Test Blu-ray 4K Ultra HD : The Sadness

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The Sadness

Taïwan : 2021
Titre original : Ku bei
Réalisation : Rob Jabbaz
Scénario : Rob Jabbaz
Acteurs : Berant Zhu, Regina Lei, Chen Ying-Ru
Éditeur : ESC Éditions / Factoris Films
Durée : 1h42
Genre : Horreur
Date de sortie cinéma : 6 juillet 2022
Date de sortie DVD/BR : 9 novembre 2022

Après un an de lutte contre une pandémie aux symptômes relativement bénins, une nation frustrée finit par baisser sa garde. C’est alors que le virus mute spontanément, donnant naissance à un fléau qui altère l’esprit. Les rues se déchaînent dans la violence et la dépravation, les personnes infectées étant poussées à commettre les actes les plus cruels et les plus horribles qu’elles n’auraient jamais pu imaginer…

Le film

[4/5]

En dépit d’un petit sursaut au début des années 2000, le cinéma taïwanais n’a jamais été particulièrement porté sur l’horreur : les films fantastiques en provenance de l’île de Formose se comptent en effet grosso modo sur les doigts d’une main, et jusqu’ici, aucun d’entre eux n’était parvenu à véritablement marquer les esprits des amateurs de frissons sur celluloïd. Le choc ressenti à la découverte de The Sadness n’en sera finalement que plus grand : on tient assurément ici le premier grand film d’horreur taïwanais, et on espèce que ce dernier ouvrira la voie à d’autres cinéastes désireux d’ouvrir leur pays à un cinéma de l’étrange.

Alors, qui est aux commandes de The Sadness ? Quel réalisateur est-il enfin parvenu à transcender les notions de genre cinématographique à Taïwan en nous offrant cette grosse claque cinématographique ? S’agit-il de Tsai Ming-Liang, de Hou Hsiao-Hsien, d’Ang Lee ? Ou, plus probablement, d’un représentant du jeune cinéma taïwanais, tel que Giddens Ko ? Hé bien non, PERDU les amis, The Sadness est en réalité le fruit de l’imagination de Rob Jabbaz, un cinéaste canadien installé à Taïwan depuis une dizaine d’années.

Épouvantablement gore, monstrueusement obscène, The Sadness comblera à coup sûr les amateurs de tripaille, et les fans de l’esprit provocateur développé par Garth Ennis depuis de nombreuses années dans le domaine des comics (Preacher, Punisher, Judge Dredd, The Boys…). L’intrigue de The Sadness n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de Crossed (2010-2011), une courte série scénarisée par Ennis et dessinée par Jacen Burrows, qui se vautrait dans le même mauvais esprit et les mêmes outrances côté violence et sexe.

Cependant, on ne pourra nier que The Sadness débarque à point nommé, le film de Rob Jabbaz s’imposant finalement comme la réponse cinématographique la plus sombre et la plus déjantée à la pandémie mondiale de Covid-19, dans le sens où ce lien fort avec l’actualité récente n’existait pas lors de la publication des comics de la série Crossed. Le film met donc en scène un mystérieux virus s’abattant sur la ville de Taipei – ville surpeuplée s’il en est, remplie à craquer d’appartements et de logements divers, aux rames de métro bondées, etc. Le terrain idéal pour la propagation d’un virus d’un nouveau genre, transformant les infectés en monstres enragés et ultra-violents, esclaves de leurs plus bas instincts.

Prenant à peine le temps de permettre au spectateur de faire connaissance avec les deux personnages principaux (Berant Zhu et Regina Lei), The Sadness emportera le public en plein cœur d’une vague de panique et de violence sadiques, les infectés multipliant les actes de barbarie, les agressions sexuelles et s’adonnant au cannibalisme. Mais en dépit de sa violence, le film de Rob Jabbaz développe également, à travers ses nombreuses outrances et ses déviances décomplexées, un certain humour, très noir : il s’agit là d’un jeu de massacre que l’on pourra trouver, le plus souvent du moins, absolument jouissif, et d’autant plus immersif que ses effets spéciaux « gore » sont extrêmement bien faits. Pas de gerbes de sang numérique ou d’effets spéciaux conçus par ordinateur ici, tous les effets sont des effets « pratiques », réalisés à même le plateau, et cela se ressent.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la frontalité extrême et généreuse de The Sadness fait vraiment du bien. À une époque où le cinéma d’horreur joue le plus souvent la carte de l’Elevated Horror, avec des films dans lesquels les racines de la peur sont souvent des métaphores de problèmes sociaux ou d’éléments intangibles (tels que les traumatismes psychologiques), il est rafraîchissant de tomber sur un film tel que The Sadness. Le film de Rob Jabbaz ne fait pas dans le symbolique, et la terreur y prendra de fait une forme beaucoup plus immédiate, plus viscérale. Le fil narratif principal est certes assez ténu (un couple de jeunes gens essaie de se retrouver au milieu du carnage), mais le sentiment d’urgence est bien maintenu du début à la fin du métrage, ce qui permettra à Rob Jabbaz d’enchaîner les moments de bravoure de plus en plus sadiques sur un rythme fou, et avec une inventivité étonnante.

