Critique : Une histoire américaine

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Une histoire américaine

France, 2015
Titre original : –
Réalisateur : Armel Hostiou
Scénario : Armel Hostiou, Vincent Macaigne et Léa Inès Cohen
Acteurs : Vincent Macaigne, Kate Moran, Sofie Rimestad
Distribution : Ufo Distribution
Durée : 1h26
Genre : Drame romantique
Date de sortie : 11 février 2015

Note : 3/5

Quand un amour se meurt, c’est rarement beau à voir. En conséquence et pour mieux répondre à sa vocation de divertissement, le cinéma préfère explorer l’extrémité opposée des aventures romantiques, lorsque au début tout paraît encore possible et que le partenaire ressemble à l’illusion d’un idéal féminin ou masculin. Rien que pour le fait d’oser nager à contre-courant, le deuxième film de Armel Hostiou mériterait nos félicitations. Il le fait de surcroît avec une telle franchise émotionnelle, nullement complaisante et pourtant capable de rendre attachant un personnage a priori odieux, que nous ne pouvons qu’en rester subjugués. Sans oublier qu’Une histoire américaine donne une fois de plus un rôle taillé sur mesure à Vincent Macaigne, le perdant piteux le plus sympathique du cinéma français actuel.

Synopsis : Le Français Vincent a suivi son ex-copine Barbara à New York. Tandis qu’elle a déjà tourné la page de leur relation, en trouvant un nouvel amant, lui, il se raccroche au souvenir d’un passé plus heureux. Barbara lui accorde un dernier rendez-vous, mais l’implore ensuite de la laisser tranquille et de rentrer chez lui. Inconsolable, Vincent est à la dérive, passant de bar en bar pour noyer son dépit amoureux dans l’alcool. Il y croise Sofie, une chanteuse danoise, qui tente de l’aider. Mais peu importe les signes décourageants que Barbara lui envoie, Vincent n’arrive pas à oublier la femme de son cœur.

New York, New York

Le pendant de notre sujet d’analyse de prédilection – les personnages américains à l’étranger et leur incapacité de s’y adapter à des cultures différentes de la leur – est souvent conjugué d’une manière plus nuancée que dans le cas de ces touristes d’outre-Atlantique, qui ramènent dans leur bagage la totalité des préjugés xénophobes. Suivre le temps d’un film un immigrant temporaire ou permanent aux Etats-Unis, cela nous permet de voir autrement un pays dont l’apparence factice est soigneusement orchestrée par la machine à propagande de Hollywood. Le tout premier plan pendant le générique au début de ce film, pris depuis le téléphérique en parallèle du pont Queensboro, nous donne ainsi un aperçu saisissant de New York, sur fond d’une musique qui traduit parfaitement la poésie sauvage de la métropole de la côte Est. Par la suite, nous accompagnons cet intrus qu’est indubitablement Vincent dans une odyssée à travers des quartiers investis d’une fraîcheur et d’une vivacité d’autant plus étonnantes qu’ils constituent un mélange de décors urbains peu représentés au cinéma et ceux grâce auxquels nous reconnaissons immédiatement cette ville mythique, quoique photographiés ici à une saison guère valorisante. Il ne nous paraît point exagéré de considérer la ville comme un personnage à part entière dans ce film, qui n’en accentue pourtant pas les aspects glauques. Ceux-ci se situent davantage au niveau psychologique d’un homme consumé par son obsession.

Un pot de colle

Un enfant, un monstre, un amoureux éconduit : Vincent est tout cela à la fois. Il ne serait qu’une loque humaine, échouée sur les rives du Hudson, s’il ne cherchait à exorciser son malheur en le partageant avec les autres. De ces rencontres impromptues naissent des moments de grâce, dont la fonction principale en termes de narration consiste à mettre le protagoniste devant le fait accompli de la rupture, qu’il l’accepte ou pas. Toute la tragédie de ce personnage involontairement comique réside dans son refus obstiné d’admettre qu’il n’y a plus rien à faire pour reconquérir Barbara. En fin de compte, il préfère une existence fantomatique dans la même ville qu’elle à un nouveau départ ailleurs ou avec une autre femme. Avant d’en arriver à cet épilogue empreint d’une résignation déprimante, le récit n’hésite pas à mettre Vincent dans des situations incroyablement embarrassantes, de plus choisies par lui-même. Le comble du masochisme mesquin est atteint lors de la séquence magnifique du jus d’orange / de la bague, où il fait complètement fi de la réalité pour mieux malmener son concurrent et in extremis se ridiculiser au plus haut point.

Conclusion

Rarement, les contes de perdants sont aussi justes et touchants que le deuxième film de Armel Hostiou. Il aménage une bulle cinématographique de toute beauté à son personnage, interprété à la perfection, dans toute sa noblesse misérable, par Vincent Macaigne. La plus grande qualité du film réside cependant dans son choix courageux de laisser imploser ce microcosme d’une illusion romantique, sans préparer une quelconque bouée de sauvetage à cet homme, qui aurait pu retrouver le bonheur, si seulement il avait su lâcher prise au moment opportun.

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