Test Blu-ray : Un homme est mort

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Un homme est mort

États-Unis, France, Italie : 1972
Titre original : The Outside Man
Réalisation : Jacques Deray
Scénario : Jean-Claude Carrière, Jacques Deray
Acteurs : Jean-Louis Trintignant, Ann-Margret, Roy Scheider
Éditeur : Gaumont
Durée : 1h44
Genre : Policier, Thriller
Date de sortie cinéma : 18 janvier 1973
Date de sortie DVD/BR : 18 octobre 2023

Après avoir perdu aux jeux, Lucien Bellon s’engage auprès d’Antoine, un truand, à tuer un homme à Los Angeles. Sur place, tout a été organisé pour qu’il puisse exécuter au mieux sa mission. Sous un nom d’emprunt, il obtient un rendez-vous avec sa victime, et l’abat. Mais sur le point de repartir, c’est lui qui devient à son tour la cible d’un mystérieux tueur, à qui il lui faut maintenant échapper…

Le film

[3,5/5]

Un homme est mort est un polar de Jacques Deray, ayant la particularité notable d’avoir été tourné aux États-Unis. Il s’agit de fait d’un polar hybride, à mi-chemin entre deux sensibilités, deux visions du film policier. D’un côté, on y retrouve l’atmosphère glaciale, l’attention portée aux détails et l’ambiguïté morale des policiers et des truands qui ont fait tout le sel du genre en France à la fin des années 60, grâce notamment aux chefs d’œuvres de Jean-Pierre Melville Le Samouraï (1967) et Le Cercle rouge (1970). De l’autre, on sent également l’influence écrasante du Film Noir américain, et surtout du « Néo-Noir », avec des films tels que À bout portant (Don Siegel, 1964), Le Point de non-retour (John Boorman, 1967) ou même Le Privé (Robert Altman, 1973), qui ne sortirait qu’un an plus tard, mais avec qui Un homme est mort partage de nombreux points communs.

Peut-être cette atmosphère quasi-nihiliste a-t-elle été inspirée à Jacques Deray par son décor – la ville de Los Angeles, toujours est-il qu’Un homme est mort s’impose au final comme une espèce de mélange, imparfait mais très attachant, du film de gangsters français à la Melville et du Film Noir réinventé à la sauce post-68. On sent ainsi que Lucien, le tueur à gages incarné à l’écran par Jean-Louis Trintignant, a tiré les leçons d’Alain Delon en mode Samouraï : même s’il est traqué par les flics et la mafia de tout le pays, même si la violence explose de tous les côtés autour de lui (en partie grâce à un Roy Scheider particulièrement hargneux), rien ne pourra ébranler sa nonchalance naturelle. Rien ne pourra non plus le départir de son flegme en mode quasi-playboy mystérieux et nostalgique : on se rendra ainsi vite compte que Lucien est le genre d’homme auquel aucune femme ne résiste, qu’il s’agisse de la strip-teaseuse de passage (Connie Kreski), de l’ancienne danseuse au cœur d’artichaut (Ann-Margret) ou même de l’épouse du bad guy (Angie Dickinson).

Vous l’aurez compris, Un homme est mort est centré sur le personnage de Jean-Louis Trintignant, qui tient sur ses épaules une partie de la réussite du film. De son côté, Jacques Deray semble bien déterminé à opter pour un rythme soutenu, éludant délibérément les explications ou scènes de dialogue un peu trop longues, et plongeant le spectateur directement au cœur de l’action. Les passages du film fonctionnant le mieux sont d’ailleurs ceux qui s’efforcent de communiquer au public la situation inextricable dans laquelle se trouve Lucien. Jacques Deray est assez habile lorsqu’il s’agit de faire naître un réel sentiment d’urgence, et la performance de Jean-Louis Trintignant souligne volontiers le sentiment de solitude qui étreint le personnage principal, perdu dans un pays étranger, n’ayant personne à qui se fier, et ne sachant vers qui se tourner.

De fait, la plupart du temps, cette structure narrative évoluant la tête dans le guidon fonctionne plutôt bien, dans le sens où elle est calquée sur l’état d’esprit du personnage principal, autour de qui les événements se précipitent et deviennent de plus en plus violents au fur et à mesure que le film avance, jusqu’à un climax extrêmement efficace prenant place dans un funérarium. Pour l’anecdote, on trouvera aussi au casting du film le nom de Jackie Earle Haley, dans son premier rôle à l’écran : le futur interprète de Rorschach (Watchmen : Les Gardiens, 2009) et Freddy Krueger (Freddy : Les Griffes de la nuit, 2010) y était alors seulement âgé de 11 ans.

Le Blu-ray

[4/5]

C’est sous les couleurs de Gaumont que nous parvient aujourd’hui le Blu-ray d’Un homme est mort, et les amoureux du film seront probablement aux anges en découvrant le rendu visuel proposé par l’éditeur, puisque le film a bénéficié d’une restauration 4K effectuée avec soin à partir des négatifs originaux. Le film est proposé en 1080p et au format respecté, et ce dans ses deux montages : certaines scènes du film ont en effet été tournées à la fois en français et en anglais, la particularité du montage « français » étant d’être proposé en 1.66, tandis que le montage américain est en 1.85. Globalement, et dans les deux cas, l’image est stable et plutôt propre, la granulation d’origine est parfaitement respectée et le piqué s’avère d’une parfaite précision. Les couleurs sont naturelles, les contrastes solides, et l’ensemble est parfaitement stable. Niveau son, VO et VF sont proposées dans des mixages DTS-HD Master Audio 2.0 très satisfaisants, qui présentent un bon équilibre entre les dialogues et la musique ; on repère des voix parfois légèrement étouffées sur la VF, un défaut qui s’avère peut-être un peu moins perceptible sur la version américaine.

Côté suppléments, en plus des deux montages du film que l’on vient d’évoquer, l’éditeur Gaumont nous propose une intéressante présentation du film par Olivier Père (37 minutes), qui s’efforcera de replacer le film dans son contexte ainsi que dans la carrière de Jacques Deray. Cette présentation s’accompagnera d’un entretien avec Jean-Yves Katelan (17 minutes). Auteur avec Serge Korber d’une biographie de Jean-Louis Trintignant (« Jean-Louis Trintignant – Dialogue entre amis », Editions de la Martinière, 2020), le journaliste reviendra de façon assez passionnante sur la place du film dans la carrière de l’acteur. On terminera enfin par la traditionnelle bande-annonce du film.

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