Test Blu-ray : Le Souffle maudit / Demon Wind

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Le Souffle maudit / Demon Wind

États-Unis : 1990
Titre original : Demon Wind
Réalisation : Charles Philip Moore
Scénario : Charles Philip Moore
Acteurs : Eric Larson, Francine Lapensée, Jack Forcinito
Éditeur : Le Chat qui fume
Durée : 1h38
Genre : Horreur
Date de sortie Blu-ray : 15 avril 2022

Californie, 1991. Après le suicide de son père, Cory, désireux d’éclaircir son passé, retourne dans la ferme familiale où vivaient autrefois ses grands-parents, mystérieusement disparus soixante ans plus tôt. Dans cette expédition, le jeune homme s’entoure de sa copine Elaine et de quelques amis. Une fois sur place, Cory et ses camarades sont bientôt assaillis par une horde de démons…

Introduction

Le Chat qui fume et les films que vous ne verrez jamais sur Netflix – Vague 1

L’explosion de Netflix et de quelques autres services de SVOD en France a, en l’espace de quelques années seulement, considérablement affaibli le secteur de la vidéo physique en DVD et Blu-ray. Aujourd’hui, les éditeurs vidéo doivent avoir recours à différentes astuces afin de maintenir les consommateurs dans leur giron. Cela dit, grâce à une présence accrue sur les réseaux sociaux, à des éditions collector en pagaille et à de « beaux objets » prenant la forme de luxueux coffrets, Le Chat qui fume est peu à peu parvenu à faire son trou dans le cul cœur des cinéphiles français, et à devenir un des acteurs les plus incontournables de son secteur d’activités.

Cependant, ce n’est pas parce qu’on s’est imposé comme le leader incontesté qu’il faut se reposer sur ses lauriers, et quitte à prendre des risques, Le Chat qui fume vient encore d’innover, en lançant le mois dernier une nouvelle série de films d’exploitation au format Blu-ray. Peut-être considérés comme un peu plus « obscurs » que les autres films disponibles dans le catalogue de l’éditeur, les cinq premiers titres de cette série parallèle sont de bonnes grosses raretés des années 70/80/90, ne faisant peut-être pas partie des plus connues et prestigieuses, mais ayant régalé les écumeurs de vidéoclubs à la grande époque de la VHS triomphante. Proposés à bas prix et dans des boîtiers standard, ces cinq films bénéficient de l’expérience – désormais unanimement reconnue – du Chat qui fume en matière de soin éditorial, et s’offrent de fait des éditions Blu-ray absolument inespérées.

Les cinq raretés proposées par Le Chat qui fume au sein de cette première vague sont :

Draguse ou le Manoir infernal – Patrice Rhomm, 1976

L’Aube sauvage (Savage Dawn) – Simon Nuchtern, 1985

Le Souffle maudit (Demon Wind) – Charles Philip Moore, 1990

Mutronics (The Guyver) – Screaming Mad George & Steve Wang, 1991

Red Mob (Chtoby vyzhit) – Vsevolod Plotkin, 1992

Si vous ne les avez peut-être pas tous loués dans les années 80/90, ces films, vous les connaissez tout de même, de nom ou de réputation – vous avez probablement lu des articles à leur sujet dans Mad Movies ou dans Impact, à la grande époque de Jean-Pierre Putters. On espère que ce galop d’essai trouvera son public, et saura attirer les amateurs de bandes déviantes vintage en France de la même façon qu’aux États-Unis. Cela fait un moment en effet que le marché a évolué dans cette direction aux États-Unis, pays où tous les nanars bénis de l’époque de la VHS, même les plus improbables ou les plus méconnus, voient le jour en Haute-Définition. Une bonne affaire pour des cinéastes tels que Fred Olen Ray, David DeCoteau, Jim Wynorski, Andy Sidaris, Rick Sloane, Kevin Tenney, Douglas Hickox ou Albert Band, hier méprisés, aujourd’hui largement remis sur le devant de la scène…

Si on est loin, très loin, d’en être au même point en France, Le Chat qui fume a tout de même fait le choix avec cette vague de se tourner vers le passé, quitte à exhumer de petits films que l’on n’aurait jamais cru voir débarquer en France il y a encore quelques années. Dans les 80’s, le crédo des éditions René Chateau était de nous donner à découvrir « les films que vous ne verrez jamais à la télévision ». Se posant dans la continuité de l’éditeur historique, Le Chat qui fume semble aujourd’hui bien déterminé à offrir au consommateur « les films que vous ne verrez jamais sur Netflix ».

