Test Blu-ray : Noce blanche

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Noce blanche

 
France : 1989
Titre original : –
Réalisation : Jean-Claude Brisseau
Scénario : Jean-Claude Brisseau
Acteurs : Vanessa Paradis, Bruno Cremer, Ludmila Mikaël
Éditeur : Carlotta Films
Durée : 1h32
Genre : Drame
Date de sortie cinéma : 8 novembre 1989
Date de sortie DVD/BR : 4 septembre 2019

 

François, 49 ans, marié, est professeur de philosophie dans un lycée de Saint-Étienne. Mathilde, 17 ans, est l’une de ses élèves, un personnage solitaire et énigmatique. Ses absences répétées ont conduit les enseignants à ne plus l’accepter en cours. François s’intéresse à la jeune fille et accepte de lui donner des cours particuliers. Le professeur et son élève vont bientôt tomber follement amoureux l’un de l’autre…

 


 

Le film

[4/5]

La carrière et le cinéma de Jean-Claude Brisseau (1944-2019) ont été assombris par une sombre affaire de mœurs en 2005/2006, et depuis une dizaine d’années, son œuvre n’était plus vraiment – et c’est un euphémisme – placée sous les feux des projecteurs. Même lors de son disparition au mois de mai dernier, rares sont les médias qui ont pris le temps de saluer son immense talent. Grâces soient donc rendues à Carlotta Films, qui nous permet ce mois-ci avec la sortie en Blu-ray de ses trois premiers films de remettre en avant une figure majeure du cinéma français…

S’il n’a jamais caché qu’il s’agissait de son film le moins personnel, dans le sens où il s’agissait d’un film de commande dont la production a été débloquée au moment du succès cannois de De bruit et de fureur l’année précédente, Noce blanche est indéniablement le film le plus célèbre de Jean-Claude Brisseau. Le film fut en effet un des événements cinéma de l’année 1989 : en réunissant quasiment 1,9 millions de français dans les salles obscures, il s’impose comme le deuxième plus gros succès de l’année, après le superbe Trop belle pour toi de Bertrand Blier. Lors de la 15ème cérémonie des César début 1990, Vanessa Paradis décrochera d’ailleurs le César du meilleur espoir féminin. Une récompense amplement méritée d’ailleurs, tant la jeune actrice apporte au film une touche supplémentaire de mystère et surtout de malaise dans le couple qu’elle forme à l’écran avec Bruno Cremer.

Car le contraste entre la « petite » Vanessa Paradis, 16 ans, 1m60, et la carrure de géant de Bruno Cremer, 60 ans, 1m83, est réellement saisissant – malgré sa taille finalement pas si immense sur le papier, il doit carrément se baisser pour passer les portes de sa maison à la campagne, ce qui accentue encore l’impression de force tranquille du personnage, au centre de cette histoire d’amour et de passion destructrice qui le laissera littéralement en miettes. Impressionnant, imposant le silence, Bruno Cremer livre à nouveau ici une prestation de haute volée, bouleversante. Il faut dire aussi que Jean-Claude Brisseau est parvenu à s’approprier de façon assez fine ce travail de commande, en y amenant ses thématiques propres – sur l’éducation, le passage à l’âge adulte ainsi que le sens de l’existence – même s’il doit également mettre le frein sur beaucoup des éléments formels qui faisaient – et continueraient à faire – son cinéma, telles que la violence, l’éveil à la sexualité (ici traité hors champ et de la façon la plus pudique qui soit, sans le moindre voyeurisme) ou encore le recours à une symbolique quasi-mystique ou à des éléments fantastiques.

Mais la grande force – ainsi que la grande originalité – de Noce blanche est surtout de proposer une histoire d’amour très éloignée de celles que l’on a l’habitude de voir au cinéma. En effet, contrairement à la grande majorité des films, celui de Brisseau a l’intelligence de développer une histoire d’amour non pas basée sur une simple attirance physique – le personnage de Bruno Cremer affirme lui même n’avoir jamais eu le moindre penchant pour les gamines – mais au contraire sur une véritable communion intellectuelle et philosophique. C’est en effet en découvrant la personnalité désenchantée et solitaire de son élève que le prof tombera sous le charme, comme s’il découvrait son propre « double », une âme sœur que la morale et la pression sociale empêchent d’aimer comme il le voudrait. Et si le film de Brisseau perd un peu en intensité lors de sa troisième partie, à cause de sa tendance à lorgner du côté de Liaison fatale, c’est finalement pour mieux renouer avec l’émotion lors d’un final aussi poignant que douloureux.

 

 

Le Blu-ray

[5/5]

C’est donc Carlotta Films qui, parallèlement à Un jeu brutal et De bruit et de fureur, édite aujourd’hui Noce blanche dans un superbe Blu-ray. L’image du film, restaurée 2K, est exempte de défauts : l’encodage en 1080/24p ne pose aucun problème, les couleurs sont naturelles, la définition sans faille, le piqué précis, et la profondeur de champ impeccable. On notera également que le format du film, l’inhabituel 1.37:1, a été préservé, de même que la granulation d’origine : c’est du beau travail technique. Côté son, l’éditeur propose un mixage en DTS-HD Master Audio 1.0, subtil et équilibré.

Au rayon des suppléments, Carlotta recyclera la riche interactivité de l’édition DVD « 10ème anniversaire » de 2010 : on aura donc l’opportunité de se replonger dans un passionnant entretien avec Jean-Claude Brisseau (54 minutes), qui reviendra sur son parcours ainsi que sur la genèse et les différents secrets de tournage autour de Noce blanche. Comme toujours, le cinéaste était généreux et passionnant dans la manière subtile avec laquelle il déconstruit complètement son cinéma en explicitant la plupart de ses choix artistiques. On continuera avec un entretien avec Ludmila Mikaël (23 minutes), qui revient sur sa rencontre avec Jean-Claude Brisseau, le tournage du film et l’importance qu’a pu avoir le film dans sa carrière. Contrairement à l’idée que l’on pouvait se faire de lui, elle insiste ici sur l’extrême délicatesse du cinéaste. On poursuivra ensuite avec une série de scènes commentées par Bruno Cremer (39 minutes) : ce dernier commente le début du film en louant la finesse d’écriture et de mise en scène de Jean-Claude Brisseau ; il propose par ailleurs un regard assez différent sur le personnage qu’il incarne. On terminera ensuite par la traditionnelle bande-annonce, qui s’accompagnera d’une quinzaine de minutes de scènes coupées, commentées par le cinéaste. Complet et passionnant !

 

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