Critique : True story

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True story

Etats-Unis, 2015
Titre original : True story
Réalisateur : Rupert Goold
Scénario : Rupert Goold et David Kajganich, d’après le livre de Michael Finkel
Acteurs : Jonah Hill, James Franco, Felicity Jones, Ethan Suplee
Distribution : 20th Century Fox France
Durée : 1h40
Genre : Thriller
Date de sortie : 16 septembre 2015

Note : 2,5/5

Les deux institutions de leur civilisation dont les Américains se montrent particulièrement fiers sont la justice et la presse. L’indépendance supposée de ces piliers de l’idéal américain, basé sur la liberté d’entreprendre et de penser, est un point d’honneur incontournable pour quiconque réclame son appartenance au peuple de l’Oncle Sam. Le cinéma hollywoodien se fait régulièrement le chantre de cette foi inébranlable en la complémentarité des forces de la loi et de la plume. Ces dernières finiront tôt ou tard par imposer leur point de vue assez réactionnaire dans des films qui ne le sont pas moins. Une petite prise de position tendancieuse n’aurait par contre pas fait de mal à True story, un premier film désagréablement indécis, dont la mollesse résulte avant tout de la faiblesse de caractère du protagoniste. Heureusement dans le camp adverse, où les choses ne sont pas pour autant plus claires, l’interprétation à peu près remarquable de James Franco sauve le film du naufrage complet.

Synopsis : Le journaliste Michael Finkel, un membre respecté de la rédaction du New York Times, est viré du jour au lendemain quand il s’avère que son dernier reportage avait pris des libertés avec la vérité. De retour dans le Montana, sans travail et sans espoir d’en retrouver un prochainement, Finkel est abordé par un confrère, qui voudrait recueillir son commentaire avant le procès de l’assassin présumé Christian Longo. Le journaliste tombe des nues, quand il apprend que Longo s’était fait passer pour Michael Finkel lors de son arrestation au Mexique. Il part à sa rencontre et est finalement si fasciné par l’histoire de cet homme simple et sain d’esprit, qui aurait tué de sang froid sa femme et ses trois enfants, qu’il décide de lui consacrer un livre. Mais le lien de plus en plus étroit qu’il entretient avec Longo finit par le faire douter de sa culpabilité.

Un casse-tête très creux

Quelle étrange idée de la part du réalisateur Rupert Goold de faire endosser le rôle du héros ambigu de son premier film par un acteur aussi peu charismatique que Jonah Hill ! La symbiose entre le comédien et son personnage n’est certes pas un échec total, puisque Hill s’emploie vaillamment à mettre en avant l’aspect moralement peu recommandable de ce journaliste trop facile à manipuler. Mais c’est justement cette faiblesse de caractère qui rend Michael Finkel si antipathique. Même sous les traits d’un acteur moins complexé, il n’est pourtant pas certain que l’intrigue aurait mieux fonctionné. Car c’est la structure narrative tout entière de True story qui montre très tôt ses limites. Le déséquilibre constant entre les enjeux supposés de l’histoire et leur agencement, ainsi qu’un suspense quasiment inexistant, font que le récit n’atteint presque jamais un niveau d’intensité satisfaisant. Tandis que de brèves séquences sans queue, ni tête abondent, et que le montage embrouille le fil narratif au lieu de le rendre plus vigoureux, le journaliste guère vertueux tourne en rond dans l’apitoiement et – pire encore – dans un manque de perspicacité proprement frustrant.

Les milles facettes de James Franco

La bouée de sauvetage tant soit peu efficace pour ne pas vouer ce film à l’insignifiance totale prend la forme de l’interprétation curieuse de James Franco. Elle nous paraît d’ailleurs curieuse parce qu’elle ne s’avère guère plus solide que la facture globale de ce thriller anémique. Inégale à souhait, elle préserve néanmoins un degré d’imprévisibilité, voire un grain de folie, qui font sinon cruellement défaut au film. Tant que nous pouvons le juger à partir de la version française, hélas la seule dans laquelle True story a été distribué, sortie technique oblige, l’acteur réussit à brouiller les pistes sans jamais faire de son personnage ni un ange, ni un démon. La familiarité qui résulte du fait que James Franco est absolument partout, en fanatique du travail dangereusement surexposé qui se respecte, confère un petit côté traître à Christian Longo. Car derrière son air de beau gosse docile et exemplaire, au fâcheux détail près d’avoir eu un coup de folie meurtrière, le jeu ambigu de Franco nous laisse au moins soupçonner d’horribles profondeurs cachées. Ce sont donc exclusivement ses rencontres avec son idole journaliste qui insufflent un peu de vie au film, alors que les plans récurrents plus descriptifs sur son quotidien en prison ou les retours en arrière sur le cliché d’une vie de famille heureuse et harmonieuse soulignent au contraire le peu de maîtrise de la part de la réalisation de Rupert Goold.

Conclusion

Notre effort personnel de rattraper dans la mesure du possible les films gratifiés d’une misérable sortie en catimini, alors qu’ils auraient éventuellement mérité mieux, ne s’avère pas toujours gagnant. Dans le cas de True story, le constat final n’est pas tout à fait désespérant, grâce à la contribution intrigante de James Franco. Sans lui, il n’y aurait toutefois pas grand-chose à sauver dans ce huis-clos dépourvu de la moindre densité dramatique.

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