poursuivra les festivités avec un entretien avec Antoine Coppola, qui revient largement sur la violence et la misère sociale au cœur des films du cinéaste. On notera que ces deux interventions se complètent plutôt bien, évitant de façon assez habile les redondances qui auraient pu alourdir un peu leur propos. On aura ensuite droit à une critique du film par « Les Cousins font leur cinéma », la vidéo étant issue de leur chaine Youtube : le propos est clair, synthétique et plutôt bien vu. Mais ce n’est pas tout, car outre la traditionnelle bande-annonce du film, Spectrum Films nous a également réservé une surprise de taille avec deux courts-métrages d’animation de Yeon Sang-ho : les excellents Love is a protein (2004, 23 minutes) et The hell (2006, 35 minutes). Le tout est naturellement proposé en Haute Définition et VOST : un soin éditorial remarquable qui s’ajoute au plaisir de pouvoir savourer le film sur format Blu-ray, quand beaucoup d’autres éditeurs se seraient contentés de le sortir uniquement en DVD.

 

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