A la limite, les cinéphiles les plus portés sur l’analyse pourraient éventuellement percevoir dans The Sadness un message détourné vis-à-vis du discours scientifique et politique mondial durant la pandémie de Covid-19, qui se retrouve dans certaines lignes de dialogue au début du film ou encore durant le monologue du virologue, qui survient durant le dernier acte. Cela dit, cet élément ne constitue pas le cœur du film, et le premier long-métrage de Rob Jabbaz s’avérera plus convaincant lorsqu’il fait gicler des litres de sang que lorsqu’il se risque à délivrer un message. L’équilibre entre les scènes gore, les moments de tension réelle et les tentatives de commentaires sur les délires anti-vax et le déni du COVID est donc parfaitement respecté, et permet à The Sadness de s’imposer comme une excellente surprise, d’autant plus étonnante qu’elle est vraiment sortie de nulle-part.

Le Combo Blu-ray 4K Ultra HD + Blu-ray + Goodies

[5/5]

En dépit des seulement 46.000 entrées qu’il a enregistré en France l’été dernier (sur un petit circuit de 85 salles), The Sadness méritait amplement une sortie au format Blu-ray, et ESC Éditions s’est même carrément fendu pour l’occasion d’un superbe coffret « Collector » proposant, en plus du film en Blu-ray et Blu-ray 4K Ultra HD, tout plein de goodies qui devraient ravir les amateurs d’horreur. La sortie du film au format 4K est d’ailleurs tout à fait légitime, dans le sens où The Sadness a été tourné avec la caméra RED Monstro, qui enregistre au format 8K, et nous offre ainsi une excellente base pour une image nette et détaillée de la mort qui tue, ce qui fera inévitablement bander tous les amateurs d’horreur. Une copie intermédiaire 4K a été utilisée pour l’encodage du film, et le résultat est vraiment bluffant.

En outre, si le Blu-ray 4K Ultra HD de The Sadness ne nous est pas proposé en HDR10, dès les premières minutes du film, la version 4K du film creusera tout de même clairement l’écart avec son équivalent Blu-ray : les hautes lumières y sont présentées avec beaucoup plus d’éclat, la précision du master et la tenue incroyable des couleurs est évidente, notamment sur les plans d’introduction qui nous proposent une vue d’ensemble des toits des maisons de Taipei. Les gros plans sur les visages révèlent encore plus de détails, les niveaux de noirs sont riches, et les couleurs sont restituées de manière plus saturée. Dommage pour l’absence de HDR donc, mais le rendu 4K de cette galette est quand même une grosse tuerie. Du côté des pistes son, on aura droit à deux pistes sonores encodées en DTS-HD Master 5.1, qui nous proposent une bonne immersion, mais restent le plus souvent étonnamment frontales (un peu à la manière du film en un sens). La musique est volontairement placée à l’écart de l’action, et les Surrounds accompagnent les scènes de panique de manière réelle, mais plutôt discrète. Il s’agit néanmoins de deux excellents mixages d’ambiance.

Du côté des bonus, il n’y aura rien sur le Blu-ray 4K Ultra HD, et il faudra se pencher sur la version Blu-ray du film pour découvrir la belle interactivité que nous propose ici ESC Éditions (en partenariat avec Factoris Films si l’on en croit les logos visibles sur la galette). On commencera donc par une poignée de modules de making of (12 minutes), qui reviendront sur les coulisses du tournage et comprennent des interventions du scénariste / réalisateur Rob Jabbaz, ainsi que de Tzu-Chiang Wang, qui interprète le glaçant homme d’affaire à la recherche de Kat (Regina Lei). Les décors, les maquillages et les effets spéciaux seront également abordés, et un des modèles sera entièrement consacré à des images volées sur le tournage, sans le moindre commentaire. On continuera ensuite avec un entretien avec Rob Jabbaz (29 minutes), réalisé en visioconférence, qui nous donnera, malgré quelques longueurs, un aperçu intéressant de ce qu’il voulait faire avec The Sadness, ainsi que quelques secrets sur l’envers du décor. Il évoquera notamment ses influences les plus conscientes : Evil Dead (Fede Alvarez, 2013) et Uncut Gems (Benny et Josh Safdie, 2019). On enchaînera avec une présentation du film nous proposant d’entendre les propos croisés de Fausto Fasulo et Jean-François Rauger (22 minutes), une featurette consacrée à l’étalonnage du film (12 minutes), commentée par le réalisateur et construite sur le mode toujours payant du « Avant / après » et une galerie (animée) de projets d’affiches. Last but not least, on terminera avec deux courts-métrages de Rob Jabbaz : Clearwater (2020, 6 minutes), sympathique petite bande-démo imaginative centrée sur les effets spéciaux en images de synthèse, et Fiendish Funnies (2013, 4 minutes), film d’animation dont on voit d’ailleurs un extrait dans The Sadness.

Mais ce n’est pas tout ! Car comme on vous l’avez dit en préambule, ESC Éditions gâte le consommateur français – vous trouverez également au sein du coffret The Sadness « Édition Collector » plusieurs Goodies qui raviront les amateurs :

– L’affiche du film recto/verso

– Un carnet de storyboards

– 10 photos collector

– Un sticker

– Un mois d’abonnement offert à la plateforme Shadowz

2 Commentaires

  1. Bonjour
    Êtes-vous sûr que le film est en HDR 10 ?
    Je possède ce superbe coffret mais pour moi le film est en SDR (mais magnifique quand même).

    Bonne journée

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