Test Blu-ray : L’amant de Lady Chatterley

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L’amant de Lady Chatterley

Royaume-Uni, France, Allemagne : 1981
Titre original : Lady Chatterley’s lover
Réalisation : Just Jaeckin
Scénario : Marc Behm, Just Jaeckin, Christopher Wicking
Acteurs : Sylvia Kristel, Shane Briant, Nicholas Clay
Éditeur : Zylo Editions
Durée : 1h44
Genre : Drame, Erotique
Date de sortie cinéma : 29 juin 1981
Date de sortie DVD/BR : 16 mars 2021

Constance Chatterley est poussée par son mari sexuellement impuissant suite à une blessure de guerre, à prendre un amant pour avoir un enfant et assurer la lignée des Chatterley. Attirée par Mellors, le garde-chasse, elle va entretenir avec celui-ci une liaison passionnée en dépit de leur différence de statut social…

Le film

[3/5]

L’amant de Lady Chatterley, réalisé par Just Jaeckin et coproduit par Menahem Golan et Yoran Globus pour la Cannon, est la deuxième adaptation de l’œuvre sulfureuse de D.H. Lawrence. Dans la carrière de Just Jaeckin, le film marquait les retrouvailles du cinéaste avec l’actrice Sylvia Kristel, sept ans après l’immense succès mondial d’Emmanuelle. D’une façon plus « pragmatique », on suppose également que Jaeckin tentait avec ce film de renouer avec le succès, dans le sens où les trois films qu’il avait réalisés après Madame Claude en 1977 avaient été des échecs au box-office.

Quoi de mieux dès lors que d’aborder, avec son actrice fétiche qui plus est, l’histoire d’une grande bourgeoise se découvrant une sexualité débridée au contact du garde-chasse aux manières rudes travaillant à son service ? Bien entendu, les amoureux de l’œuvre originale verront probablement dans cette adaptation sur grand écran de L’amant de Lady Chatterley une trahison, par bien des aspects.

Mais le fait est que malgré ses défauts, le film de Just Jaeckin se distingue tout de même par une esthétique soignée, ainsi que par une sobriété formelle qui est à la fois sa principale qualité et son plus grand défaut. Parce que oui, L’amant de Lady Chatterley recycle la plupart des codes formels et narratifs du « grand film Victorien en costumes » à la James Ivory – une esthétique tout en classe et en retenue qui perdure dans le temps depuis les années 70, et que l’on retrouve encore de nos jours à travers des séries telles que Downton Abbey par exemple.

Bien sûr, il y a de la nudité et quelques mots salaces que l’on n’entend ni chez Ivory, ni dans la série de Julian Fellowes. Evidemment, on trouve dans le film de Just Jaeckin quelques scènes de sexe parfois bizarrement amusantes, mais d’une façon assez paradoxale, l’impression qui dominera à la découverte de L’amant de Lady Chatterley est celle d’une trop grande sagesse, d’un classicisme un peu forcé, que l’on aurait aimé voir voler en éclats de la même façon que la vie de Constance Chatterley.

Le film de Just Jaeckin, ainsi que le livre qu’il adapte, aurait mérités une approche plus révolutionnaire, plus rock n’roll, une esthétique « destroy » à la Harlots peut-être, afin de mieux traduire à l’écran la nature « sulfureuse » de l’œuvre d’origine. Cette histoire d’amour impossible, illustration de la passion et, d’une certaine manière, de la lutte des classes, aurait gagnée à se voir secouée, voire même maltraitée, afin d’en retrouver l’essence…

On comprend cela dit que là n’était probablement la volonté de Just Jaeckin, qui nous livre avec L’amant de Lady Chatterley une jolie illustration, un livre d’images très soigné, visuellement réussi. A la photo, son complice Robert Fraisse signe comme à son habitude les belles images éthérées dont il a le secret, et le production design de l’ensemble est irréprochable, ce qui permettra au film de traverser les années sans trop de dommages.

Au final, Just Jaeckin livre donc au public une adaptation de L’amant de Lady Chatterley imparfaite mais somme toute fréquentable. Si on pourra trouver le temps long devant un enchainement de scènes érotiques un peu trop plan-plan ou ne pas pardonner aux scénaristes (parmi lesquels le romancier Marc Behm, auteur des géniaux Mortelle randonnée et La reine de la nuit) les libertés prises avec le roman de D.H. Lawrence, on ne pourra en revanche que s’incliner devant le soin apporté par Jaeckin et son équipe pour la mise en images de scènes érotiques toujours classieuses et élégantes.

Le Blu-ray

[4/5]

On pensait que la société Zylo Éditions avait mis la clé sous la porte, ne pouvant plus faire face aux difficultés liées au marché de la vidéo physique. On se trompait, manifestement : Zylo bande encore, et vient de le prouver au monde entier avec la sortie couplée, le 16 mars, de deux films érotiques signés Just Jaeckin, Madame Claude et L’amant de Lady Chatterley.

Côté Blu-ray, le master 1080p de L’amant de Lady Chatterley a été restauré en 4K par ToutJustFilms sous la supervision de Robert Fraisse, et l’ensemble est assez remarquable. Un panneau en avant-programme indique que Just Jaeckin remercie – entre autres – Stéphane Bouyer, cofondateur du Chat qui fume. Si le piqué est peut-être un peu doux, les couleurs et les contrastes retrouvent une nouvelle jeunesse, tout en respectant scrupuleusement le grain argentique d’origine. On dénote toujours par ci par là un peu de bruit vidéo et quelques petits problèmes de compression sur les scènes les plus sombres, mais l’ensemble est globalement très bien tenu. Côté son, VF et VO sont proposées en Dolby Digital 2.0 mono d’origine, la version française s’avérant un peu plus étouffée que sa grande sœur, avec un très léger souffle, mais on chipote un peu, rien de dramatique là non plus, c’est du beau travail.

Du côté des suppléments, on trouvera un documentaire dédié à la carrière de Just Jaeckin, et intitulé « Just Jaeckin, l’homme qui aimait les femmes » (52 minutes). Tourné en 2008, le film s’attardera essentiellement sur le contexte socio-politique ayant contribué à la naissance d’Emmanuelle, avant de s’attarder plus particulièrement sur la personnalité de Just Jaeckin, pudique au point de détourner les yeux des filles nues lors de ses propres castings, et devenu malgré lui le pape de l’érotisme soft dans les années 70/80, et un véritable paria au cœur du cinéma français.

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