Test Blu-ray : Spasmo

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Spasmo

Italie : 1974
Titre original : –
Réalisation : Umberto Lenzi
Scénario : Pino Boller, Massimo Franciosa, Umberto Lenzi, Luisa Montagnana
Acteurs : Robert Hoffmann, Suzy Kendall, Ivan Rassimov
Éditeur : BQHL Éditions
Durée : 1h34
Genre : Thriller, Fantastique, Giallo
Date de sortie DVD/BR : 5 mars 2020

Playboy et fils d’un riche industriel décédé, Christian tombe sous le charme de Barbara, une jeune et jolie femme qu’il découvre évanouie sur une plage. Lorsque, peu après, il la retrouve sur un yacht, celle-ci l’entraîne dans un maelström d’événements étranges et cruels, de meurtres et de faux-semblants. Avec le sentiment d’être pris au piège d’une gigantesque toile d’araignée, Christian croit trouver la clef de l’énigme en se faisant passer pour mort, y compris auprès de son propre frère, quelqu’un qui paraît beaucoup plus stable que lui sur le plan psychologique…

Le film

[4/5]

Étrange film que ce Spasmo. Absolument surréaliste dans ses rebondissements, illogique et irrationnel dans son déroulement (les personnages semblent vraiment agir en dépit du bon sens, en plus d’apparaître et disparaître comme par enchantement), souvent complètement grotesque dans ses dialogues, ce faux giallo pourrait afficher, pour certains spectateurs, toutes les allures du gros nanar des familles, réalisé par un quelconque artisan du bis rital des années 70’s. C’est d’autant plus flagrant que la réalisation de Lenzi, riche en zooms intempestifs, donne par moments une impression de maladresse que l’on pourra, au choix, trouver soit amusante, soit affligeante.

Cependant, en d’autres occasions, ce dernier s’avère également d’une habileté folle dans la caractérisation visuelle des personnages, et le montage ultra-serré – on pense notamment à la découverte des animaux dans la maison / phare – contribue grandement à faire monter une impression de malaise et d’étrangeté qui ne lâche jamais réellement le spectateur, du début du film jusqu’à la toute dernière image d’ailleurs. Allez, soyons honnête un instant : même Kubrick se lâchait sur les zooms / dézooms dans Shining, et sans doute d’une façon encore plus spectaculaire (entendez « ridicule ») que Lenzi ici. Et si l’on excepte ce recours au zoom typique du cinéma bis, on admettra donc qu’Umberto Lenzi était loin d’être manchot avec sa caméra : aussi Spasmo est-il finalement rempli jusqu’à la gueule de plans habilement construits ou très marquants, et même parfois de véritables fulgurances graphiques.

Alors accrochez-vous, laissez-vous porter par la narration biscornue et bizarre adoptée par Lenzi : Spasmo vaut indéniablement la peine d’aller regarder un peu plus loin. Déjà parce que ce thriller rital a la particularité d’être un whodunit sans crime, et que c’est déjà intriguant (pourquoi ce petit monde s’agite-t-il dans le fond, puisqu’il n’y a ni assassin ni victime ?). Ensuite parce que la musique de Morricone, aux limites de l’expérimental par moments, ajoute vraiment une ambiance lourde, presque délétère au métrage, ce qui a pour effet de lui conférer des airs de cauchemar éveillé… Impression qui laisserait presque penser que le script du film donne volontairement cette impression de nawak permanent, presque digne d’une expérience d’écriture automatique. Alors, Lenzi, précurseur de Lynch ? En quelque sorte…

Spasmo au final c’est donc une maîtrise formelle indéniable et une écriture irrationnelle au service d’un film vraiment bizarre, tellement grotesque qu’il flirte souvent avec le ridicule, mais devant lequel il convient sans doute de baisser les armes et de se laisser porter, comme devant un trip 100% sensoriel, jusqu’à un final vraiment réussi.

Le Blu-ray

[4/5]

Le catalogue Blu-ray que s’est composé BQHL Éditions depuis quelques années est décidément placé sous le signe de l’éclectisme : après quelques films issus du catalogue de la 20th Century Fox ou d’Universal, l’éditeur prend tout le monde à revers en nous proposant aujourd’hui de (re)découvrir le giallo Spasmo. Une excellente initiative tout à fait réjouissante qui nous permet de retrouver le film d’Umberto Lenzi sur support Blu-ray. L

On salue donc bien bas cette initiative inattendue et courageuse ainsi que l’effort éditorial de BQHL Éditions, qui nous permet d’enfin revoir Spasmo dans des conditions de visionnage que l’on pourra sans trop de peine qualifier d’optimales vu l’âge du film. Certes, on dénotera un léger grain en basse lumière, mais définition, piqué et niveau de détails affichent un niveau inédit, bien supérieur à la séculaire édition DVD du film, sortie en 2007 sous les couleurs de Neo Publishing. Côté son, on se laissera séduire par les deux mixages Dolby Digital 2.0, comprenant la version anglaise du film ainsi que l’horrible, abominable version française du DVD de 2007 dont le doublage est notamment assuré par Michael Rudy Cermeno et Sylvie Santelli, probablement créé au sein d’une de ces petites boites de doublage peu chères basées en Espagne.

Et si le chapitrage du film est toujours effectué de façon arbitraire, cette livraison de Spasmo en Haute-Définition comporte bien une section suppléments, qui recyclera tout d’abord l’entretien avec Umberto Lenzi (16 minutes) déjà disponible sur le DVD de 2007, au cœur duquel le cinéaste reviendra sur le film sans fausse modestie, voire même en gonflant un peu ses qualités et son statut de précurseur au sein du cinéma italien. Nous aurons également droit à une séance de questions-réponses entre le public et Umberto Lenzi, enregistrée lors du Festival du film fantastique de Manchester (2013, 25 minutes). Il y reviendra sur la façon dont il est arrivé au cinéma, à ses trois films préférés (Paranoia, Si douces si perverses et Le couteau de glace – bientôt disponible chez Le chat qui fume !), au fait qu’il a détesté Cannibal Ferox durant de nombreuses années, etc. Très intéressant !

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