Le film

[5/5]

Si beaucoup de cinéphiles risquent aujourd’hui de découvrir Demon Wind grâce à la sortie Blu-ray que nous propose Le Chat qui fume, on notera tout de même que le film de Charles Philip Moore avait déjà connu une petite « vie » en France, au début des années 90. On se souvient en effet que le film s’était imposé, au début des 90’s, comme un véritable « hit » de vidéo-club, dans la sacro-sainte section « Fantastique / Horreur » de votre repaire préféré. De la même manière qu’un film tel que L’Autoroute de l’enfer, sorti en VHS à peu près à la même période et chez le même éditeur (à savoir Gaumont Columbia Tristar Home Video), le film avait donc été distribué sous le titre Le Souffle maudit. Il s’agit de l’une de ces séries B devant lesquelles d’innombrables ados s’étaient régalés à l’époque, mais qui par manque d’exposition fut malheureusement reléguée aux recoins les plus sombres de la mémoire collective quelques années plus tard. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que redécouvrir Demon Wind une trentaine d’années après l’avoir vu la première fois fait partie de ces gros kifs régressifs de gamin déviant – ce qui peut probablement être considéré comme l’équivalent cinéphage et chtarbé à ce que les lettrés appellent une « madeleine de Proust ».

La madeleine

Parce que si vous me permettez un aparté personnel, avoir découvert Demon Wind à 11, 12, 13 ans peut-être, ça laisse quelques marques dans une cinéphilie naissante. A l’époque, dans mon petit village paumé du Nord de la France, on était en effet quelques puceaux à surkiffer les films les plus barges qui nous passaient devant les yeux. C’était un autre temps, bien sûr, et je me souviens notamment qu’à l’époque je devais planquer mes numéros de Mad Movies sous mon T-Shirt pour ne pas me faire engueuler par ma mère en rentrant du collège. Parce que si ma mère se foutait complètement que je fusse un lecteur assidu de Fluide Glacial depuis le CM2, en revanche, elle avait un rapport étrange au cinéma d’horreur. Je me souviendrai sans doute toute ma vie de la scène qu’elle m’avait fait au rayon surgelés d’Auchan lorsque j’avais ramené la VHS d’Evil Dead, qui était sans doute en promo à un prix imbattable, m’affirmant qu’à force de regarder ce genre de films, j’allais finir par devenir fou. Bref, pour en revenir à Demon Wind, on était quand même quelques copains à ne jurer que par ce genre de films, au point même que l’un de mes camarades – pour qui Demon Wind et The Doom Generation de Gregg Araki étaient les deux films les plus épatants de la création – considère finalement sérieusement le film de Charles Philip Moore comme très supérieur au Evil Dead de Sam Raimi.

En toute honnêteté, on voit difficilement avec le recul comment encore tenir aujourd’hui ce genre de posture idéologique : si leurs intrigues présentent certes de nombreux points communs, Demon Wind n’est en rien comparable à Evil Dead en termes d’impact, de mise en scène ou encore de pérennité. Cependant, ce recours à un souvenir personnel pourra vous expliquer à quel point ce film, que l’on appelait alors encore Le Souffle maudit, a pu marquer un certain nombre de cinéphiles en herbe à une époque donnée, alors même que l’on conçoit également parfaitement que le commun des mortels ait pu, en parallèle, ne jamais en avoir entendu parler. D’ailleurs, ça serait pas ça la véritable nature d’un « Film Culte » ?

Tout ça pour dire que l’objectivité n’est pas à l’ordre du jour avec Demon Wind, et vous l’aurez probablement compris à la découverte de la note que l’on a attribuée au film. Beaucoup pourront la trouver exagérée, certes, mais croyez-moi, s’ils me lisent aujourd’hui, il y a tout un petit groupe de puceaux cinéphiles qui dévoraient de la bande VHS au sud de Lille au début des années 90 qui saura parfaitement où je veux en venir, et qui partage sans aucun doute encore aujourd’hui mon enthousiasme concernant ce petit film.

Demon Wind est en effet avant tout un film-plaisir, un concentré de fun suivant un groupe de jeunes gens faisant une « rencontre maléfique » à l’occasion d’une virée au milieu de nulle-part. L’exposition des enjeux et des différents personnages n’est pas ce que le scénariste / réalisateur Charles Philip Moore maîtrise le mieux, mais on navigue ici en pleine série B, et ce genre de poncifs ne devraient logiquement pas freiner les amateurs de cinéma de genre, d’autant que chacun des nombreux protagonistes du groupe aura une « fonction » toute désignée au cœur de celui-ci : il y a la brute de service, le confident, le dépressif, etc… Ils en venus, ils sont tous là, les clichés du genre, jusqu’au petit rigolo de la bande, à la fois magicien et adepte des arts martiaux. Une fois les présentations faites avec les personnages, la suite du récit s’amusera à les plonger dans une expérience visuelle macabre absolument délirante, très portée sur les maquillages de latex, le gore et les éléments narratifs les plus, hum, disons… déconcertants.

