Revu sur OCS : Green Card

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© 1990 François Duhamel / Touchstone Pictures / Studiocanal Tous droits réservés

Comment se fait-il que nous n’avons pratiquement pas revisité cette comédie romantique exquise depuis sa sortie au début des années 1990 ? C’est désormais chose faite, grâce au replay d’OCS sur lequel Green Card sera encore disponible pendant une quinzaine de jours. Et quelle joie immense de s’assurer que le film de Peter Weir n’a rien perdu de sa superbe, de son esprit pétillant, de son eau de rose au parfum raffiné ! Il s’agit de la perle rare au sein d’un genre, qui nous inspire généralement une indifférence polie, ainsi que du lien précieux, car si ténu, avec la grande époque des comédies de mariage ou de divorce de l’âge d’or hollywoodien des années 1930 et ’40. Une tradition du divertissement sentimental au degré suprême de sophistication, qui s’est hélas totalement perdue depuis, ce qui rend la survie de ce film-ci dans la mémoire collective des cinéphiles avisés d’autant plus cruciale.

Pourtant, la prémisse du premier et, de très loin, du meilleur film anglophone du monstre sacré du cinéma français Gérard Depardieu n’a rien de particulièrement exotique : Brontë, membre éminent de l’élite écologique de New York, accepte de faire un mariage blanc avec Georges, un compositeur et cuisinier français un peu rustre en apparence, afin de pouvoir emménager seule dans un spacieux appartement avec jardin d’hiver. Elle aura le logement de ses rêves et lui recevra en échange ses papiers d’immigration. Rien d’original donc dans ce type de troc qui fait toujours autant courir l’administration américaine. Même le déroulé de l’intrigue semble rester plutôt prévisible, par le biais d’un week-end de cohabitation forcée, en théorie pour bien préparer le rendez-vous avec les fonctionnaires pointilleux, quoique en pratique le prétexte idéal pour voir naître un amour sincère au cours d’une chronologie chamboulée, où le passage à la mairie précède à celui au lit.

© 1990 François Duhamel / Touchstone Pictures / Studiocanal Tous droits réservés

Tout le brio de Peter Weir consiste alors à donner à chaque séquence un air de fraîcheur insoupçonné. Chaque étape de ce jeu de piste vers le coup de foudre a déjà été vu mille fois ailleurs. Néanmoins, un mélange très savant entre la gravité et la frivolité, entre l’appréhension et la séduction, de surcroît anobli par une mise en scène d’une précision extraordinaire, conduit à rien de moins que la pièce maîtresse de la comédie romantique du dernier demi-siècle ! Imaginez donc Green Card comme une carte postale parfaite de New York, dans la lignée du meilleur de Woody Allen, le nombrilisme névrosé en moins. Et pour ne rien gâcher, Andie MacDowell y forme un couple irrésistible – car constamment convaincu de ne pas être fait l’un pour l’autre – avec un Depardieu qu’on a très rarement vu dans le rôle d’un charmeur aussi naturel. Les étincelles ont beau voler sans cesse entre eux, ils sont épaulés par des personnages secondaires de même exceptionnellement savoureux. Le regard incrédule de Bebe Neuwirth lors de la performance de Georges au piano vaut ainsi son pesant d’or.

Pour certains, la grande époque de la comédie romantique qu’étaient les années ’90 s’articule autour de Quatre mariages et un enterrement de Mike Newell, sorti en plein milieu de la décennie. Pour nous, elle avait commencé avec un véritable coup d’éclat dès 1990, grâce à Green Card. Sa réputation confidentielle de chef-d’œuvre ne nous paraît aucunement usurpée, tant la mise en scène de Peter Weir et le jeu inspiré au plus haut point de MacDowell et Depardieu arrivent à y réinventer un genre déjà usé jusqu’à la corde à ce moment-là. Que cette histoire doucement rocambolesque n’ait pas fait depuis des émules dignes de ce nom lui confère une qualité d’autant plus inestimable !

© 1990 François Duhamel / Touchstone Pictures / Studiocanal Tous droits réservés

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