Test Blu-ray : Au bout du monde

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Au bout du monde

Japon, Ouzbékistan : 2019
Titre original : Tabi no owari sekai no hajimari
Réalisation : Kiyoshi Kurosawa
Scénario : Kiyoshi Kurosawa
Acteurs : Atsuko Maeda, Ryô Kase, Shôta Sometani
Éditeur : Eurozoom
Durée : 2h00
Genre : Drame
Date de sortie cinéma : 23 octobre 2019
Date de sortie DVD/BR : 2 septembre 2020

Reporter pour une émission populaire au Japon, Yoko tourne en Ouzbékistan sans vraiment mettre le cœur à l’ouvrage. Son rêve est en effet tout autre… En faisant l’expérience d’une culture étrangère, de rencontres en déconvenues, Yoko finira-t-elle par trouver sa voie ?

Le film

[4/5]

S’il fait partie de la génération des cinéastes japonais issus de l’école « Super 8 » et s’est fait remarquer en réalisant des films d’horreur, Kiyoshi Kurosawa s’est finalement écarté de la série B afin de signer des longs-métrages à la portée plus universelle. Depuis une quinzaine d’années, il est ainsi régulièrement considéré comme l’un des artistes les plus marquants du renouveau du cinéma japonais.

Son dernier film, Au bout du monde, qui suit une reporter japonaise lors d’un voyage professionnel en Ouzbékistan, fait indéniablement partie de ces films de Kurosawa dont la portée dépasse la simple « chronique », et vise clairement à souligner la problématique de la « déshumanisation » du monde contemporain – valable dans le monde entier mais s’avérant peut-être encore plus exacerbée au cœur de la société japonaise.

Ainsi, à travers le parcours de son héroïne Yoko (Atsuko Maeda), Au bout du monde souligne avec un certain cynisme à quel point ses contemporains peuvent s’avérer égocentriques, surtout quand ils se retrouvent isolés dans un pays étranger. Tout semble faux dans le travail de Yoko, ce qu’elle montre devant la caméra n’a rien à voir avec la nature presque inhumaine des relations qu’elle noue avec les autres en dehors des caméras.

Mensonges, faux-semblants, dépendance aux écrans… Pour Kiyoshi Kurosawa, les humains ne semblent plus réellement avoir de « lien » réel avec le monde qui les entoure. Plus de relations, plus de conversations, et plus aucun effort pour tenter de comprendre l’autre : plus rien ne semble les rattacher à leur nature d’êtres humains. Ainsi, Yoko voyage, mais en réalité, elle refuse d’aller vers l’autre, elle en a peur, et ne cherche au final qu’à s’isoler pour retrouver un semblant de bonheur dans ce qui n’est rien d’autre au final que des rêves.

Comble de la déshumanisation des rapports de Yoko avec le monde qui l’entoure : même son petit ami n’apparaitra dans Au bout du monde que sous la forme d’une voix au téléphone. Sur le plateau comme dans la vie, Yoko ne semble guère être plus qu’un accessoire, un objet que l’on pourra remplacer par un autre. A l’image de la chèvre qu’elle veut libérer à un moment dans le film, le personnage incarné par Atsuko Maeda est prisonnière, dans son job autant que dans la société – elle n’est plus qu’une fonction, pas un individu.

Il n’y a rien d’étonnant à retrouver ce discours au cœur de l’œuvre de Kiyoshi Kurosawa, qui déjà avec ses premiers films d’horreur (Cure et Pulse) mettait en avant l’isolement extrême des japonais tout autant qu’il soulignait les dangers des écrans et de la technologie. Pour autant, et malgré le cynisme général de son propos, Kiyoshi Kurosawa parvient avec Au bout du monde à livrer un film doux-amer, souvent drôle, développant une réelle poésie. Cette belle réussite constitue par ailleurs la troisième collaboration entre Kiyoshi Kurosawa et Atsuko Maeda, star de la pop au Japon et ex-membre du groupe de J-pop AKB48.

Le Blu-ray

[4/5]

Joli film aussi bien narrativement que formellement, Au bout du monde nous donne à voir de très beaux plans de paysages de l’Ouzbékistan, dont la lumière est assurée par le directeur photo Akiko Ashizawa. Il fallait donc que le Blu-ray du film de Kurosawa soit à la hauteur ! Rassurez-vous cependant : comme à son habitude, Eurozoom a fait le job avec soin, et apporté un soin tout particulier au transfert de l’image. Le master du film affiche donc une forme littéralement insolente : beau piqué, couleurs éclatantes, profondeur de champ et niveau de détails accrus… Du beau travail. Côté audio, la version originale est proposée en DTS-HD Master Audio 5.1, et impose un mixage d’un dynamisme et d’une finesse assez redoutables, même si, naturellement, le film en lui-même ne se prête pas forcément à la démonstration technique.

La section suppléments contient tout d’abord une intéressante rencontre entre Kiyoshi Kurosawa et les spectateurs français à l’issue d’une projection du film (25 minutes), ce qui lui permettra de revenir sur quelques uns des aspects du film : le tournage en Ouzbékistan, l’idée de la « quête impossible », les références à la chanson d’Edith Piaf entendue dans le film ou encore à la chèvre de Monsieur Seguin d’Alphonse Daudet… On terminera ensuite avec un entretien avec Kiyoshi Kurosawa (20 minutes). Il y reviendra sur l’origine du projet, la place du cinéma en Ouzbékistan, l’écriture du scénario, le choix d’Atsuko Maeda, etc. Complet et intéressant.

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