Critique : Jane got a gun

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Jane got a gun

Etats-Unis, 2015
Titre original : Jane got a gun
Réalisateur : Gavin O’Connor
Scénario : Brian Duffield, Anthony Tambakis et Joel Edgerton
Acteurs : Natalie Portman, Joel Edgerton, Noah Emmerich, Ewan McGregor
Distribution : Mars Distribution
Durée : 1h38
Genre : Western
Date de sortie : 27 janvier 2016

Note : 2,5/5

Par les temps qui courent, chaque western serait bon à prendre. Le genre américain par excellence est en effet délaissé à tel point depuis une quarantaine d’années, que toute nouvelle tentative de le ranimer ponctuellement se voit confrontée à des attentes démesurées. Tandis que les réfractaires à l’opéra de chevaux y guettent la confirmation de son caractère désuet, les grands nostalgiques anticipent sans relâche une véritable renaissance, qui se fait toujours attendre, en dépit des vaillants efforts de réalisateurs comme Clint Eastwood et Kevin Costner. Quelle que soit la qualité des westerns du nouveau millénaire, ils partent d’emblée avec un lourd bagage d’exigences contradictoires, impossible à porter et encore accru dans le cas présent par l’histoire mouvementée de la production de Jane got a gun, dont la réalisatrice initiale Lynne Ramsay avait renoncé avant même le début du tournage. Au lieu d’être une histoire puissante de vengeance au féminin, le sixième film de Gavin O’Connor se montre le plus faiblard dans le portrait de cette femme forte que Natalie Portman ne réussit jamais à faire exister au-delà du stade de la névrose. Au moins, ses amis et ses ennemis masculins sont plus savoureux, même s’ils ne permettent pas non plus à faire dissiper totalement une ambiance de médiocrité filmique.

Synopsis : En 1871, Jane Ballard vit avec sa fille sur une ferme reculée au Nouveau Mexique. Quand son mari Bill Hammond y retourne à moitié mort, le dos criblé d’impacts de balles, pour lui annoncer que le bandit John Bishop et sa bande ont retrouvé leur trace et qu’ils ne tarderont pas à débarquer, Jane ne peut se tourner que vers son ancien fiancé Dan Frost pour demander de l’aide. Celui-ci accepte à contrecœur, puisqu’il regrette toujours amèrement que Jane ne l’ait pas attendu à la fin de la guerre pour partir avec l’ancien contre-maître de Bishop.

Les gentils restent gentils

En tant que productrice et actrice principale, Natalie Portman a été suffisamment impliquée dans ce projet pour qu’on puisse lui imputer sans peine son échec relatif. Pour être tout à fait franc, nous avons trouvé son interprétation carrément mauvaise, surtout lors de l’annonce d’une nouvelle néfaste où Jane se tord sur son lit en criant. Pendant le reste du film, le jeu de Portman n’arrive guère à traduire d’une façon saisissante les tourments intérieurs de cette femme en détresse, qui doit désormais assumer les conséquences très graves de ses choix du passé. Le besoin vital pour elle de passer à l’action y est constamment miné par une forme de faiblesse narcissique, qui – plutôt que de renforcer l’ambiguïté du personnage – contribue irrémédiablement à sa fadeur. Cette médiocrité assez ennuyeuse se retrouve également du côté du scénario et de la mise en scène, ni l’un, ni l’autre en mesure de susciter autre chose qu’un ton fâcheusement détaché. Le langage visuel de Gavin O’Connor est toujours aussi peu exceptionnel, alors que l’histoire qu’il raconte cette fois-ci est aussi platement manichéenne que celle de son film précédent, le duel fraternel sur fond d’arts martiaux mixtes dans l’encore plus navrant Warrior.

Et les méchants restent méchants

Au moins, certains personnages masculins tentent de tirer leur épingle du jeu, avec un succès variable. Si l’on fait abstraction du gâchis du beau Rodrigo Santoro, caché sous le maquillage administré par Greg Cannom et son équipe au point d’être méconnaissable, ainsi que de Noah Emmerich dans le rôle du mari moribond, alité et donc condamné à l’inaction, il nous restent deux antagonistes assez développés pour tirer la facture globale du film vers le haut. Le méchant campé par Ewan McGregor est certes caricatural avec son goût pour la torture gratuite, mais le jeu très peu grandiloquent de l’acteur le rend inquiétant malgré le sort trop conventionnel que l’intrigue lui réserve. Quant à Joel Edgerton, le premier amour du personnage principal qui doit se contenter de l’emploi ingrat de sbire, il contribue le seul point réellement positif au film, grâce à son interprétation calme et assurée. Cette dernière apporte un centre de gravité à Jane got a gun, qui serait sinon resté sans un zeste de verve.

Conclusion

Les westerns ne sont malheureusement plus produits en quantité. Ce qui aurait été un représentant solide, quoique point exceptionnel, du genre il y a un demi-siècle apparaît du coup plus décevant dans le contexte actuel, où chaque nouveau western doit raviver à lui seul le mythe de la pénible et héroïque conquête de l’Ouest. En dehors de l’interprétation pour le moins problématique de Natalie Portman, Jane got a gun ne commet aucune faute irréparable à l’égard des règles rigides du genre. Il ne cherche par contre pas non plus à les dépasser par quelque ingéniosité formelle ou narrative que ce soit.

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