La mise en place de Demon Wind, fortement influencée par celle d’Evil Dead, réunit un groupe d’amis dans une ferme maudite, dans laquelle ils invoqueront accidentellement une menace mystérieuse aux pouvoirs maléfiques. Ce prétexte scénaristique sera l’occasion de voir, l’un après l’autre, les différents membres du casting transformés en démons assoiffés de sang. Des démons bien dégueu dans leur genre, difformes, affichant diverses protubérances de latex typiques de l’horreur dégoulinante de l’époque, et crachant volontiers des fluides gluants bien peu ragoutants. Et comme Demon Wind aime à aller un peu dans tous les sens, on aura également droit à un personnage transformé en poupée, à une démone se baladant les seins à l’air, incarnée par Tiffany Million, ex-catcheuse et future actrice de X, qui se recyclerait plus tard dans l’activité de chasseuse de primes, qui lui vaudrait en 2007 de devenir l’héroïne de la série Wife, Mom, Bounty Hunter sur la chaine WE : Women’s Entertainment. Du pain béni pour les amateurs de gros délire filmique !

Le Blu-ray

[4,5/5]

On continue notre exploration des différentes éditions Blu-ray estampillées Le Chat qui fume consacrées aux raretés des années 70/80/90 ayant fait le plaisir des amateurs de VHS avec Le Souffle maudit / Demon Wind. Comme les autres films de cette (première) vague, le film nous est présenté dans un boîtier plastique qui remplace le Digipack habituellement privilégié par l’éditeur, mais la composition de l’ensemble, que l’on doit au graphiste du Chat qui fume, Frédéric Domont (alias BaNDiNi), nous propose à nouveau un travail de création inspiré, qui permettra à cette édition de Demon Wind de s’harmoniser parfaitement avec les autres éditions simples Blu-ray sorties par Le Chat qui fume.

Côté master, le film de Charles Philip Moore ayant fait l’objet d’une restauration 2K, le bond qualitatif par rapport à la version que l’on connaissait du film – qui datait de l’époque de la VHS – est assez bluffant. Le travail de restauration est en effet pour le moins notable : la copie est de toute beauté, respectueuse du grain d’origine, mais permettant au piqué s’exprimer toute sa précision, le tout étant surmonté de couleurs naturelles et de contrastes solides. Le film est par ailleurs naturellement proposé au format 1.85 respecté, la définition ne pose pas de souci et les noirs sont denses et remarquablement gérés. Du très beau travail technique en somme… Côté son, nous aurons droit à deux mixages DTS-HD Master Audio 2.0 à la fois en VF et en VO, proposant dans les deux cas une excellente restitution acoustique de l’ambiance du film. L’ensemble est par ailleurs mixé sans souffle ni bruits parasites, les dialogues sont parfaitement clairs, et les sous-titres ne souffrent d’aucun problème particulier. La VF d’origine, pleine de charme et de voix connues, ravira les amateurs de versions françaises un peu surannées.

Du côté des suppléments, Le Chat qui fume nous gâte, avec un peu plus d’une heure de bonus : une aubaine pour un film si peu connu ! On commencera donc avec un entretien avec le producteur Sandy Horowitz (26 minutes), qui s’avérera d’ailleurs visiblement le premier étonné que quelqu’un puisse encore s’intéresser à ce film si longtemps après sa sortie initiale. Il reviendra donc sur son implication sur le projet de Charles Phillip Moore, ainsi que sur la façon dont il a laissé carte blanche à l’aspirant-cinéaste, sans jamais réellement s’occuper de ce que faisait. On continuera ensuite avec un entretien avec l’actrice Sherry Leigh (17 minutes), qui permettra au public de se faire une idée de l’ambiance sur le tournage de Demon Wind, qui a été réalisé dans des conditions climatiques très difficiles, avec un brouillard constant et un vent glacial. L’actrice évoquera également ses camarades de jeu, ainsi que ses rencontres avec les fans du film dans des conventions consacrées au cinéma d’horreur. On terminera le tour des interviews avec l’équipe par un entretien avec le directeur de la photographie Thomas Callaway (20 minutes), qui nous dressera un rapide historique de sa carrière à Hollywood avant de revenir plus précisément sur le tournage de Demon Wind, et sur les conditions difficiles déjà en partie évoquées par Sherry Leigh. On apprendra cela dit que les caméras utilisées sur le film avaient été achetées à l’acteur porno Ron Jeremy, et que l’acteur Lou Diamond Phillips, alors en couple avec l’une des assistantes du réalisateur, Julie Cypher, apparaît dans le film sous la forme d’un démon. On fermera le bal des suppléments avec la traditionnelle bande-annonce. Pour vous procurer cette édition limitée à 1000 exemplaires, rendez-vous sur le site de l’éditeur !

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