Critique : Summer white

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Summer white

Mexique : 2020
Titre original :  Blanco de verano
Réalisation : Rodrigo Ruiz Patterson
Scénario : Raúl Sebastian Quintanilla, Rodrigo Ruiz Patterson
Interprètes : Adrián Rossi, Sophie Alexander-Katz, Fabián Corres
Distribution : Destiny Films
Durée : 1h28
Genre : Drame
Date de sortie : 18 août 2021

3.5/5

Agé de 33 ans et natif de Mexico City, Rodrigo Ruiz Patterson est diplômé du Centro de Capacitación Cinematográfica (CCC), une école de cinéma qui dépend du secrétariat à la culture du Mexique. Tout en étant également écrivain, il a réalisé de nombreux court-métrages et coréalisé en 2020 Bad Hombres, un long métrage documentaire. Très bien reçu dans un certain nombre de festivals,  Summer White est son premier long-métrage de fiction.


Synopsis : Rodrigo, adolescent solitaire, a une relation forte avec sa mère. Les choses changent quand elle invite son nouveau petit ami à venir vivre dans leur maison, à la périphérie de Mexico. Rodrigo doit décider s’il peut accepter cette nouvelle famille ou se battre pour son trône, écrasant le bonheur de la personne qu’il aime le plus.

Valeria, Rodrigo et Fernando

Peut on parler de couple s’agissant d’une mère divorcée et de son fils de 13 ans qui vivent ensemble dans la banlieue de Mexico ? Sûrement pas, même si, entre Valeria, cette mère aimante, et Rodrigo, son fils adoré, les rapports sont véritablement fusionnels. C’est ainsi qu’il arrive à Rodrigo d’investir le lit de sa mère en venant se blottir dans ses bras, de se brosser les dents, torse nu, à côté de sa mère sortant de la douche, également torse nu, de prendre des leçons de danse avec elle au cours desquelles Valeria insiste sur le regard vers l’autre. Des leçons de danse sur une chanson du tout début des années 60, « I love you baby » de Maurice Williams et les Zodiacs, dont le titre laisse penser qu’elle n’a pas été choisie au hasard. Rien d’ambigu dans tout cela, non, tout simplement un amour réciproque et une grande confiance l’un envers l’autre au point que Valeria a la certitude que jamais Rodrigo ne lui mentira si elle le fait jurer sur sa vie à elle.

Mais voilà que, un jour, dans cet océan de félicité, Valeria arrive avec un homme qui l’accompagne. Plutôt sympa avec Rodrigo, ce Fernando, chahutant gentiment avec lui lors d’une escapade du trio à Acapulco et lui donnant des leçons de conduite sur sa voiture. Au point que lorsque Valeria demande à son fils s’il aime bien Fernando et s’il considère que c’est une bonne personne, la réponse est deux fois oui. Toutefois, certains « petits détails » viennent mettre des grains de sable dans la relation entre Fernando et Rodrigo ainsi que dans celle entre Rodrigo et sa mère : par exemple, voir Fernando déménager à temps complet dans la maison de sa mère, entendre des gémissements de plaisir de la part de sa mère, provenant de la pièce d’à côté, ou bien apercevoir sa mère donner une leçon de danse à Fernando, sur la même chanson, en utilisant les mêmes mots qu’avec lui. Instauration d’une forme de jalousie qui ne peut que déboucher sur une situation conflictuelle.

Un film sur l’enfance

A 13 ans, Rodrigo est encore un enfant même si la relation particulière qu’il a eue jusqu’alors avec sa mère en a déjà fait un petit homme. Comme le suggère l’étymologie latine du mot enfant, infans, « qui ne parle pas », Rodrigo est à un âge où on ne parle pas des nouvelles émotions qui vous envahissent, on les traduit en actes : ici des actes de révolte, en utilisant le feu, de recherche d’une vie qui n’appartienne qu’à vous, en investissant un vieux motor-home abandonné dans une décharge. C’est ainsi qu’on voit de nouveau Rodrigo en train de se laver les dents, mais ce sont des posters de jeunes femmes dénudées qu’on voit derrière lui et non plus la poitrine de sa mère.

A 13 ans, Rodrigo est à un âge qui confronte les parents à une grande difficulté que Summer white montre très bien : comment réagir face aux accrocs qui ne manquent pas de survenir dans les relations entre des parents et leurs enfants entrant dans l’adolescence ? Comment éviter qu’un cercle vicieux se mette en route à la suite d’une « embrouille » dont tout laissait penser qu’elle était sans importance, tout en évitant de se réfugier dans un laisser-faire paresseux ?

De la sobriété et un bon trio d’interprètes

Pour son premier long métrage de fiction Rodrigo Ruiz Patterson a choisi de ne pas faire dans l’esbrouffe : la mise en scène, les plans construits avec María Sarasvati Herrera, la Directrice de la photographie, sont toujours très sobres, on n’entend aucune musique d’accompagnement, ce qui, dans le contexte de son film est une véritable qualité, et la direction d’acteurs est précise. Un seul petit regret, qui concerne le scénario : le goût de Rodrigo pour le feu est trop appuyé et cela donne un caractère trop prévisible à la scène la plus forte du film. Le trio des interprètes nous est inconnu, mais sans aucune faille, avec Sophie Alexander-Katz, l’interprète de Valeria, très présente au Mexique tant au cinéma et au théâtre qu’à la télévision, Fabián Corres, l’interprète de Fernando, beaucoup plus souvent acteur de télévision que de cinéma, et Adrián Rossi, l’interprète de Rodrigo, débutant à l’écran. 

Conclusion

En faisant preuve d’une grande sobriété tout au long de Summer white, en ne cherchant jamais à en mettre plein la vue (et les oreilles !) aux spectateurs, Rodrigo Ruiz Patterson réussit presque parfaitement son examen de passage dans le long métrage de fiction. Pourquoi ce « presque » ? Le petit bémol qu’on est en droit de noter réside dans l’utilisation un peu maladroite qui est faite du goût de Rodrigo pour le feu, une utilisation  qui donne un caractère trop prévisible à la scène la plus forte du film. Un défaut d’autant plus véniel que, par ailleurs, Summer white décrit très intelligemment les tourments que peuvent connaître de jeunes adolescents face à des émotions jusque là inconnues ainsi que les problèmes que rencontrent les parents face aux comportements que ces tourments entraînent, souvent difficiles à comprendre et à bien canaliser.

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